A cette occasion, une conférence sur "la philanthropie à travers la volatilité des marchés financiers" fut donnée par le financier de renom Denis Durand, Associé principal chez Jarislowski Fraser et trés actif sur la scène caritative canadienne. Il est notamment VP du conseil et président du comité de vérification de Care Canada.
J'étais très heureux d'entendre son analyse des problématiques du monde de la philanthropie moderne. Je partage ses commentaires, et certains exemples qu'il relatait étaient du vécu pour moi dans mes expériences de philanthropie d'entreprise.
Voici quelques phrases tirées de sa conférence dont j'ai pris quelques notes:
- Si les analystes économiques soulignent bruyamment la fin de la récession, aucun ne s'avance à parler de reprise économique non plus.
- Dans un contexte ou les entreprises limitent les augmentations de salaires au minimum, il est difficile pour elles d'annoncer des dons philanthropiques. Les professionnels de la levée de fonds doivent en tenir compte.
- La tendance est aux dons de plus petite taille, pour essayer de contenter le plus de monde possible.
- La récession a enseigné aux fondations d'éviter d'engager de trop larges parts de leurs subventions sur des plans quinquenaux, les privant ainsi de toute marge de manœuvre.
- En termes de dons, la rationalisation prévaut aussi; on va chercher à optimiser le pourcentage du don effectivement consacré à la cause. Si au moins 50% ne va pas à la cause, vous n'êtes pas crédibles. L'efficacité des sommes investies sera aussi analysée avec un oeil plus critique
- La visibilité du donateur est importante
- Les tournois de golf pour lever des fonds, mettons que ca commence à manquer sérieusement d'originalité...
- Ne pas solliciter tout le temps les mêmes grands donateurs qui vont se fatiguer et s'épuiser. Ne pas oublier non plus que ces donateurs font partie d'un cercle d'influence. Perdre la personnalité c'est aussi perdre son cercle d'influence.
- La professionnalisation de la philanthropie a du bon, elle permet notamment d'éviter ces écueils.
- Les dossiers de financements doivent être montés en gardant en mémoire que le directeur de campagne est une personne occupée, ne pas la surcharger: son implication n'est pas un emploi à temps plein.
- Cesser de faire jouer la corde sensible, mais démontrer la nécessité de la cause et de l'efficacité de l'organisme pour la mener à bien. Le grand donateur est tellement sollicité que la corde émotionelle ne fonctionne plus à la longue (tiens ca me rappelle mon discours sur le shockvertising...)
- Si vous avez l'idée (tellement originale) de faire un bal caritatif, assurez-vous de sa rentabilité par personne. L'annonce de dons majeurs à cette occasion ne doit pas faire partie du calcul du ROI du bal...
- Enfin ne pas proposer des opérations trop risquées ou impliquant une logistique trop lourde à gérer. Il évoque à ce sujet un drame personnel qu'il a vécu lors d'une ascension du Kilimandjaro pour Care Canada
En bref, il y a dans ce contenu de nombreuses évidences pour les professionnels de la philanthropie, mais ce discours méritait d'être répété, car il n'est pas encore intégré partout, et trop d'OSBL l'ignorent encore.
Ca fait du bien de constater que certains éléments que l'on répète à ses clients continuellement sont endossés, partagés, et diffusés par les membres les plus respectables et les plus influents de la profession. Ca n'est pas nouveau: il faut des prophètes pour évangéliser au marketing de la cause, et je suis heureux d'en avoir écouter un hier.