la croissance, à quel prix?

Publié le 17 octobre 2007 par Richard Gonzalez

(Glen Helen Resort, NT, Australie, le 11 août 07)

C’est un rapport d’étape que la commission pour la libération de la croissance française, dite commission Attali, vient de publier. Le document définitif sera remis en fin d’année. Selon les auteurs, il ne devrait pas être très différent de cette première mouture. C’est assez dense, mais aussi relativement facile à comprendre : les experts missionnés reviennent sur plusieurs lois récemment votées, notamment celles qui encadrent la grande distribution. Un des leviers de croissance serait donc le redéploiement libéralisé des hypermarchés, et notamment des hard-discounters. Est-on sûr de vouloir cette croissance-là, à ce prix proposé ? Peut-on se permettre, compte tenu des données sociales et environnementales actuelles, de laisser le champ libre à des acteurs économiques qui ne jouent pas le jeu de la concurrence (le paysage européen des centrales d’achat est oligopolistique et tend à se concentrer encore), imposent l’industrialisation des petits et moyens producteurs et accélèrent, par les flux importants de déplacements qu’ils engendrent et par leur emprise foncière, la dégradation du cadre de vie péri-urbain ? L’imagination est-elle à ce point en panne en France pour qu’on nous oblige à remettre au goût du jour les mauvaises recettes du passé ?

Je suis de ceux qui estiment, et jusqu’à preuve du contraire, que la croissance est nécessaire. Nous avons besoin de créer de la croissance aujourd’hui, pour rendre l’Etat plus efficace et plus juste, pour fluidifier la répartition des richesses (par la création d’emplois durables par exemple) et financer des programmes publics de recherche, spécialement orientés sur nos problématiques sanitaires, énergétiques et écologiques. Quelque chose m’échappe encore : pour payer notre bien-être collectif, on irait « chercher la croissance » (pour reprendre l’expression de N. Sarkozy), mais pas n’importe laquelle, celle qui dilapide un peu plus nos conditions de vie. Je comprends, à l’aune de ces mesures, la position des adeptes d’une « décroissance » : s'appauvrir plutôt que subir la loi du plus fort. Je n’ai pas encore disséqué toutes les propositions d’Attali, il y en a peut-être des plus sexys. Mais celles qui favorisent la grande distribution et le béton à la campagne, ne serait-ce que celles-là, résonnent comme un triste aveu d’impuissance et de fuite en avant.


(La remise en cause du principe de précaution ne semble pas figurer dans le rapport. Mais J. Attali en parle sur son blog.)