Editorial du Monde Libertaire # 1566 du 1er au 7 Octobre 2009
Cette semaine encore une lancinante série de forfaitures et de titatas. La clique au pouvoir, main sur le coeur et yeux au firmament, déclare, non sans toupet, que La Poste ne sera jamais privatisée. La SNCF ne jure plus que par le fret après avoir méticuleusement démantelé son réseau de voies secondaires. La loi Hadopi passe aux forceps. Google pille sans vergogne le catalogue des bouquins du ci-devant La Martinière. qui se rebiffe, le vilain passéiste. Les patrons organisent la grippe A: Les malades seront remplacés par les bien-portants et silence dans les rangs. La guignolade Clearstream bat son plein. Les deux renards s’étripent pour la soupière, les juges cirent les pompes.
Le G8, pardon G20, Everest accouchant d’une drosophile, éternue des recommandations dont toutes les banques se gobergent. Au Honduras les tueurs de la réaction mettent hors jeu le gouvernement légitime. En Europe, 78 millions de pauvres. Le chômage s’envole, les entreprises ferment, les syndicats s’écrasent, tout va bien : la croissance croâsse et la crise est finie. L’inénarrable Luc Ferry (Radio-Paris-France-inter 24/09) éructe sans rire que « mettre sur le même plan l’échec du communisme et l’échec du capitalisme est proprement obscène ». Ce qui est obscène, c’est la « jungle calaisienne ».
Safari ? chasse ? animaux ? Une poignée d’êtres humains, afghans et mineurs pour la plupart, acteurs obligés d’un répugnant soap-opera gouvernementalo-médiatique : 500 cognes, une armada de pelles mécaniques et de bulldozers, plus de 200 « journalistes » convoqués. Tout un chacun a pu ainsi, vautré dans son fauteuil, se rincer l’oeil à voir virer une poignée de pauvres hères de leur misérable bidonville. Devant tant de voyeurisme, c’est difficile de ne pas penser aux jeux du cirque romains et à l’étripage – en toute hémoglobine – des prisonniers et des esclaves ; énivrante odeur de peur, de merde, de sang et d’urine. Difficile, de ne pas évoquer le supplice de Damien, charcuté durant toute une journée, finalement écartelé par quatre chevaux en place de Grèves. Toutes les fenêtres autour étaient loués à prix d’or, nous rapporte Casanova dans ses Mémoires, pour faire bandermouiller les petits marquis et les petites marquises qui se faisaient trousser, tellement émoustillés de l’abominable spectacle.
Difficile aussi de ne pas évoquer les rafles pétainistes des juifs, des communistes ou des tziganes et le silence assourdissant tout autour. Abominable et perverse l’indifférence des « honnêtes gens » devant de telles félonies. Obscène et cynique, qu’un Occident, capable de banaliser ainsi son sadisme et sa lâcheté, se paye encore le luxe de faire la morale. À gerber.