"Il n'y avait aucun livre dans la maison de Grialet : c'était
la maison tout entière qui était un livre. L'immeuble, comme je le sus par la suite, avait appartenu à l'éditeur Fussel, qui avait fait construire portes et fenêtres comme si elles avaient été
des couvertures de livres. Les escaliers à colimaçon s'élevaient comme des arabesques ; des pièces imprévues surgissaient de-ci de-là comme des notes de bas de page ; les couloirs s'allongeaient
telles des gloses exagérées. Et sur les murs blancs s'étalaient des écritures, tracées parfois avec soin et d'autres avec l'urgence que donne l'inspiration subite." (p. 150)
Fils de cordonnier à Buenos Aires, Sigmundo Salvatrio n’aspire qu’à devenir l’un des
grands détectives privés rassemblés au sein du Cercle des Douze. Aussi, lorsque l’un d’entre eux, Renato Craig, propose un cours, il s’y précipite dans l’espoir de devenir peut-être son
assistant. C’est chose faite lorsque celui-ci, malade, le délègue pour le représenter à Paris à une réunion du Cercle au complet. Pas vraiment au complet puisque l’un d’entre eux, Darbon, meurt
avant l'ouverture de la fameuse exposition universselle de 1889, en chutant de la Tour de Monsieur Eiffel. Pour les besoins de l'enquête, Sigmundo devient alors l'assistant de Viktor Arzaki,
détective polonais vivant à Paris, le meilleur ami de son maître…
Pablo de Santis ancre avec habileté ce polar dans cette période un peu trouble où le positivisme, le progrès scientifique et technique, angoissent
tous ceux qui aiment à cultiver le mystère et les réunions secrètes. Mettant son érudition au service d’un roman policier jouant tant sur le registre des vieux romans populaires que sur celui aux
frontières d'un fantastique philosophique hérité de Borges, il nous offre ici une lecture des plus passionnantes.
Vous trouverez aussi du même auteur Le
Calligraphe de Voltaire* critiqué dans mes Carnets de SeL.
SANTIS, Pablo de. - Le Cercle des douze / trad. de l’espagnol (Argentine) par René Solis. - Métailié,
2009. - 270 p.. - ISBN 978-2-86424-692-3 : 19 euros.
Policier – exposition universelle – Paris.