L’accès au statut d’ “organisation religieuse” a été refusé à des groupes pratiquant la scientologie, la loi russe exigeant soit une présence de ce groupe depuis au moins 15 ans sur le territoire concerné, soit un rattachement à une organisation religieuse déjà reconnue. Faute de répondre à ces conditions, ces groupes religieux ne purent pas bénéficier de la personnalité morale et des multiples autres avantages liés à ce statut.
La Cour européenne des droits de l’homme juge l’article 9 (liberté de pensée, de conscience et de religion) applicable à la situation.
Cependant, elle refuse explicitement de trancher la question de savoir si les pratiques de la scientologie peuvent être qualifiées de religieuses. Elle relève d’ailleurs la controverse et l’absence de consensus en Europe à ce sujet (« the question whether or not Scientology may be described as a “religion” is a matter of controversy among the member States. […] It is clearly not the Court’s task to decide in abstracto whether or not a body of beliefs and related practices may be considered a “religion” within the meaning of Article 9 of the Convention » - § 79).
En application du principe de subsidiarité, elle se borne donc à indexer le champ d’application de l’article 9 (examiné, en l’espèce, à la lueur de la liberté d’association - Art. 11 - § 81) sur la qualification retenue par l’Etat défendeur qui, lui, a admis la nature religieuse de la scientologie (§ 80).
Les juges strasbourgeois estiment ensuite que le refus d’octroyer le statut d’ “organisation religieuse” constitue, du fait de l’importance des droits que ce dernier confère, une ingérence au sein de cette liberté (§ 82 à 89).
Or, si cette ingérence est bien prévue par la loi russe (§ 95) et poursuit le but légitime de protection de l’ordre public (§ 97), elle est jugée par la Cour comme n’étant pas “nécessaire dans une société démocratique“. En effet, le refus d’octroi du statut est uniquement la conséquence de l’application automatique du délai de 15 ans, spécifique à la Russie (§ 98).Aucun autre élément, comme l’accomplissement d’activités illégales (§ 101), n’a été avancé par les autorités russes. La Cour, à l’aide des analyses concordantes des organes du Conseil de l’Europe, de l’OSCE et même de l’Obudsman russe (§ 63 à 71), juge ce délai insuffisamment justifié et donc contraire à la liberté de religion.
Partant, la Russie est condamnée pour violation de l’article 9.
Kimlya et autres c. Russie (Cour EDH, 1e Sect. 1er octobre 2009, req. nos 76836/01 et 32782/03)