Polanski : 30 ans après, on oublie tout ?

Publié le 28 septembre 2009 par Jclauded
Le fameux cinéaste Roman Polanski vient de se faire piéger en Suisse, où la police a mis en force un mandat d’arrêt international délivré par la justice américaine contre lui, il y a 30 ans.
La justification du mandat découle d’un procès contre Polanski en 1977, à Los Angeles, où il était accusé d’avoir drogué et violé une petite fille de 13 ans.
Incarcéré puis libéré sous caution après 47 jours, le procès traîna pendant près d’un an lorsque Polanski décida d’acheter un billet « aller simple » vers Paris pour se sauver des USA et du procès. Il donna comme raison, pour avoir échappé au tribunal californien, le fait que le juge cherchait de la publicité personnelle et faisait durer le procès inutilement. De plus, selon lui, le magistrat n’était supposément pas en accord avec une prétendue entente entre son avocat et le procureur américain à l’effet qu’il acceptait de plaider coupable pour détournement de mineure à la condition que les charges pour viol soient abandonnées.
Depuis, il n’est jamais revenu aux USA, même pas pour accepter l’Oscar du meilleur réalisateur pour son film le Pianiste. Français d’origine polonaise, il était protégé en France par son statut, mais lorsqu’il se déplaçait en Europe et dans le monde et découvrait qu’il y avait une possibilité qu’il soit arrêté et extradé, il annulait le voyage, souvent à la dernière minute. J’ai souvent été surpris qu’il ne soit pas arrêté lors de ses déplacements qui étaient largement rapportés dans les mass media.
Aujourd’hui, trois ministres dont deux du gouvernement français, Frédéric Mitterrand de la culture et Bernard Kouchner des affaires extérieures et Radoslaw Sikorski, chef de la diplomatie polonaise, se montrent scandalisés par cette arrestation et réclament la libération de celui qui est, pour eux, « l’un des cinéastes les plus extraordinaires de notre époque ». Kouchner affirme en avoir parlé à son président qui, dit il, « est au même diapason d’émotion que moi ». Il est question que Kouchner parle à la secrétaire d’état américaine Hillary Clinton pour qu’elle obtienne sa libération et que possiblement le président Obama le gracie. Personnellement, je serais surpris que le président français, le président américain et la secrétaire Clinton s’occupent de ce dossier.
Cette attitude des ministres me révolte tout comme celle des membres de la communauté cinématographique française qui monte dans les rideaux, depuis l’arrestation. Si cette petite fille de 13 ans avait été la leur, est-ce qu’après 31 ans, un ou l’autre aurait tout oublié ? Si Polanski n’était pas un personnage VIP, est-ce qu’ils monteraient sur les tréteaux pour demander sa libération ? La justice, qu’elle soit française, polonaise ou américaine n’a-t-elle pas l’obligation de rattraper un fuyard et de continuer les poursuites pour les gestes infâmes dont il est accusé ? Il ne faut pas déplacer le problème.
Si Polanski a fui si longtemps, n’est-ce pas le signe qu’il se savait coupable ? Avec ses millions et sûr de son innocence, Roman Polanski pouvait retenir les services des meilleurs avocats et plaider sa cause en cour, jusqu’à la fin. Non, cet homme important a fui en accusant le juge de perversion, par personnes interposées. Cela ne me semble qu’un faux-fuyant indéfendable.
Je suis triste de ce qui arrive à Polanski car je suis un de ses fans depuis son film Chinatown. J’ai déploré la mort de son épouse Sharon Tate, tuée par le groupe du fou Manson. Depuis, il nous a donné de bons moments avec des films inoubliables. Mais cela ne doit pas influencer notre jugement personnel surtout lorsqu’une telle question de justice est en jeu.
Par ailleurs, les journaux rapportent que la victime de 13 ans, qui aujourd’hui a 43 ans, est prête maintenant à pardonner à Polanski pour ce qu’il lui a fait subir ce jour-là, en 1977. Est-ce que cela veut dire que le procès doit être annulé et que l’accusation ne tient plus ? Je ne crois pas et je ne sais pas si ce nouvel aspect peut aider Polanski en cour, s’il s’y rend, mais il me semble que c’est là, seulement, que cette tragique histoire peut prendre fin.
Claude Dupras