Un soir où, devant un auditoire, Madame de Nangis est prise à partie par son mari, soupçonnant que la partition ait été composée à son intention par Germeuil, son amant, la jeune Natalie, secrètement amoureuse de ce dernier, l'ayant appris par coeur après la lui avoir dérobée, intervient pour la sauver. La seconde fois signera la concrétisation de leur couple et de leur amour aux yeux de tous, jusqu'à ce que Madame de Nangis demande à Natalie d'y renoncer. Cetet dernière part alors de son propre chef et, dans sa retraite, écrit... Cette nouvelle sentimentale n'est pas sans rappeler une certaine Madame de Lafayette par son éloge de la vertu et des sentiments amoureux. Tout en fustigeant la gent masculine, plus ambitieuse que constante dans le sentiment amoureux, Madame de Genlis conseille à ses lectrices de savoir rester humbles et discrètes, la condition d'écrivain les exposant aux pires médisances. Comment peut-on être aussi contradictoire, en étant au demeurant soi-même pédagogue, disciple de Rousseau, et femme de lettres ? Comment peut-on écrire :
"Je garderai ma liberté, je ne me marierai jamais, je serai toujours indépendante, et par conséquent plus heureuse." (p. 40)
et exiger des femmes qu'elles ne se mettent jamais en avant et restent "à leur place" ?
Voilà bien un état d'esprit tourmenté, celui d'une aristocrate de l'Ancien Régime, occupée d'éducation, de religion et de morale, mais n'allant pas jusqu'au bout de son statut de "femme auteur" en embrassant une vision plus féministe de la position sociale de la femme. Peut-être n'a-t-elle pas souhaité que d'autres femmes subissent les calomnies qu'elle a pu endurer de son vivant. Elle fit ainsi, même dans ses écrits, le choix du fatalisme et non du combat. Du coup, ne reste comme attrait de sa nouvelle que la finesse de son analyse psychologique des sentiments amoureux. Dommage...