Depuis l’imprononçable jour de ma naissance, j’ai voué au monde qui m’entoure une haine irréconciliable. Le club Dorothée, Michel Sardou, le steak haché trop cuit… Les raisons de mépriser les hommes et Dieu ne manquaient pas. En grandissant, le tranchant de ma pensée s’est fait plus acéré et ma répulsion primaire s’est muée en un dégoût plus raisonnable. J’ai coupé le monde à coup de rasoir pour voir au cœur du fruit, le noyau noir. Bref, j’étais pessimistes. Toutefois, en vieillissant, j’ai pris un peu de recul et certaines rencontres intellectuelles ont modifié mon point de vue. Comme le remarquait Michel Serres dans le sens de l’info, les nouvelles que nous livrent les médias sont entièrement consacrées aux mauvaises nouvelles. Notre perception du Monde en est forcément faussée. En écoutant que le bruit des guerres, des massacres, des catastrophes et des trafics, nous oublions tout ce qui fait la beauté de l’existence : la caresse du vent sur la peau, le spectacle d’un coucher de soleil, deux amoureux qui s’embrassent ou un enfant qui s’émerveille dans un cercle de vieilles. Cela peut-il nous faire oublier la bassesse du genre humain ? La jalousie, la haine, l’envie ? Les morts absurdes et le cynisme de notre société ? Non, l’un et l’autre sont les deux faces d’une même réalité. Le monde n’est ni bien ni mal. Il n’a pas de moral, pas plus que l’humanité prise comme un tout. L’epèce se soucis peu de ce qui est moral et du poids d’une vie. C’est seulement individuellement, à l’intérieur de nos limites, que nous pouvons mener notre vie et tenter d’en faire une belle aventure.