A las cinco de la manana…
Déficit de pensée
C’est la mode de la Dette. Cette année, la Dette se porte longue, en dessous des genoux, pour cacher le sujet (de la crise). Si possible noire. Oui, la Dette est le sujet non-sexy du moment qui fait trembler les rédactions et la blogosphère. Malakine a pondu un billet qui montre que le débat naît de la crise financière, le niveau d’endettement étant diversement analysé suivant les écoles de pensée (je ne partage pas certaines de ses observations). Jourion montre que le débat fait rage entre ces mêmes écoles, la crise ayant ressuscité Keynes, et que la dette n’est qu’un des aspects du problème.
Bon certains se mélangent un peu les pinceaux, comme ce gentil quidam qui titre sur la Dette et fait un billet sur les 140 milliards de déficit (50% du budget de l’Etat).
Rappelons que le déficit est une seule des composantes importantes de la dette : les taux d’intérêt sur les marchés de refinancement jouent aussi. Rappelons aussi que ledit billet présente les chiffres d’une autre étude qui me semblent sujets à caution. Primo, les réductions de personnel dans la fonction publique vont représenter une économie importante pour un Etat qui dépense 140 milliards pour son personnel. Cela peut être 500 millions une année et trois fois plus l’année d’après.
Deuxio, la répartition du déficit citée dans le dit billet, par grandes charges de l’Etat est une vue de l’esprit : il s’agit de la répartition des dépenses plaquée sur le déficit.
La magie du chiffre
Le débat en réalité est un peu tronqué justement parce que l’on se focalise sur le seul chiffre du déficit. Un budget en déséquilibre n’est pas forcément un budget mal géré. Allez voir la situation personnelle d’un chômeur qui lance sa boîte pour sortir du trou. Il est endetté jusqu’au cou, et pourtant. De plus, le rapporter au seul budget de l’Etat passe sous silence que ce dernier peut être plus ou moins bien doté par rapport au reste de la richesse nationale. Aussi, expliquer qu’il y a un chiffre « raisonnable » d’endettement est farfelu.
je ne parle même pas de soutenabilité. En matière d’environnement, cela fait trente ans qu’on nous explique aussi qu’on va dans le mur. Reste que Copenhague en décembre 2009 est bien parti pour être un échec. De quoi mourrons-nous les premiers : la montée des eaux ou la baisse des liquidités ?
Connaissez vous le montant de l’encours d’Assurance vie des Français ? Plus de 1 000 millards. A rapporter à notre Dette, 1 428 milliards d’euros. Sommes-nous réellement à plaindre ! Un article intéressant du Figaro rappelait que « le niveau de liquidités des ménages français peut permettre de refinancer l’Etat. La France n’est donc pas dépendante des investisseurs étrangers, ce qui lui permet de soutenir un niveau d’endettement élevé. » L’article est même très optimiste puisqu‘il finit par prédire qu’en cas d’effondrement anglo-saxon, nos obligations à nous connaîtront une envolée !
Endettons-nous, Folleville !
Enfin, si personnellement je ne me fais pas de cheveux blancs, c’est parce que je reste convaincu qu’un Etat peut, in fine, se passer de payer ses traites. Ce n’est pas bien, mais c’est comme ça. Souvenez vous comment les Rois de France géraient leur découvert chronique ? Ils s’endettaient sans cesse, ne remboursaient qu’à moitié, et au besoin se servaient sur la bête.
Si Maddoff ne s’était pas ruiné tout seul, il aurait fait un parfait Jacques de Molay.
La situation internationale a-t-elle vraiment changé ? Bien sûr que non. La Russie n’a jamais payé l’emprunt russe, mais qui s’en soucie aujourd’hui ? La France est encore « too big to fail » : les marchés financiers savent très bien que nous laisser tomber risquerait d’avoir des conséquences en chaîne. L’inconséquence budgétaire étant fille de l’insouciance financière, laissons ces deux soeurs jumelles chanter sous la pluie !
Pour ironiser sur l’article de mon collègue Laurent, le monde financier paiera donc bien la taxe Tobin. Mais ce sera en une seule fois !