Prendre le temps

Publié le 03 octobre 2009 par Wilverge


Don Det, 4 mille îles, Laos
Encore une frontière à traverser, encore deux douaniers à croiser!
En mini van, le patron de l'agence de transport qui nous conduit vers le Laos est tout « évaché » à côté de moi, les jambes bien écartées et les pieds sur le banc de Will en avant. On sent tout le professionnalisme de l'affaire mais, cette frontière étant non officielle et au milieu de nulle part, nous n'avons pas vraiment le choix de passer par lui pour nous y rendre, faute de transport public.
À l'arrivée, dans la cabane du douanier cambodgien, deux hommes attendent assis sur des chaises de patio en plastique. À notre arrivée, ils ouvrent devant eux la valise officielle du parfait employé gouvernemental qui renferme : une petite brocheuse, une estampe, un crayon et une efface « Hello Kitty » et rien d'autre.
Je fais de gros efforts pour ne pas sourire, mais c'est raté!
Ils apposent l'étampent de sortie et, en nous remettant nos passeports, nous demandent un dollar US chacun. On leur dit non et on repart simplement. Ils nous laissent aller sans dire un mot… Un gars s'essaye.
Puis nous marchons vers l'entrée du pays voisin, saluant les vaches se baladant seules et sans papier d'un pays à l'autre.

C'est le tour du douanier laotien. Avec un grand sourire, il nous demande nos documents et encore un dollar US chacun. Nous lui servons la même réponse mais lui, n'ayant pas encore estampé nos passeports, se permet de ne rien faire avant d'être payé. Après maintes argumentations, ne voulant pas rebrousser chemin, nous cédons.
Je lui fais une grimace lorsqu'il tourne le dos. Les agents frontaliers ne sont vraiment pas bons pour ma santé!
Nous cherchons notre modèle de professionnalisme pour le retrouver plus loin au restaurant à manger en regardant la télé.
- Asseyez-vous, le prochain bus sera là d'une minute à l'autre. Dit-il la bouche pleine.
Une heure plus tard, nous y sommes toujours, sous le toit de paille à regarder le livreur de glace déposer sa marchandise pendant qu'un autre répare son tracteur.
Finalement, tout finit par s'enchaîner et nous repartons vers la barque qui nous emmène à Don Det, une île au milieu du Mékong.
À midi, j'ai les fesses dans un hamac suspendu à la galerie de notre bungalow de bambou au bord de l'eau, me balançant avec une brise légère bien appréciée. Le bonheur.
Tout est tranquille aux alentours, particulièrement les bœufs dans notre entrée qui se vautrent dans la boue pour échapper aux forts rayons du soleil.

Nous nous promenons aux alentours au travers des rizières qui semblent avoir atteint leur maximum, attendant patiemment d'être récoltées.

Il n'y a pas grand-chose à faire ici mis à part manger, dormir et profiter de la vie. Tout le monde semble relaxe, personne ne nous harcèle pour nous vendre quelque chose. Les enfants se baignent dans le fleuve ou se tirent dans la rue de terre rougeâtre sur une feuille de cocotier en guise de luge.
Le temps passe, nous nous imprégnons de ce mode vie en vivant avec le soleil, notre modeste demeure n'ayant pas l'électricité. Couché tôt au son des criquets, levé tôt par les rayons de soleil traversant les murs.
Nous avons lu que les Français, lorsqu'ils colonisaient l'Indochine, disaient que les Vietnamiens plantaient le riz, les Cambodgiens le regardaient pousser et les Laotiens l'écoutaient. De ce que j'ai vu, je pense que ce n'est pas tout à fait faux!
C'est donc ce que nous faisons; écouter le riz pousser, lire, seulement prendre le temps d'être là. Souvent dans la vie de tous les jours et en tant que voyageur, on ne prend pas nécessairement le temps de seulement être là. On voudrait tout voir et tout faire, ne rien manquer. On n’accepte pas vraiment de ne rien faire, le temps doit être meublé absolument par une activité quelconque par peur peut-être d'être paresseux ou de ne pas prendre de l'avance sur quelque chose au cas où!

Quant à moi, je me balance dans mon hamac aux sons des insectes et regarde le coucher de soleil, pas particulièrement extraordinaire ces derniers jours, mais bon, personne n'est parfait. Peut-être que lui aussi s'accorde des jours de repos.
- Nad qui écoute le riz pousser.