On n’a pas tous les jours l’occasion d’être obnubilé par un morceau. Loveless Love m’occupe depuis 2004, le jour où j’ai découvert les Feelies, groupe formé en 1979 et séminal (pour une fois le terme n’est pas galvaudé) en terme de rock indépendant. J’ai acheté leur premier album “Crazy Rythms” sur internet, en attendant la possibilité d’une réédition de leur discographie. C’est maintenant chose faire, grâce au label Domino, qui continue de nous faire découvrir de grands groupes à la carrière fulgurante, comme Liquid Liquid ou Joseph K. Intrigué, je jetais donc mon dévolu sur le vinyle du second album des Feelies, “The Good Earth” qui a été produit par Peter Buck.
L’influence du guitariste de REM se ressent des les premières notes de On the Roof, où l’on sent que Glenn Mercer et Bill Million ont mis un peu d’eau dans leur vin en freinant leurs ardeurs supersoniques pour partir dans un format plus pop et acoustique (A noter que les deux guitaristes et chanteurs sont les seuls membres de cette formation qui changera plusieurs fois de section rythmique). Entre un élan folk et quelques riffs de guitare électrique, ce premier titre s’annonce plus assagie, moins éreintant à l’écoute, mais immédiatement prompt à une certaine mélancolie. Dans la même veine The High Road avance à toute berzingue au son de quelques accords de guitare acoustique, et rappelle une fois de plus le Velvet Underground, surtout leur troisième album ; en deux titres le verdict est immédiat, le successeur de “Crazy Rythms” est aussi un excellent disque, plus apaisé mais tout aussi grand, et je sais d’avance qu’il ne va pas me lâcher avant un bon moment.
The Last Roundup renoue avec l’électricité de leur premier album, on y retrouve avec ferveur ces guitares « verlainienne » qui conversent au milieu d’une rythmique folle presque sur le point de perdre les pédales. Et puis il y a Let’s Go, un titre qui est bien parti pour me travailler presque autant que Loveless Love. Plus pastoral que ce dernier, Let’s Go se lance a toute berzingue dans un folk-rock champêtre joué sur trois accords, et dont la petite mélodie demeure inoubliable au fur et à mesure des écoutes. J’adore aussi le touchant When Company Comes, qui démarre tranquillement avec un peu de guitare folk, puis quelques notes de clavier, avant que l’ensemble se mette à décoller tout doucement, pour finir sur une rumeur légèrement sombre, comme pour mieux nous rappeler que les névroses de leur première disque sont toujours présentes malgré des compositions plus lumineuses.
La réédition est accompagnée de quelques bonus pas aussi dispensables que d’habitude. Les Feelies sont assez forts dans l’exercice de la reprise, leur version de Paint It Black reste pour moi une grande tuerie sonore. Sur “The Good Earth” on peut y entendre leur interprétation de She Said, She Said des Beatles et Sedan Delivery de Neil Young. De belles références et un chef d’œuvre à écouter bien au chaud à l’approche de l’hiver, un grand disque qui va vite devenir indispensable …
Par Mathieu
Posted in Chroniques musicales