G.I. Joe: America's Elite
On se souvient tous de ce moment terrifiant de notre enfance où l'on a découvert, accidentellement ou pas, que le Père Noël n'existe pas. Pas vraiment, en tous cas. On se souvient du choc, de la
déception, du ressentiment, puis
de la résignation qui nous a envahit alors. C'est à peu de chose près le scénario que j'ai revécu lors de la projection du dernier - et très attendu - Stephen
Sommers. La sensation qu'un nouveau symbole venait de chuter de son piédestal. Et ça, ce n'est jamais agréable, vous en conviendrez...
"This is General Hawk"
Non pas que je ne sentais pas le coup venir. Lorsque j'ai su que Sommers, pour son grand retour, s'attaquait à G.I.
Joe, un frisson d'horreur m'a parcourue des pieds à la tête. Pourquoi diable allait-il se fourvoyer là-dedans? Lui que j'avais catalogué avec beaucoup d'admiration dans la catégorie
des entertainers de génie (je suis une fan absolue des Momies 1 & 2 et de Van Helsing), lui que j'ai toujours considéré comme un maestro du cinéma d'aventure quite old school teinté de
fantastique (bref, tout ce que je chéris le plus au cinéma), bref, lui que j'avais placé dans mon top 10 des réal' incontournables vient de se voir salement rétrogradé. Pourquoi? La faute aux
G.I. justement.
Okay, je vais la faire courte: moi fille. Moi pacifiste. Moi pas faire apologie de l'armée, de quelque nation que ce soit. Moi pas connaître G.I. Joe et tout son "mythe" (encore que, ça me
semble un bien grand mot). Moi totale néophyte. Moi, totalement larguée. En fait, je me souviens bien des coupures pub vantant les mérites de ces jouets guerriers commercialisés par Hasbro entre
deux dessins animés du Club Dorothée. Mais en dehors de ça, quedalle (mon frère a eu des Action Man à la place, donc...). Malgré tout, le concept ne semble pas sorcier: G.I. Joe fait l'apologie
de l'armée américaine, façon Marines, assorti de ce patriotisme un peu flippant, le côté franchement kamikaze en plus. C'est du moins la façon dont je l'ai perçu jusqu'ici, et le film n'a pas
démentit.
La première constatation face à G.I. Joe, c'est que le scénario suit les grandes lignes du concept de base: à savoir pas grand chose. Réduit à peau de
chagrin, "l'intrigue", malhabilement imbriquée entre deux séquences pétaradantes, s'eclipse sans chercher à lutter devant la profusion d'action qui dégueule littéralement des trois quarts des
plans. De toutes parts, ça pue la caricature, du Q.G. de la branche secrète de l'armée américaine à la galerie de personnages improbables. Et c'est un sans faute! On a droit, comme il se doit, à
l'anti-héros quand même héros, au mentor bourru, au récalcitrant méprisant, à la nana qui se la joue girl-power, au rigolo de service, à l'intello qui se bat avec un GPS, au duo d'asiatiques se
la jouant Kill Bill (des ninja-joe, donc), à la vilaine vénéneuse, au savant fou et au visionnaire
despotique. Quinte flush royale! D'autant que, comme tout ce beau monde est étiqueté dés le départ sans la moindre subtilité, nul besoin de les étoffer d'avantage (et le casting n'y aide pas,
Marlon Wayans étant le seul à tirer son épingle du jeu). On sait à quoi s'en tenir, après tout. Il est vrai Stephen
Sommers fait rarement dans la subtilité quand il s'agit de ses personnages, mais là, ça dépasse le simple laisser-aller...
En revanche, le monsieur est fidèle. Fidèle à une part de sa personnalité - le grand gamin qui fait du ciné pour voir ses rêves se concrétiser à l'écran - fidèle à son style - l'introduction
rappelle sans peine Van Helsing, tandis que le Q.G. des G.I. se situe en plein désert égyptien, comme dans
la Momie - et fidèle à ses relations - on retrouve ainsi Arnold
Vosloo, Adewale Akinnuoye-Agbaje et Brendan Fraser au casting, tous recyclés de la Momie. Mais, si le bonhomme reste sincère dans sa démarche (je ne doute pas qu'il le soit), G.I. Joe n'atteint clairement pas le niveau de ses précédentes réalisations. Et pour cause...
"French are pretty upset"
Et y'a de quoi, l'ami! Car au visionnage du film, y'a quand même des questions à se poser, oscillant entre "Paris est-il
vraiment un endroit à la mode aux yeux des américains?" et "Bon dieu, ils nous en veulent encore les
saligauds!". Rien de chauvin là-dedans, plutôt une constatation amusée: celle d'être à la fois un centre d'attraction considérable - c'est frenchy jusque dans le
casting, avec Saïd Taghmaoui et Grégory Fitoussi - et un sujet de moquerie perpétuel. L'intérêt à de quoi
flatter - et étonner - mais la relative fierté de voir débarquer les G.I. Joe sur le sol français est de courte durée tandis qu'ils mettent peu à peu Paris à sac, détruisant des boutiques de la
rue St Honoré, ruinant une ligne de tram, bouleversant le traffic (relativement fluide) et faisant finalement chuter le symbole national par excellence: la Tour Eiffel. D'aucun pourrait y voir de
la raillerie. En ce qui me concerne, j'ai juste trouvé que ça faisait désordre, tout en m'amusant d'un tel symbolisme, quand, plus tard, la Maison Blanche est évidemment épargnée, elle. Bref, le
choix de notre beau pays avait-il pour but de flatter notre ego, ou celui de nos voisins outre-atlantique? J'avoue que ça me titille un peu...
"When I'm finished, this world will never forget..."
...ou pas. Parce que dans le genre anecdotique, G.I. Joe se place là. Et ce n'est pas faute d'avoir mis le
paquet. A sa décharge, je dirais qu'il est l'un des rares films devant lequel j'ai pensé les trois quarts du temps: "je ne me
demande pas où est passé le budget, là, c'est clair, ils l'ont mis à profit". Encore aurait-il fallut payer aussi
les scénaristes, pour le coup. Ainsi, au lieu d'avoir une histoire, à défaut d'être cohérente, un tant soit peu fédératrice, on aura droit à triple rasade d'effets spéciaux et de combats au
sabre, au bazooka, au torpilleur, au mitrailleur, au lance-flamme, au lance-grenade, j'en passe et des meilleurs. Oui, clairement, ils ont mis la dose. Alors, oui, on en a plein les mirettes,
mais plus d'une fois, les plus lucides auront la sensation de feuilleter sur grand écran et en avant-première le catalogue Jouet Club pour Noël. Car, si l'association avec la firme Hasbro est
d'emblée annoncée dans le générique de début, il s'avère envahissant pendant tout le reste du film. Le réveil du Cobra n'était peut-être pas le sous-titre le plus adéquat pour cet opus. En ce qui
me concerne, je pensais plutôt à "Hasbro contre-attaque" ou "la revanche d'Hasbro". Parce que non seulement le fabricant de jouet nous présente, par le biais du film - mué en méga spot
publicitaire - sa nouvelle gamme de jouets G.I. Joe, mais en plus, Stephen Sommers, largué dans la stratosphère, se paye le luxe de se faire son petit
Star Wars. Entre les armes lasers à longue distance, les chasseurs aux allures de croiseurs interstellaires,
l'accoutrement du vilain méchant (souvenez-vous de Dark Vador sans son casque) et le combat final entre les deux ninjas autour d'un gouffre béant à grand renforts de Dzzzzi et de Dzzzza, vous
admettrez qu'il y a comme un air de déjà vu. Sincèrement.
"This has only just began"
Oui, parce qu'evidemment, là où y'a de l'action, il n'y a point d'ennui. Et ce serait trop dommage de laisser le cobra dans sa cage... Donc, toute l'équipe devrait rempiler d'ici peu pour le
second opus. D'ici à ce qu'Hasbro face pression pour lancer une nouvelle saga, il n'y a qu'un pas. En attendant, on peut espérer une histoire digne de ce nom pour la suite, ou se résigner à
assister au spectacle (pas déplaisant), le cerveau déconnecté. Guère mieux.
EN BREF:
*Indice de Satisfaction:
*2h00 - Américain - by Stephen Sommers - 2009
*Cast: Channing Tatum, Marlon Wayans, Sienna Miller, Rachel Nichols, Saïd Taghmaoui, Dennis Quaid...
*Genre: Prend ta pelle et ton seau et va jouer...
*Les + : Un peu d'humour, un déluge d'effets plutôt impressionnants, le titre de fin des Black Eyed Peas.
*Les - : On est censé s'attacher à tout ce petit monde ou bien? Y'a des enjeux quelque part?
*Liens: Fiche Film
Allociné
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*Crédits photos: © Paramount Pictures France