BMW et la joie

Publié le 30 septembre 2009 par François Némo @ifbranding

Intéressant cette volonté de BMW d’associer dans sa nouvelle communication les deux notions distinctes de joie et de plaisir. Le plaisir n’est-il pas lié aux sens et la joie aux émotions ? J’adore cette ambivalence et les contorsions de la marque pour corriger le tir. Car n’est-ce pas une tentative de correction du tir (au risque du grand écart) à laquelle on assiste à travers cette nouvelle communication.


« La joie, seule vraie victoire sur le monde, est pure dans son essence, elle est donc irréductible au plaisir, toujours suspect, et en lui-même et dans ses manifestations »
Cioran, De l’inconvénient d’être.

Badaboum, la crise !
Les traders, les frimeurs, les hédonistes, les jouisseurs n’ont plus la cote et perdent leur pouvoir d’achat (pour combien de temps). Les valeurs autour de la jouissance s’effondrent. Tout ce qui tourne autour de l’autosatisfaction et du plaisir perd son pouvoir de fascination. (Voir mes notes du 25 mai et du 14 juillet, « ces Audi qui me font peur »). Exprimer son individualité, ses pulsions, renouer avec le primaire, le grégaire semble décalé au regard des nouveaux enjeux qui nous préoccupent. En bref tout ce qui constituait le langage récent des voitures, leur design agressif et leur communication glaçante se casse la figure.
Il faut revoir sa copie. BMW l’a bien compris. Mais que faire sachant qu’il faut 5 ans pour concevoir une nouvelle voiture ? Comment coller à ce violent retournement de tendance ? BMW change de cible et de communication en gardant le même produit. Un subtil glissement sémantique du plaisir à la joie. « BMW vous invite à partager votre idée de la joie », nous dit-on. Et Guillaume de Paris nous explique sur le site de la marque que, pour lui, la joie, « c’est d’emmener ma petite fille à l’école ». Les loups de la finance ont laissé place aux enfants et aux familles souriantes. On change de monde.


Un double langage ?
Oui, un peu. Mais malgré que la joie et le plaisir ne jouent pas du tout dans la même cour, BMW s’en tire plutôt bien. Si on occulte le récent positionnement qui n’avait rien de sympathique, le design des voitures qui n’a toujours rien de joyeux (En matière de joie, on aura toujours du mal à oublier la Twingo). Si on oublie la promesse de la marque, la joie marche plutôt bien sur les écrans de télé et les pages de magazine. Reste à savoir ce que l’on ressent lorsque l’on prend possession du véhicule. Joie ou plaisir ? Envie de conquérir le monde où de conduire ses enfants à l’école ? C’est une autre histoire que je ne connais pas… En tout état de cause, j’imagine (sans avoir les chiffres) que si la marque a bouleversé sa communication, c’est que la récente tendance à l’agressivité commençait à ralentir les ventes. Un revirement assez spectaculaire qui, même s’il pose quelques problèmes de cohérence, nous incite donc à l’optimisme. Un besoin de renouer avec des valeurs moins troubles, plus familiales, plus collectives qui anticiperaient (pourquoi pas) une sortie de crise. A suivre…