Dans une tribune publiée par Le Monde lundi 28 septembre, le ministre du budget explique la position du gouvernement en matière de financement et de remboursement de l’assurance-maladie. Il entendait répondre aux soit-disantes "contre-vérités" véhiculées par les opposants aux récents déremboursements annoncés, comme la hausse du forfait hospitalier.
La tribune d’Eric Woerth
« L’assurance-maladie doit concentrer son intervention sur les dépenses les plus indispensables et les plus efficaces ». La formule est belle. Qui voudrait exiger de la solidarité nationale qu’elle épuise ses ressources pour des soins futiles et inefficaces ? Le ministre évite de questionner cette solidarité nationale. Car là est le problème. L’assurance-maladie est marginalement couverte par les des prélèvements sur les revenus du capital. Nous y reviendrons.
Premier constat du ministre : la France figure dans les premières places mondiales en matière de qualité et de dépenses de soin par habitant : 9% du PIB y sont consacrés. Chaque Français reçoit en moyenne 1 920 euros par de la Sécurité Sociale. Quelques 4,2 millions de personnes sont couvertes par une couverture complémentaire gratuite ; Le système des « affections longue durée » assure la gratuité des soins à 9,7 millions de personnes. Second constat, les déficits menace le système. Il attribue à la crise la chute des recettes qui grève lourdement le budget de la Sécu en 2009 et 2010, après 3 années de redressement (4 milliards de déficit en moyenne).
Les recommandations du ministre sont simples et connues : il faudrait « accepter de moins rembourser les médicaments dont la communauté médicale a reconnu qu’ils rendaient un service médical faible ». Eric Woerth recommande ainsi à la Sécurité Sociale de se concentrer sur les soins procurant le service aux patients "le plus élevé".
Qui définit l’importance du service rendu ? Par exemple, anti-douleur qui soulage une souffrance chronique est-il « dispensable » ? Que dire des quelques 94 millions de vaccins produits à la hâte pour une épidémie grippale certes virulante mais somme toute bénine (0,5 décès pour 1000 malades, contre 3 à 4 pour 1000 pour les grippes saisonières) ?
Eric Woerth défend ensuite l’idée de réserver le bénéfice de la Sécurité Sociale aux « médicaments les plus coûteux » (qui des frais dentaires et d’optique, dont la prise en charge est historiquement ridicule ?), à la « motivation des équipes hospitalières », à la rénovation des bâtiments hospitaliers, et à l’accès aux "meilleurs équipements".
Au final, le ministre conclut que la hausse du forfait hospitalier est légitime. Cette fraction du coût de l’hébergement en hôpital restant à la charge des patients ne concerne que le coût de la chambre et des repas, et non pas les soins.
Les oublis du ministre
Sont soumis à prélèvements, pour financer l’assurance maladie, la quasi-totalité des revenus perçus par les ménage, à savoir leurs revenus d’activité salariée, les pensions de retraite, d'invalidité et et les allocations de préretraite, mais aussi les revenus du patrimoine (revenus et plus-values tirés du capital immobilier et financier tels les revenus fonciers, rentes viagères à titre onéreux, revenus de capitaux mobiliers, plus-values immobilières, plus-values sur valeurs mobilières, gains provenant des options de souscription ou d'achat d'actions, etc) et, enfin, les revenus de placements (revenus et plus-values tirés du capital immobilier et financier). L’Etat compense par ailleurs les exonérations diverses qu’il attribue. Aini, le gouvernement a dû rembourser à la Sécu quelques 3 milliards d’euros d’exonération de cotisation sur les heures supplémentaires en application de la loi TEPA d’août 2007.
Comme le rappelait la Cour des Comptes encore récemment, le régime général de la Sécurité Sociale repose sur 17 millions de cotisants. En 2008, les produits de l’assurance maladie se sont ainsi élevés à 140 milliards d’euros, dont 48% émanant des cotisations sociales (68 milliards), 37% de la CSG (soit 52 milliards), et 11% de l’ITAF (impôts et taxes affectés). En d'autres termes, plus de la moitié du financement provient des seuls revenus salariés !
C'est le premier vrai constat à faire: les revenus du capital contribuent très peu au financement de la Sécurité Sociale. L’exemple le plus flagrant, et le plus scandaleux, est le traitement réservé aux stock options : les plus-values dégagées sur l’exercice des options puis la revente des actions « optionnées » ne sont soumises qu’à la CSG (pour ce qui concerne la Sécurité Sociale). Elles sont considérées comme des revenus de placement, alors même qu’elles sont clairement une rémunération d’une activité salariée. Au total, les les revenus des activités professionnelles demeurent soumis à des prélèvements sociaux environ 3 à 4 fois plus lourds que les revenus du capital.
Second constat (lié au premier), les entreprises contribuent de moins en moins au financement des frais de santé (complémentaires incluses), aux détriments des ménages : ces derniers représentaient 55% des financements en 2006, contre 43% quinze ans plus tôt. A l’inverse, la part des entreprises a baissé de 45% à 37% sur la même période.
Et si l’assurance maladie souffraient d’un financement inéquitable ?