Les auditeurs du premier cafet'éco du cycle 2009-2010 m'ont demandé de consacrer la prochaine rencontre à la question de la dette publique. En effet, que de
chiffres alarmistes et d'analyses terrifiantes distillés dans les journaux ces derniers jours ! Le déficit et la dette sont d'ailleurs des termes honnis dans le vocabulaire gouvernemental
qui semble parfois ne contenir que quelques mots. Or, il faut bien comprendre que la dette n'est pas une mauvaise chose en soi, car c'est une
des possibilités de paiement pour un Etat. Elle a même souvent quelques vertus lorsqu'elle est utilisée avec discernement...
Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'élaboration du projet de loi de finances 2010 a été très compliquée en raison de la baisse prononcée des recettes de l'Etat. Entre les dépenses de
relance et les pertes massives de recettes, le déficit de l'Etat atteindra plus de 140 milliards d'euros (31 milliards pour la Sécurité sociale), ce qui représente un déficit public de 8,2 % du
PIB en 2009 et 8,5 % en 2010 ! Rappelons que le déficit budgétaire se différencie du déficit public, car il n’englobe pas le solde des recettes et des dépenses des collectivités territoriales et
de la Sécurité sociale.
La situation budgétaire n'est pas meilleure ailleurs, loin s'en faut. Barack Obama avait dévoilé, en février, son premier budget, qui prévoyait un déficit colossal de 1 370 milliards d'euros
en 2009 et de 1 171 milliards en 2010. Ce déficit, qui équivaut à 12,3 % du PIB en 2009, et à 8 % en 2010, est le plus important - en proportion du PIB des Etats-Unis -depuis la seconde
guerre mondiale !
Lorsque la réduction du déficit devient l'utime finalité de la politique économique, il ne faut pas s'étonner que le gouvernement cherche à récupérer de l'argent par des moyens saugrenus, quitte
à provoquer une bronca. On pense bien entendu au ministre du Budget (Eric Woerth) qui a estimé que ce serait une "mesure de justice" d'imposer les indemnités journalières versées
aux salariés victimes d'accidents du travail. Disons-le clairement : un Etat n'est pas une entreprise, et l'équilibre des comptes n'est pas un objectif nécessairement atteignable et encore moins
souhaitable dans certaines périodes. Cependant, avec ce genre d'objectifs anti-économiques, il faudra tôt ou tard s'attendre à passer à la caisse sous forme d'augmentation des impôts, même
si le gouvernement ne cesse d'annoncer que les prélèvements n'augmenteront pas. Tout ceci me rappelle, toutes proportions gardées, un certain tournant de la rigueur en 1983, qui avait
surpris bon nombres de personnes à cette époque. D'autant plus que Jacques Delors, alors ministre des finances, déclarait que cette politique était dans le "dans le droit fil de l'esprit de
solidarité". C'est curieux, mais c'est toujours de la même solidarité dont on nous parle encore aujourd'hui, alors même que la couleur politique dominante a changé. Une solidarité à
niches fiscales ?