Chambre 1408 - Some rooms are locked for a reason...

Publié le 24 juillet 2009 par Ashtraygirl

J'aime me faire des noeuds au cerveau. C'est sans doute l'une des raisons pour laquelle j'affectionne tant le cinéma et, plus particulièrement, le thriller mâtiné de fantastique. Pourtant, les films d'épouvantes, aussi interressants soient-ils - je suppose - n'ont jamais eu ma prédilection. Même s'ils recelent une intrigue capilotractée.
1408 me faisait envie cependant. D'abord, parce que les huis clos, c'est bien sympathique, de temps en temps. Ensuite, parce que j'adore John Cusack, et que la perspective de le voir se dépatouiller plus d'une heure durant seul devant la caméra a attisé mon intérêt.
Et puis, sur le papier, l'hôtel Dolphin semble être un point de chute plutôt agréable... si l'on excepte la chambre 1408.
S.O.S. Fantômes
Je ne suis pas une habituée du "style" Stephen King. De lui, je n'ai lu (et relu) et vu que La Ligne Verte, roman (et film) bouleversant s'il en est, mais nullement horrifique. J'ai une vieille copie de Shining qui traîne sur un coin d'étagère, et je garde un souvenir ému, et confus, du visionnage de son adaptation avec Jack Nicholson, qui m'avait découragée de lire le bouquin, justement. J'ai sans doute vu plusieurs adaptations de Stephen King, sans savoir ce que je regardais. Bref, je me place en totale néophyte, et du genre, et du bonhomme. C'est sans doute pourquoi je n'ai absolument pas saisi la portée de 1408. A supposer qu'il y ai un sens à tout ça.
Michael Enslin est un pseudo-auteur de guides touristiques de l'horreur, passant son temps à traquer des fantômes auxquels il ne croit pas aux quatre coins du pays, dans une fuite en avant pour oublier ce qui, par la passé, lui a fait mal. Séparé de sa femme depuis la mort de leur fille, un an auparavant, il avance sans but, sans goût, désabusé, récalcitrant à la vie. Même son job, envers lequel il est de plus en plus aigri, ne lui procure plus aucune satisfaction. Bref, Michael Enslin est un type à la dérive. Pourtant, lorsqu'il reçoit une carte postale de New York l'invitant à ne surtout pas mettre les pieds dans la chambre 1408 de l'hôtel Dolphin, sa curiosité est piquée au vif, et il se rend immédiatement sur les lieux, tant par bravade que par vague intérêt pour les phénomènes étranges qui semblent s'y être déroulés: suicides, morts suspectes, folie... Des dires même de Mr Olin, le directeur du Dolphin, nul n'a tenu plus d'une heure dans cette antre inquiétante. Faisant fi des mises en garde de Olin, Enslin fonce, tête baissé, dans la gueule du loup.
N'étant pas coutumière du genre, mais en ayant perçu suffisamment d'échos, je pense ne pas me tromper en disant que les ingrédients habituels conduisant à une histoire d'épouvante sont bien présents pour celle-ci: un hôtel tout droit sorti des 30 glorieuses, de longs couloirs étouffants, courant à des étages qui n'existent pas, une chambre précédée par sa réputation sulfureuse, un directeur d'hôtel inquiétant, des apparitions fantômatiques, des changements de dimensions, des réveils qui se déclenchent tout seuls, une main invisible qui joue les troubles-fête... Bref, de quoi installer la suspicion et, accéssoirement, de quoi devenir dingo. A plusieurs reprises, je me suis prise à repenser à la maison hantée de Disneyland ou, en plus récent, à la Tour de la Terreur. Même décor, mêmes ressorts, même mythologie. En clair, si la chambre 1408 était une attraction, elle ferait fureur. En-dehors de ça, peu, voir pas de frisson. En fait, à part la sensation très vite insistante de claustrophobie qui s'installe tandis que Enslin commence à comprendre qu'il est pris au piège entre quatre murs, c'est d'avantage un sentiment de sadisme qui s'impose. Cette piaule est vicieuse, retorse. Quelle que soit l'entité qui possède ces lieux, elle se plaît à torturer ses occupants avec les bribes d'un passé qui leur est douloureux, pour mieux les pousser à la folie, et au suicide. Une chambre qui appuie là où ça fait déjà très mal. Vacharde, va!
En-dehors de ça, rien de très palpitant. Pas de cadavres dans les placards, pas de torrents de sang déversés à travers un trou de serrure, pas de visions cauchemardesques (ou si peu) et... quasiment pas de fantômes. Ce qui, vous en conviendrez, est assez frustrant, surtout lorsqu'on nous annonce dés le départ que plus d'une cinquantaine de personnes sont mortes sur le couvre-lit ou dans la baignoire. Quid des pauvres hères censés hanter sans fin les lieux? Bref, ça manque sérieusement de squelettes cette histoire...
One "John Cusack" show

Malgré mon manque d'enthousiasme pour l'ensemble, je demande néanmoins une standing ovation pour Mister Cusack (encore qu'il n'y ait pas grand monde à applaudir, autrement), qui se démène comme un beau diable dans cette impasse de "l'horreur". Tour à tour amer, désabusé, revenchard, brisé, aux abois, usé, déterminé, il parvient à incarner les différents degré menant un homme à la folie, ou au salut. On le sait, il n'est pas vraiment homme d'action. Cependant, les quelques séquences nécéssitant un peu d'adrénaline passent comme une lettre à la poste, réhaussées par son côté toujours un brin décalé et nonchalant. Ceci étant, c'est bel et bien dans les séquences dramatiques pures jalonnant le récit qu'il excelle. Véritablement bouleversant dans ses face-à-face avec sa femme et sa fille disparue, le bonhomme, hanté par d'invisibles regrets, réussi à faire passer toute la détresse de son personnage, apportant la justification à ce qu'il est aujourd'hui: un homme vidé, qui ne croit plus en rien. On en ressent toutes les asperités à mesure que l'épreuve de la chambre casse le moule dans lequel il s'est muré, déconstruisant une part de ce qu'il est. Malgré tout, même en faisant des merveilles, John Cusack ne peut pas tout sauver: à l'instar de la chambre 1408, dont on perçoit très vite les limites, son personnage ne trouve bientôt plus de latitude pour s'épanouir, se développer... et fini par tourner en rond, tant sur lui-même qu'entre ces murs. Un effet de style recherché ou de réelles lacunes dans le scenario?
What the f***?
Le problème avec 1408 c'est que, même si l'on a droit à ce qui semble être un bon film du genre, reprenant les ficelles du cauchemar éveillé dans la plus pure tradition, le pourquoi du comment manque cruellement à l'appel. Je me suis sentie frustrée, même après un aperçu de la fin alternative. Comme je le disais plus haut, j'aime me triturer les méninges, à condition d'avoir des pistes de réflexion. Mais là, rien. A nous de deviner, d'élaborer complètement la raison d'être de cette fouttue chambre, la raison pour laquelle Enslin arrive ici et qui a bien pu lui envoyer une carte, la raison pour laquelle tant de gens sont morts en ces lieux, leurs points communs, le modus operandi, etc... Tout, absolument tout reste sans réponse. Et c'est agaçant. Doit-on voir cette chambre comme une sorte de purgatoire? Pourquoi est-elle là, dans cet hôtel, et comment est-elle apparue? Quel est son but? Pourquoi pousser ses occupants au suicide? Et encore une fois, dans quel but? A-t-elle des vertus rédemptrices, ou incarne-t-elle le mal absolu (dans ce cas, il faut revoir le decorum, pas assez flippant)? Agit-elle comme un révélateur, telle une chambre noire, de nos peurs, de nos regrets, de nos doutes? Est-ce un rite initiatique, et qu'y a-t-il au bout du compte? Enslin sombre-t-il dans la folie en mettant les pieds dans la 1408? Est-ce juste un effet de son imagination? C'est frustrant au possible, vraiment. Et la fin n'apporte que des questions, en sus de celles non élucidées au préalable. Pour un film si court, ça fait beaucoup trop de questions. Et, pour le coup, on a réellement envie de se pendre. Peut-être est-ce encore une figure de style?
Check out
A part le parti pris du huis clos, assumé de bout en bout, rien n'a vraiment de sens dans cette descente aux enfers pas assez convaincante. Pas mauvais, mais pas transcendant. Problème de rythme, de fadeur, de justification... Si Hafstrom maîtrise son espace visuel, qu'en est-il de l'histoire exactement? On a la nette impression d'aller droit dans le mur... Ou veut-on en venir, au bout du compte?
M. Olin nous aura mis en garde: "je vous avais pourtant déconseillé la 1408".



  EN BREF:

*Indice de satisfaction:
*1h44 - Américain - by Mikaël Hafstrom - 2008
*Cast: John Cusack, Samuel L. Jackson, Mary McCormack, Tony Shaloub...
*Genre: Room service
*Les + : L'interprétation convaincante de John Cusack, la déconstruction successive du décor, quelques beaux moments d'émotions.
*Les  -  : Questions, questions, questions, questions, questions... Et les réponses alors? Et les fantômes, où qu'ils sont d'abord? Et puis Samuel L. Jackson, il sert à quoi?
*Liens:
Fiche film Allocine
*Crédit photos: © TFM Distribution