Pharmaciens et droit d'établissement: acte III

Publié le 01 octobre 2009 par Duncan

Après deux arrêts très importants du 19 mai, une troisième affaire concernant la règlementation  spécifique de la profession de pharmacien (en Espagne cette fois) se retrouve devant la Cour de Justice. L'Avocat Poiares Maduro a rendu ses conclusions sur ces affaires (Conclusions de l'AG Poiares Maduro sous CJCE, Perez et Gomez, C-570 et 571/07).

Il considère que la règlementation espagnole qui soumet la création d'une nouvelle pharmacie à autorisation et la priorité est accordée à ceux qui ont exercé dans une partie du territoire de cet État membre est contraire à l'article 43 CE. Il considère également que le fait que l'autorisation de créer une nouvelle pharmacie soit subordonnée à une condition démographique visant à promouvoir l'implantation de pharmacies dans des zones moins peuplées est contraire à l'article 43 CE si cet objectif n'est pas poursuivi d'une manière cohérente et systématique, notamment si cette législation n'avantage pas clairement ceux qui ouvrent des pharmacies dans des zones mal desservies par rapport à ceux qui se contentent d'attendre une opportunité dans une zone lucrative et si elle confère un droit de propriété sur l'autorisation pharmaceutique, ce qui porte atteinte à l'efficacité des mesures incitatives. Enfin, s'agissant de la condition imposant une distance minimale entre les pharmacies, il appartient à la juridiction nationale de déterminer si la distance précise imposée est justifiée, en tenant compte de l'importance de l'atteinte au droit d'établissement, de la nature de l'intérêt public invoqué et de la mesure dans laquelle, eu égard au nombre et à la répartition des pharmacies dans la région et à la répartition et à la densité de la population, la couverture universelle pourrait être réalisée par des moyens moins contraignants

Reste à voir si la Cour suivra cet avis. A cet égard, les précédents précités de la Cour dans ce domaine, qui apparaissent comme des camouflets pour la Commission européenne puisqu'ils avaient rejeté l'atteinte à l'article 43 CE, incitent à la prudence. De même, dans un autre domaine, le recent arrêt Ligua Portuguesa de la Cour, sur les paris en ligne, remet en cause la volonté de la Cour d'imposer l'application des règles du Traité. Cet arrêt  traduit, selon moi, le refus de la Cour de tenir systématiquement le "mauvais rôle", c'est-à-dire de l'institution qui impose, par son interprétation des règles du Traité, une libéralisation sur laquelle les Etats membres ne parviennent pas à se mettre d'accord législativement.

Source photo: wikipedia (Apothecary)