ENFIN. Me voilà de retour chez moi, face à mon ordinateur avec cette fameuse review à rédiger, mais ne sachant trop par où commencer vu que pas loin d'une semaine après le concert, certains éléments demeurent confus dans mon esprit, donc je vais commencer par un petit résumé des épisodes précédents, car je sens que ça va être joyeusement laborieux.
-Il y a trois ans de ça alors que je végétait devant une retransmission du Hurricane Festival sur Arte (vous voyez ce groupe FB ? c'est l'histoire de ma vie), mes yeux se sont arrêtés sur des inconnus répondant au nom étrange de Mando Diao qui maniaient plutôt bien leurs guitares. En gros, depuis ce jour là mes yeux sont restés bloqués sur eux.
-Hélas pour moi, ces messieurs demeurant étrangement très confidentiels en France, ils n'avaient pas fait une seule date dans notre pays depuis 2005. S'ensuivit une souffrance régulière quand paraissaient les noms des villes où ils jouaient.
-Je commençais à envisager sérieusement un pèlerinage dans un festival teuton afin de pouvoir enfin assouvir ce désir quand la nouvelle tomba : une date à la Maroquinerie. J'avais enfin la certitude de l'existence d'une entité divine quelque part dans ce monde.
(maintenant avance rapide dans le temps:)
7 avril dernier : J'arrive aux abords de la Maroquinerie un peu avant 6h, car motivation extrême, forcément. Pas loin de l'entrée, une porte est ouverte sur la rue et s'élèvent de l'escalier sur lequel elle donne des accords de guitare. Il y a là 4 filles qui semblent se demander si descendre est une bonne idée.
Question: "C'est Mando Diao qui répète?"
Réponse: "Apparemment oui..."
Conclusion: "Bon on descend."
Et là ô miracle, on est en fait backstage, et juste à côté de la scène. Y'a même un portant sur lequel sont pendus cinq peignoires Mando Diao, mais surtout un Gustaf Norén et ses acolytes à quelques mètres de là en pleines balances. Notre position est assez stratégique et nous demeurons très furtivement cachées. Des membres de l'équipe du groupe font des allez retours mais personne ne semble s'inquiéter de notre présence, on nous dit même bonjour. Normalité absolue de la situation. Le groupe joue Mean Street, en l'absence légèrement inquiétante de Björn Dixgård, et enchaine à mon plus grand étonnement sur une reprise de Dancing Queen d'Abba. En même temps on est Suédois ou on ne l'est pas. Ils jouent encore un peu mais on fini par se faire déloger, quand même. On continue l'attente à l'étage, et à 19h30 ouverture des portes. C'était la première fois que je voyais un concert à la Maroquinerie et j'ai été très agréablement surprise par la petite taille de la salle. Je me retrouve devant à droite, as usual, dans un état de pré-béatitude probablement inquiétant.
The View ouvre le concert. D'eux, je connaissais approximativement deux chansons et demi, peu attirée par leur image tenace de wannabe Libertines version Écosse, mais je reconnaitrai volontiers que c'est un fort honnête groupe de scène, même s'ils n'ont vraiment pas inventé la poudre. Le bassiste au physique intéressant et à l'accent très folklorique était équipé d'un pichet de vodka orange aux dimensions imposantes, et le chanteur a longuement lutté avec sa braguette et a également fait des choses peu orthodoxes avec son micro. Voilà pour les détails intéressants. Ils jouent 35 minutes puis laisse place à un traffic important sur scène de roadies blonds option Suède et à peine 20 minutes plus tard, extinction des feux et grosse montée d'adrénaline puisque rappelons-le, trois ans d'attente parviennent à leur acmé. Oui, presque mélodramatique. Le groupe arrive dans la pénombre et les deux guitaristes (Björn a refait surface, soulagement) se placent dos au public. Et Sheepdog. Commencer par du Bring 'Em In, surtout cette chanson, c'était parfait. En 30 secondes ils ont l'intégralité du public dans la poche et ça commence à tanguer dangereusement dans la fosse, et nombreuses sont les cordes vocales en action.
Ils continuent sur un titre du nouvel album, You Got Nothing On Me, et on remarque qu'il y a du fan dans la salle, car le titre est repris en cœur. Idem sur Mean Street qui suit. Le groupe enchaine sur une splendide version de Never Seen The Light Of Day, un de mes titres favoris. En toute honnêteté à cet instant précis j'étais un peu en transe. Puis soudainement la salle se calme, leur trompettiste commence à jouer. J'ai oublié de préciser qu'ils sont désormais accompagnés en permanence par un trompettiste et deux choristes, qui elles ne servent pas à grand chose puisqu'on ne les entend pas. Ils entament High Heels et la température monte de manière assez significative. Après ce court moment de répit retour au Mando Diao rock classique avec Good Morning Herr Horst de Ode To Ochrasy, on recommence à balancer des coups d'épaules aux voisins en toute impunité. Vient un You Can't Steal My Love d'anthologie, spécialement bien accueilli car il a récemment marqué les set lists du groupe de son absence, alors que c'est un des meilleurs singles du groupe. Le "honey I love you like the summer falls..." de fin fut repris en chœur dans une extase assez certaine par une bonne partie du public, et c'était beau.
Après ce grand moment, le concert prend un tour quelque peu différent : le groupe quitte la scène, à l'exception des deux leaders qui empoignent des guitares sèches pour quelques morceaux en acoustique. Il faut savoir que si le groupe s'est fait connaitre avec un premier album rock garage somme toute assez basique dans le genre (mais extrêmement bon et efficace, mon préféré avec NSTLOD), ils excellent véritablement dans les ballades et les reprises acoustiques de leurs propres titres plus nerveux. Puis la force de Mando Diao, c'est aussi cette alchimie de fou furieux qu'il y a entre Björn et Gustaf: habituellement le destin normal d'un groupe à deux leaders, c'est de finir par se casser la gueule à cause d'un conflit d'ego et d'une lutte acharnée pour le pouvoir à l'issue forcément tragique. Les exemples ne manquent pas. Mais dans Mando Diao, tout se fait naturellement et le partage des rôles ne semble poser aucun problème. Du coup, les chansons de l'un et de l'autre s'alternent dans une harmonie totale, ils partagent souvent un même micro et leurs voix se mélangent parfaitement. Pour faire court, ce passage acoustique ça te remuait un peu les tripes, c'était beau. J'ai l'impression d'avoir dit beau au moins une dizaine de fois déjà, mais je n'arrive pas à m'en défaire, ce concert était beau tout simplement. Ils ont joué Ochrasy, If I Don't Live Today et après Ringing Bells, où le reste du groupe est progressivement revenu. Non mais Ringing Bells quoi.
Après ça, ils ont repris le rythme avec The Shining du dernier album, violent retour à la réalité suivit de Gloria. Gustaf laisse tomber sa Gibson le temps de jouer en acoustique les premières mesures de TV & Me, jouant avec nos nerfs pour faire monter la pression. Puis ils jouent coup sur coup les deux tubes de Hurricane Bar, God Knows et Down In The Past, continuant à malmener la fosse de plus en plus démontée dans la joie et la bonne humeur. Enfin bonne humeur générale un peu relative à en croire la rage de deux filles devant moi qui n'avaient manifestement pas envisagé qu'un concert de Mando Diao ça puisse être "un peu agité", et qui étaient également assez peu renseignées sur l'effet de ressac étonnant qu'il peut y avoir dans une salle de cette taille quand tu pousses un de tes voisins dans l'espoir d'avoir un peu plus de place, et qu'en fait ce voisin + la cinquantaine de personnes à proximité te revient dessus puissance 10. Enfin moi j'étais contente, j'ai juste eu une petite pensée émue pour mon sac à main que j'avais abandonné contre la scène et qui était probablement entrain de souffrir. A ce moment là, pause, c'est déjà l'heure des rappels et le groupe quitte la scène.
Et on en vient à la dernière partie. La salle est plongée dans le noir et on entend cette respiration caractéristique qui annonce le début de Dance With Somebody. Retour progressif des musiciens sur scène. Le titre est beaucoup moins propre en live, ce qui n'est pas pour me déplaire vu mes réticences originelles pour DWS, puis on eut droit à des petits déhanchements d'un Björn humide temporairement séparé de sa Jazzmaster, c'était charmant. C'est alors que Gustaf a l'idée du siècle, c'est à dire vraiment danser with somebody : il fait signe de monter sur scène. Évidemment en 10 secondes la petite scène de la Maroquinerie est submergée par une vague qui constituait globalement les deux premiers rangs, à dominante féminine. (Là je fais impasse sur un détail groupistique très niais et légèrement compromettant) .Donc je suis là à sautiller dans une parfaite insouciance entre Björn et Gustaf quand je sens des mains m'agripper et m'expédier la tête la première dans la fosse. Normal. Un mètre plus bas je me retrouve donc à 4 pattes au premier rang sans tout à fait comprendre ce qui vient de se passer, mais la chance fait que je n'ai subis à ce moment là aucun écrasement majeur des phalanges qui aurait pu conduire à une amputation, et le temps de me relever j'observe les gars de la sécurité passablement débordés tentant de faire descendre une à une les filles du public encore sur scène. Je ne leur reprocherait pas leur sauvagerie parce que désormais je suis tout à fait devant et pile au milieu, et il ne reste plus qu'un titre.
Les gars de l'équipe finissent par descendre pour de bon dans la fosse pour créer une sorte de barrière humaine afin que le premier rang ne suffoque pas complètement et cesse un peu de se faire broyer les genoux par la scène décidément très basse. J'avais jamais vu ça dans un concert, ça donne une petite idée de ce que ça pouvait donner à ce moment là. Gustaf lance un compte à rebours "en français dans le texte" et Long Before Rock'n'Roll démarre. La conclusion parfaite en quelque sorte. A ce moment là j'ai physiquement très mal mais avoir Björn et Gustaf qui s'égosillent à portée de bras ça permet de faire assez bien abstraction. Pour le côté sentimental, c'est aussi la première chanson du groupe que j'ai écouté. Sur la fin ils remplacent "Long Before Rock'n'Roll" par "Long Before Mando Diao", j'en déduis que leur amour propre est au beau fixe. En tout cas c'était fabuleux. Je récupère sur la fin un médiator de Gustaf ainsi qu'une set list qui semble avoir connu la guerre, et m'achète un Tshirt en servant au préposé au merchandising mes 4 mots et demi de Suédois. Ça l'a amusé. Le seul point négatif du concert est qu'ils ont joué seulement une chanson de Bring 'Em In, malgré nos cris déchirants réclamant un Mr Moon. Mais excellente surprise, Mando Diao revient en France cet hiver avec trois dates : Toulouse, Lyon et Paris. Autant dire que même si je suis dans le flou total quand à ma situation géographique l'année prochaine, je serai de la partie. C'était un peu le concert de ma vie. (voilà, j'ai fini dans le sentimentalisme, comme prévu!)
+ Mes photos du concert sont globalement très floues, celles illustrant l'article font partie de la petite poignée ne semblant pas complètement être l'œuvre d'un malade de parkinson en phase terminale. En bonus, deux vidéos du concert en provenance du site officiel, vous pourrez admirer la stage invasion sur la seconde :
Down In The Past
Dance With Somebody