Dans Le Figaro du 25 septembre 2009, Michel Serres se livre à quelques réflexions qui nous paraissent dignes d’être commentées, avant la publication de son livre « Temps des crises ».
Pour lui, la crise n’est qu’ « une petite ride sur la surface de l’histoire ».
Histoire marquée par le passage, en un siècle, de 70 % à 2% de la population paysanne, par l’arrivée des antibiotiques, par les anti-douleurs, par le fait qu’on n’a plus de boutons cutanés et qu’on peut, par conséquent, se mettre à poil sur les plages.
Ce qui le frappe, c’est que ni les hôpitaux, ni les écoles, ni les structures politiques n’ont changé fondamentalement face à de tels bouleversements.
Ce qui le frappe, c’est qu’un site belge sur les bagarres entre Flamands et Wallons reçoit plus de visites que le nombre de voix d’un ancien premier ministre, c’est qu’un illustre inconnu de la banlieue de Montpellier reçoit, sur son blog de vidéos comiques, 400 millions de visites, plus que le nombre de disques vendus par Michael Jackson toute sa vie.
Ce qui le frappe, c’est qu’on se gausse de la chute du mur de Berlin mais qu’on parle très peu des autres murs qui sont dressés au Mexique ou en Palestine.
Ce qui lui semble fondamental, c’est de penser autrement (ce que font, curieusement pour lui, plus les français que les américains).
Ce qu’il a encore un peu de mal à faire quand il énonce le « fait » que la science a presque disparu, alors qu’un Rupert Sheldrake pense exactement le contraire dans le numéro de l’automne 2009 de Nouvelles Clés, et appelle même à une séparation de l’Etat et de la Science ! (ce qui vous vaudra, amis lecteurs, une chronique spéciale). Il rappelle quand même au passage, et à juste titre, qu’il s’est fait traité de nazi par « les » intellectuels lorsqu’il a sorti le « Contrat naturel » et réhabilité l’environnement, qui est toujours une zone de non droit.
Pour notre compte, la préoccupation principale aujourd’hui est de parvenir à ce qu’un maximum de gens s’accordent sur les priorités à considérer et les interactions entre les phénomènes à prendre en compte. Et notre site est justement consacré à tenter de sortir du brouillard de la société du spectacle.
Comment faire évoluer les structures politiques, éducatives, territoriales, médiatiques et médicales est infiniment plus important que de disserter sur le Bonus des traders (Bonus bien entendu scandaleux, mais simple conséquence de nos valeurs de libre échange et pas plus scandaleux que des dizaines d’autres choses ?
Comment sortir de l’agitation du spectacle de la terreur et de la pitié que relayent encore malheureusement beaucoup trop de nos proches ? Voilà quelque chose d’essentiel.
Comment faire se multiplier des singularités agissant en réseaux pour une intelligence collective plus partagée ?
Trs bon billet.
Par ailleurs , Serres est l'origine (1992) des Arbres de connaissance, initiative et pratique qui rejoint bien les ambitions de ce site.
Un petite ide de ce que sont les Arbres de connaissance sur http://spaceart.canalblog.com en date du 11/08/2010.