C’est la règle huit fois sur dix : on commence dans le flamboyant et on finit dans le pathétique. La vie rabote, le temps lamine. « Dix kilomètres à pied, ça use, ça use… » Je-tu-il fait ce qu’il peut du joli paquetage endossé en prenant la route. On marche, on marche ; on voyait le trajet plus léger ; on arrêterait bien au prochain village. Ce petit ciel gris de nos rêves plumés, nostalgie du mal-fait-mal-dit qui nous poigne soudain sous le platane un soir d’été, un soir d’hiver devant l’écran d’Urgences, d’automne dans le métro du boulot-dodo, de printemps aux bougies d’un anniversaire ; ce quelque chose en nous d’Alain Souchon, pourquoi les gens illustres y couperaient-ils ? Leur fatigue sous les projecteurs prend valeur de paradigme et nous frappe d’autant plus qu’ils se sont crus, qu’on les croyait rois de la vie, enfants chéris de la fortune. S’ils flipflapent comme nous dans la gadoue, ça les rapproche, ça nous rassure, pour un peu on les aimerait !
Marilyn Monroe, usée d’amant en amant pour une vie sans amour ; Michael Jackson, de chirurgie en chirurgie pour un nom sans visage ; Diana, Dewaere, Bérégovoy, tant d’autres en tout genre dont le temps a trahi le désir !
Surgeon transplanté de la Hongrie rouge, fils sans père, sang mêlé, petit gars chichement diplômé dans le sérail, Nicolas Sarkozy se voulait Président pour être, être et faire, être en faisant, faire pour changer les choses, croire qu’on le peut quand on le veut fort. S’il y pensait en se rasant le matin, c’est que tout le reste le rasait jusqu’au soir. L’y voilà. Il est, il fait. Il dit. Les choses sont lourdes, résistent, quand on croyait que les mots vrais les entraîneraient. Les choses ont toujours leur force d’inertie ; les mots, déjà le timbre des refrains. Et donc, lorsque l’élu pour si peu, pour si dur, affirme qu’il ne rêve pas à 2012 en se rasant, croyons-le vaguement quand même…
Carla Bruni se grace-kellyse. Son parfum de fleur grisante s’évente dans la visite d’Etat et l’action sanitaire. On se prend à rêver que son charme pourrait encore surprendre. Elle se poserait en Dior et parachute à la clôture d’un 14 juillet ; irait chanter comme Dietrich et Baker pour nos troupes à Kaboul ; une nouvelle fois séduirait le fils après le père. Colette osa relever ce dernier défi chez les Jouvenel à un âge plus avancé…L’âge, chemin de croix des très jolies femmes.
N’être plus rien, et si ce n’était pas à craindre ? s’il fallait plutôt le souhaiter aux célébrités intelligentes comme l’occasion de revenir à soi, à l’essentiel de soi, à l’incompressible de la personne, tels qu’à nous-mêmes enfin la désillusion nous révèle.
Arion