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Feuilleton tragi-comique en Palestine

Publié le 05 octobre 2009 par Gonzo

Feuilleton tragi-comique en Palestine

En dépit d’une production plus pléthorique que jamais (billet sur le sujet), bien peu de feuilletons auront parlé de la Palestine durant ce dernier ramadan. A l’opposé des années passées (avec Al-taghrîba al-filastiniyya par exemple - التغريبة الفلسطينية , grand succès de la saison 2004), les téléspectateurs arabes n’auront pu voir qu’une seule production égyptienne et deux syriennes sur ce thème. La frilosité, économique et politique, des grandes chaînes arabes à capitaux du Golfe explique en partie cette situation comme l’analyse un journaliste d’Al-Akhbar. Mais il y a aussi également le fait que, depuis la disparition de Yasser Arafat, la situation politique des Palestiniens est plus brouillée que jamais, avec en particulier les luttes intestines entre le Fatah et Hamas.

Pourtant, et précisément parce qu’elle évoque sans détours ce conflit, et plus généralement la multitude de problèmes qui se posent dans le pays, une comédie a créé la surprise en remportant un très grand succès d’audience. A en croire Imad Farajine (عماد فراجين), un des trois acteurs vedettes avec Khaled Al-Masri et Manal Awad (photo ci-dessus), 6 millions de téléspectateurs (article dans Jeune Afrique) ont regardé Watan ‘a watar ( وطن ع وتر : mot à mot, « Un pays sur une corde à musique », que l’on peut lire à la fois comme « En harmonie avec le pays » et « Un pays sur la corde raide »)…

Même si le chiffre est probablement assez surestimé, y compris en tenant compte du public en dehors des Territoires occupés, cela reste une réussite sans précédent pour une production 100% palestinienne (à la différence de nombreux autres programmes très souvent produits avec des fonds étrangers). La télévision nationale palestinienne a d’ailleurs décidé de poursuivre la diffusion de cette comédie au-delà du mois de ramadan à raison d’une émission par semaine. A l’évidence, le public a été séduit par le ton de ces chroniques, peu ordinaire sur les ondes palestiniennes et plus largement arabes : audace des dialogues chargés de sous-entendus sexuels à propos des difficultés de logement des jeunes Palestiniens et plus encore chroniques souvent très caustiques d’une scène politique où aucun parti n’est épargné.

Un des épisodes qui a eu le plus de succès proposait ainsi un “reportage” sur le 7e congrès du Fatah – le 6e s’est tenu il y a quelques mois à Bethléem – organisé à Naplouse en 2509 !… En présence des descendants des leaders du parti – “Dahlan-le-14e du nom” et de “Abou-al-‘Alâ-le-16e” entre autres célébrités de la scène actuelle –, on y entend Abou Mazen, sur fond d’images tremblotantes parfaitement en phase avec ce que produit ordinairement la télévision nationale, vanter les mérites de la négociation, toujours la négociation, rien que la négociation, avant de s’affoler parce qu’il ne retrouve pas le laissez-passer que lui ont délivré les Israéliens… D’après Yasser Abed Rabbo, un de ses proches qui a accepté de tenir son propre rôle dans un des épisodes, le Président de l’«Autorité palestinienne » a beaucoup ri en découvrant sa caricature télévisée.

Tant mieux s’il le prend ainsi, et tant mieux pour la télévision palestinienne si elle peut profiter d’une liberté de ton qui redore son blason auprès des téléspectateurs. On attend tout de même de voir si Watan ‘a watar arrivera à faire rire avec le dernier épisode du triste feuilleton politique palestinien, dans lequel l’Autorité palestinienne n’est jamais allée aussi loin dans la propre caricature de ses contradictions, manifestant une impuissance qui pourrait être comique si la question n’était pas aussi tragique.

On en parle (encore ?) peu dans la presse non-arabe, mais le report, pour mars prochain au plus tôt, du vote par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies sur le rapport rédigé par le juge Richard Goldstone à propos de la guerre de Gaza, faute d’un soutien de la part des officiels palestiniens, n’a pas fini de susciter des réactions (deux ministres ont déjà démissionné). Certes, l’Autorité palestinienne affirme qu’il s’agit d’un repli tactique pour arriver à un plus grand consensus ; elle explique aussi qu’elle a subi d’énormes pressions américaines et que la menace d’un vote pèse désormais, telle l’épée de Damoclès, au-dessus de la tête du gouvernement israélien qu’on imagine terrifié par cette éventualité…

Abou Mazen et consorts auront néanmoins beaucoup de mal à faire accepter leur décision par les organisations internationales qui, à l’image de Human Right Watch, se sont battues pour tenter de faire condamner par la « communauté internationale » les crimes de guerre commis à Gaza.

Et c’est peu dire qu’une telle position donne des arguments à tous ceux qui, en Palestine, considèrent qu’ils sont représentés par des marionnettes dignes des Guignols de l’info.

Une trentaine de petites chaînes privées locales saupoudrent, comme des confettis, l’archipel palestinien en Cisjordanie. Parmi les “grandes” chaînes visibles sur internet, on a l’officielle Palestine TV ; la toute récente – assez proche du Hamas – Quds TV, basée à Londres avec un bureau à Beyrouth et, toujours présente malgré les bombardements israéliens, la chaîne du Hamas, Al-Aqsa TV, dont le site diffuse actuellement la vidéo de Gilad Shalit (fort peu reprise par les médias et) remise aux autorités israéliennes contre la libération de 19 Palestiniennes …

En prime, le début de la vidéo du 7e congrès du Fatah (Naplouse, 2509), selon les comédiens de Watan ‘a watar (même sans sous-titres, cela reste drôle) et deux reportages (on peut s’amuser à les comparer) de CNN et de Al-Jazeera arabe sur le feuilleton palestinien).



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