Bien que nous soyons tous arrivés à Prague vendredi soir, le MozCamp EU 2009 a officiellement commencé le samedi 2 octobre 2009. Nous avons vu et parlé de beaucoup de choses. Des intervenants bien connus ont présenté leur keynote et c’était très intéressant. Ensuite ont eu lieu les roundtables où les discussions étaient plus animées et interactives.
Je vais tenter de vous relater ici le maximum de ce à quoi j’ai pu assister pendant ce Mozilla Camp.
A. Samedi 02/10
1. Tristan Nitot : keynote d’ouverture
La journée a bien entendu débuté avec Tristan Nitot, président de Mozilla Europe, qui nous a fait un résumé global de sa vision des choses à propos de Mozilla et Firefox. On peut entre autres retenir certains chiffres assez parlants.
Tout d’abord il nous rappelle que 45% des utilisateurs de Firefox se trouvent en Europe. Chiffre d’autant plus intéressant qu’on sait que le plus grand nombre de développeurs impliqués dans le projet se trouvent aux E‰tats-Unis (Mike Beltzner aborde d’ailleurs ce point dans sa keynote qui a eu lieu plus tard). Un autre détail intéressant est révélé lorsqu’on apprend que Firefox compte 50% d’utilisateurs en plus maintenant que lors du MozCamp de Barcelone il y a un an. Il nous a dit également quelques mots à propos de Thunderbird 3 qu’on ne peut bien entendu pas oublier étant donné que la version 3 est sur la bonne voir. Au terme de sa keynote aussi intéressante que longue on retient également que Fennec devrait être sorti pour la fin de l’année et que Firefox aura des mises à jour plus fréquentes. Ces points sont abordés également plus tard et plus en détails par d’autres orateurs.
2. Glyn Moody : keynote « Openness and the future of the Mozilla Project »
Glyn Moody
C’est ensuite au tour de Glyn Moody de prendre la parole. Il nous retrace l’historique de Mozilla et la naissance de Firefox depuis les tréfonds de Mosaic. Il raconte comment Mozilla participe à la création du Web ouvert depuis plus de 15 ans, déjà bien avant que Mozilla n’existe vraiment en 1998. De cet historique, il ouvre un brèche sur le futur de Mozilla et les implications nombreuses que ça aura sur le Web.
Open Web is not an option for Mozilla, it is necessary — Glyn Moody
Avant de terminer il nous rappelle qu’à l’époque Microsoft a obtenu l’utilisation de Mosaic sous licence pour Internet Explorer. Jusqu’à il y a peu, la licence et les conditions d’utilisations d’Internet Explorer contenaient la mention « based on NCSA Mosaic ».
3. Mark Surman : keynote « Open web, Drumbeat »
Par après c’est Mark Surman, qui nous vient directement de la Mozilla Foundation, qui prend la parole. Il parle du Web ouvert, celui qu’on aime. Il aborde après un concept qui prend de l’ampleur chez Mozilla : la générativité. Mark parle d’un sujet très prenant concernant la protection du Web et des menaces qui pèsent sur celui-ci. Le Web est sain pour l’instant mais ils est possible que la technologie ne suffise pas à le protéger dans le futur. Pour comprendre cet aspect des choses il faut voir plus loin que la simple approche matérielle du Web.
Ensuite il en vient à un sujet très important pour Mozilla : Drumbeat.
Mais qu’est-ce que Drumbeat ? Il est nécessaire de définir cette notion en quelques mots ici car l’ambiance émanant des interlocuteurs présents à Prague fait ressentir l’importance de cette approche. Mozilla Drumbeat est une proposition pour encourager les millions de personnes de la communauté à agir en tant que « stewards » de l’Open Web : expliquer et protéger le Web en tant que ressource publique essentielle. Ça concerne la protection de la vie privée, de l’identité et des données placées dans le « nuage » (vous savez bien, le cloud computing comme on l’appelle en Anglais).
Mozilla Drumbeat n’en est encore qu’au stade d’idée et c’est une idée qui a besoin de l’aide de la communauté.
Friends don’t let friends use Internet Explorer 6 — Mark Surman
Drumbeat overview
4. Glyn Moody, Tristan Nitot, Mark Surman : panel discussion
La discussion a été assez longue, très complète et a abordé de nombreux sujets intéressants. Il est quasiment impossible de résumer tout ce qui a été dit. Je peux par contre vous citer quelques morceaux choisis qui reflètent assez bien le ton de la discussion.
Anybody can use info to make something on the Web, every one has his own definition of the OW, it’s a social condition. The web is a creative place. It’s a thing you absorb and feel. It’s the use of technology to build your social condition. — Mark Surman
Drumbeat has an amazing potential in Europe because most countries develop local communities. — Tristan Nitot
Open web is about giving people the control. — Glyn Moody
Web sites and apps must not be optimized for Firefox, they must be optimized for the (Open) Web. — Glyn Moody
Glyn, Mark and Tristan facing us
5. Keynote « Firefox.Next » : Mike Beltzner
Mike a fait le point sur la Mission et les changements à venir. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles Mozilla met des programmes à disposition (et surtout Firefox). C’est d’abord une manière de montrer la technologie développée et impliquée. Les programmes développés améliorent l’expérience des utilisateurs sur le Web. Aussi, ça rend le Web meilleur (évidemment
Mike Beltzner
Du point de vue de Mike, la meilleure façon de supporter la mission de Mozilla c’est de fournir de nouvelles technologies Web plus rapidement. Mozilla bouge plus et plus vite que les autres. En effet, ça leur permet de (dé)montrer plus de choses car en étant plus rapides ils peuvent en faire plus que les autres et agir de manière plus transparente. Ceci a comme corollaire qu’il faille travailler sur des projets plus petits car plusieurs progressent en parallèle. Ça implique également la sortie de mises à jour plus fréquentes.
The best way we can support the mozilla mission is to deliver new web technology faster. Mozilla is moving faster than any other. — Mike Beltzner
Il nous dit aussi que Mozilla voit ces challenges comme autant d’opportunités :
- la communication et la coordination ;
- la gestion et les outils des branches ;
- la localisation ;
- les mises à jour et la maintenance ;
- les directions suivies ou à suivre pour les produits et fonctionnalités de ceux-ci ;
- la coordination inter-groupes.
En ce qui concerne le futur de Firefox lui-même on sait maintenant que les mises à jour sortiront (comprenez « devraient sortir« ) tous les 6 mois. Par ailleurs, les mises à jour pourront être opérées de manière plus silencieuse. En effet, pour éviter un effet « IE6 récalcitrant » il sera bon de repenser la manière dont les mises à jour seront délivrées à l’utilisateur final. Mike Beltzner songe à un système qui suivrait une logique intéressante. Lorsqu’une mise à jour est disponible, celle-ci serait téléchargée et installée automatiquement sans que l’utilisateur ne doive intervenir. Ensuite, lorsque la mise à jour est installée, Firefox préviendrait l’utilisateur de ce fait et lui proposerait deux options « Voir pourquoi Firefox a été mis à jour » et « Annuler la mise à jour et revenir à la version précédente ».
Il termine avec une question qui reste ouverte : « pourquoi y a-t-il plus de développeurs impliqués en Amérique du Nord qu’en Europe alors qu’en terme d’utilisateurs la tendance est inverse ? »
6. Keynote « Firefox in Europe » : Mike Beltzner
Cette présentation de Mike Beltzner n’en est pas vraiment une. Ça a en fait très vite tourné en une discussion générale de 180 personnes sur de nombreux sujets et pistes. C’était de loin très intéressant.
Notre orateur a commencé en abordant les weekly meetings, ces réunions hebdomadaires interactives de Mozilla auxquelles la communauté peut assister (et participer). Le but était de savoir qui, quand, comment et pourquoi on participe à ces meetings. Il en ressort que les 3/4 des personnes présentes au MozCamp lisent les notes de la réunion du lundi. En revanche peu de personnes sont intéressées dans le fait de pouvoir appeler et participer en direct. Il y a plusieurs raisons qui expliquent cela.
D’une part tout se passe en anglais et il n’est pas forcément aisé de suivre ce genre de discussion par téléphone quand on n’a pas l’anglais comme langue maternelle. D’autre part appeler les Etats-Unis ça a un coup qui n’est pas négligeable. Enfin, certains préfèreraient une interaction en vidéo alors que d’autres trouvent qu’il y a trop d’informations par rapport à ce qui les intéresse vraiment. Chaque point de vue se défend…
A côté de ça, il y a des gens qui considèrent que leurs questions ne sont pas suffisamment importantes pour requérir que tout le Projet passe du temps dessus. C’est pourquoi ils préfèrent les poser sur les mailing lists. Mike encourage cependant tout le mode à poser ses questions mais ça voudrait dire qu’il faudrait parler, or certaines personnes n’aiment pas parler…
Internet by the people for the people
Ensuite on passe au nighty builds, vous savez ces versions de test qui viennent tout juste de sortir sur les FTP et qui ne sont pas destinées à la production. Il y a vraiment beaucoup de monde qui utilise ces nightlies, certains les utilisent même dans leur propre langue. Comme pour tout, il y a des raisons pour lesquelles on veut ou non utiliser les versions de test : elles rendent une majeure partie des extensions inutilisables, c’est dangereux (perte de données, etc.), elles sont difficiles à trouver (Mozilla va devoir faire un effort pour ça), il y a trois sortes de ces builds ce qui mène un peu à la confusion, repasser à une version antérieure relève du domaine de l’inconnu.
Autre sujet important, comme je l’ai mentionné avant, pourquoi Firefox a-t-il plus de succès en Europe qu’en Amérique du Nord ? Il y a plusieurs pistes. Une des premières idées qui est ressortie du débat est le fait que l’Allemagne, un pays qui n’est pas peu peuplé s’il en est, était fort attachée à Netscape qui y avait une bonne part de marché, laquelle a été reprise par Firefox. En revanche on pourrait penser que la localisation pourrait être un problème, surtout pour les langues peut représentées, or les chiffres ne vont pas dans ce sens. Comme dit plus haut, la question reste ouverte.
Ceux qui se sentent impliqués dans le développement participent aux meetings, ils s’informent, font les tests de nightlies, etc. De leur côté et évangélisateurs font la promotion de Firefox, donnent le mot, sont contagieux de leur passion, etc. Et tous font des choses similaires, ensemble et de leur côté.
Mozilla Europe et la communauté qui lui est dédiée font peut-être tout simplement un meilleur travail d’évangélisation… ?
Pour la suite il a fallu faire des choix car il y avait 4 salles dans lesquelles se déroulaient des événements différents. De même que de longues discussions intéressantes avec des membres de la communauté ont fait que je n’ai pu assister à l’ensemble des conférences proposées. C’est aussi un point fort du MozCamp que de pouvoir discuter et comparer l’importance et l’influence de gens impliqués dans leur pays, à travers toute l’Europe.7. Keynotes sur Fennec : Caitlin Looney
Caitlin Looney
C’est à une demoiselle blonde ravissante et des plus sympathiques qu’on a eu affaire pour la keynote sur Fennec. Je le souligne parce que bon, il faut bien l’avouer, la gente féminine n’était pas tellement représentée pendant le MozCamp.
Il s’agit en fait d’une présentation de base de Fennec, pas de discussion technologique avancée ni de détails sur le fonctionnement. Il y a eu une deuxième présentation à propos de Fennec, faisant directement suite à la première, et dont le thème était principalement les extensions.
La présentation débute par l’explication du pourquoi on veut se lancer dans le mobile chez Mozilla. Le but de Fennec est de fournir une véritable expérience du Web sur les téléphones mobiles ainsi que tout autre système n’étant pas à proprement parler un ordinateur.
Pourquoi le faire maintenant ? La première génération de mobiles ayant ouvert l’accès au Web ne l’ont permis que d’une manière absolument basique et non ergonomique. Les smartphones et autres appareils 3G actuels sont maintenant tout à fait prêts pour le Web. D’autant plus que les coûts rencontrés dans le passé pour les connexions data ont sensiblement baissé, à tel point qu’il n’est pas rare de trouver des forfait « all you can eat« , comme l’a dit Caitlin. Par ailleurs le segment des smartphones est en pleine expansion et les vrais navigateurs mobiles commencent enfin à émerger. Ils en sont encore au début de leur évolution.
Fennec reprendra en partie la barre d’adresses de Firefox, la fameuse awesome bar. Comme il est difficile de taper des adresses et faire des recherches sur un mobile, cette barre d’adresses sera vraiment awesome et ça prendra tout son sens.
Le but est également de pouvoir emporter son Firefox partout. Le maître mot étant que ce n’est pas parce qu’on change de téléphone qu’on doit être obligé de recréer tout ce qui nous sert dans notre vie mobile. Il faut voir ici les possibilités de synchronisation, de sauvegarde, etc.
Fennec supportera en plus le HTML5 et tout ce qu’on sait déjà comme les onglets, les marque-pages en un clic, les extensions et bien d’autres choses encore.
The mobile platform is the Web, not the mobile browser.
8. Keynote sur Jetpack
Le développeur qui devait nous parler de Jetpack n’ayant pas pu arriver à temps, nous avons eu deux autres animateurs. Ils nous ont parlé de Jetpack au sens large et simple. C’était une présentation générale, globale de ce qu’est Jetpack et de ce qu’il permet.
On peut en retenir que Fuel va être abandonné car Jetpack permet de faire ce que Fuel faisait et bien plus encore. On savait que Jetpack est une API permet d’écrire des extensions plus facilement, cependant l’accent a été mis sur la sécurisation du navigateur de l’utilisateur. En effet, avec une extension pour Firefox on pourrait théoriquement faire faire n’importe quoi à partir du navigateur client. L’avantage de Jetpack est de fournir un ensemble de possibilités qui ont été autorisées.
B. Dimanche 03/10
Le dimanche a été un peu particulier. Dès le petit déjeuner je me suis retrouvé à parler avec des gens d’un peu partout à propos de notre implication dans la communauté Mozilla.
Encore à moitié dans les vapeurs de la veille, on s’est malgré tout vite retrouvé autour d’un café et avons entamé une discussion qui n’en finissait plus. Alors que certaines roundtables étaient en cours à propos de l’HTML5 ou de l’advocacy, nous échangions nos propres idées et c’était aussi intéressant.
Le reste de la journée s’est malheureusement déroulé très vite car j’ai dû quitter le MozCamp en tout début d’après-midi pour attraper mon vol à l’aéroport de Prague. Qu’à cela ne tienne, je n’étais pas le seul et j’ai encore pu discuter une bonne heure de Mozilla et Firefox avec mon nouveau pote de Pologne, entre le départ du métro à l’arrêt Andel et le check-in à l’aéroport. C’est aussi ça l’esprit Mozilla.
Quoiqu’il en soit ce fut un week-end des plus enrichissants et je suis rentré chez moi avec les batteries rechargées à bloc. Pour une première, c’était une expérience unique et l’ambiance Mozilla et le sentiment d’Ouverture se font clairement ressentir. J’ai rencontré des gens géniaux, qu’ils soient connus ou non, et rien que ça ça vaut de l’or. Après avoir lu tout se qui se passe sur Twitter, je crois que peu de personnes sont restées sans dire (ou penser) merci à Mozilla Europe !
EU Moz Camp 2009 group photo -- by Ludovic Hirlimann