L’Armée du crime est un projet ambitieux : relater la tragique épopée de 22 résistants étrangers sous l’occupation allemande, depuis la formation de leur groupe mené par Missak Manouchian jusqu’à leur arrestation et leur exécution. Qui dit projet ambitieux, dit nombreux écueils à éviter : sensationnaliste, larmoyant ou trop éloigné de la réalité sont souvent ce que l’on reproche à une fresque historique sur la résistance. Robert Guédiguian a voulu à tout prix nous épargner ces défauts, et il y est assez bien parvenu. Mais à vouloir trop fuir les clichés, il nous a livré un film fade et peu enthousiasmant.
Parce que jamais je ne cèderai devant la barbarie
La première demie heure du film est plutôt difficile à encaisser : on comprend qu’on ne pourra pas compter sur la mise en scène de Guédiguian pour nous subjuguer. Tout repose alors sur l’histoire, qui met un temps interminable à se mettre en place : les futurs membres de l’équipe Manouchian nous sont présentés un par un, de toutes origines et de tous milieux, avec pour seul point commun leur inflexibilité face à l’occupant, à la limite de la caricature.
Puis, progressivement, on rentre dans cette histoire, on se prend au jeu que nous propose Guédiguian : chaque action menée par le groupe, entre sérieux et amateurisme, nous rapproche un peu plus de chacun de ses membres. Des scènes de retrouvailles et de communion collective ponctuent agréablement le tout, mêlant habilement pudeur et émotion. Après un début globalement hésitant le casting se révèle : Simon Abkarian et Virginie Ledoyen – mais qu’est-ce qu’elle est belle ! – sont remarquables et les jeunes du groupes impeccables. fait plutôt rare pour des seconds rôles français – cf le dernier Tarantino. Jean-Pierre Darroussin est comme d’habitude parfait dans son rôle de flic besogneux.
Malgré cela jamais le film ne convainc totalement, la faute à une mise en scène sans caractère qui veut trop s’effacer devant l’histoire, ou l’Histoire, on ne sait même pas. En témoignent ces cinq lignes signées de Robert Guédiguian lors du générique de fin, qui sonnent comme une excuse et qui disent à peu près : « J’ai du m’éloigner de la vérité historique pour faire naître la légende, j’espère que vous comprendrez » – la coquille dans la phrase est authentique.
L’Armée du crime est à rapprocher des Femmes de l’Ombre, de Jean Paul Salomé : un film français de plus sur la résistance, qui ne restera pas dans les annales.
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