[nb: article complet!] L'enchainement Field Day / Underage Festival fut violemment bon, mais hélas toutes les bonnes choses ayant une fin je suis déjà de retour chez moi afin de narrer ce merveilleux weekend Londonien. Je ne vous cache pas que le retour en Ardèche fut quant à lui très douloureux, on ne s'habitue jamais vraiment à un tel néant culturel.
DAY ONE
Partie de Valence vendredi matin, j'ai retrouvé ma chère camarade rémoise Sarah l'après midi même à Trafalgar, et malgré le soleil écrasant nous partîmes vite faire l'acquisition d'une paire de bottes pour le lendemain. La botte de pluie, c'est quand même l'accessoire ultime du festivalier britannique, donc il m'en fallait absolument, d'autant plus que les prévisions météo pour le lendemain n'étaient guère excellentes. Vers 8h on a fini par mettre la main sur notre hôtel sur Cambridge Road, non sans quelques difficultés car on était plus ou moins dépourvues de plan de l'endroit, et l'on a pu se nourrir pour la modique somme de £2 d'un splendide menu frites au vinaigre/ coca/ hamburger. Gastronomie locale. Le lendemain matin, après avoir absorbé un remarquable petit déjeuner à base de beans (je parle toujours de bouffe) nous nous sommes dirigées vers le Victoria Park, nos wellies provoquant le scepticisme des passants car le temps était alors clément. Aux abords du parc on a pu observer la pelouse se recouvrir petit à petit d'anglais munis de packs de bière qu'ils avaient une heure pour finir avant l'ouverture des portes: il était à peine 10h30 mais l'heure matinale ne dérange pas l'anglais moyen, tant qu'il a sa bière il est heureux. L'Anglais a le plaisir simple et c'est communicatif.
Petite appréhension à l'entrée puisque nous n'avons pas l'âge légal (le Field Day est réservé aux plus de 18 ans), mais on a pas du sembler suspectes puisque personne n'a contrôlé notre identité. On part ensuite faire un tour du propriétaire et des 5 différentes scènes avant de finir par s'asseoir devant deux jeunes filles répondant au nom de First Aid Kit. Je ne connais pas du tout et fait remarquer à Sarah que l'une d'entre elles semble avoir 12 ans et demi (en réalité 15.) Ce sont deux jeunes sœurs Suédoises adeptes de folk dépressif et sont parvenues à livrer une reprise tout à fait honorable de Tiger Mountain Peasant Song des Fleet Foxes. Nous allons ensuite voir ce qui se passe du côté de la grande scène, où l'on restera perplexes face à une chorale d'une vingtaine de filles étrangement habillées et répondant au nom de Gaggle. On reste pour voir le groupe suivant, soit Fanfarlo : pas exceptionnel mais loin d'être désagréable, le genre de truc parfait à écouter quand on est à moitié avachies dans l'herbe à observer les beaux anglais aux alentours. On va ensuite se balader et on revient pour la seconde moitié du set des Errors, et après si ma mémoire est bonne nous sommes allées tester le manège situé à l'entrée du festival, car c'était quand même le truc à faire.
Puis vint le concert de Final Fantasy, soit le one man band du Canadien Owen Pallett. Premier grand moment musical de la journée, ce gars est tout simplement impressionnant de maitrise: il est seul sur scène, équipé d'un petit clavier et de son violon, et parvient à captiver une audience considérable en seulement quelques minutes (et pourtant il jouait sur le main stage) et ce sans jeu de scène. Pour ne rien arranger, il est doté d'un humour débordant. Bref, ce garçon est tout simplement adorable et je crois bien que tout le monde était sous le charme. Dès la fin de son set, on se précipite de l'autre côté du festival vers le"Adventures in the beetroot field" stage, où le tour de S.C.U.M a déjà commencé. En live, ils sont encore plus sombres que sur disque, et jouent tous leur titres sans effectuer la moindre pause tandis que le chanteur pousse un long brame tel un cerf agonisant. En gros c'est très psyché-goth (Claire, celle ci était pour toi) et somme toute assez fascinant même si le frontman a une certaine tendance un peu agaçante à surjouer les poses torturées genre "oui je vais m'étrangler avec le fil de mon micro sur scène". Ce fut aussi l'occasion d'observer Spider Webb junior, soit son jeune frère bassiste Huw Webb, 32 kilos tout mouillé. Leur performance nous a laissé un peu groggy donc on a ensuite jugé opportun d'aller se détendre un peu dans l'herbe près du manège après être passées par le stand Oxfam se faire peindre le visage en bleu (initiative intéressante). Je me suis aperçue que l'un des occupants du manège n'était autre que Hugh Harris, le guitariste roux des Kooks, et il avait visiblement l'air très content de lui. En France on croise pas de Kooks sur les manèges.
Et ce fut enfin l'heure des tant attendus Horrors, pièce maitresse de ces deux jours de festival. On avait une vue optimale depuis le premier rang, mais par contre la pluie a commencé à tomber de manière assez intense, ce qui a fini par transformer Sarah en authentique Schtroumpf: d'ailleurs Faris n'a pas pu réprimer un rire quand il a aperçu le bleuâtre résultat. Oui Faris Badwan rit, même que c'est assez surprenant/ flippant. Nous avons eu droit à la quasi intégralité de Primary Colours, mais pas à un seul titre de Strange House, et le résultat était tout simplement magistral car même sur scène ils parviennent à une quasi-parfaite reddition de l'album. Joshua était déchainé (on a pu apercevoir ses yeux, imaginez un peu) et Faris avait des allures de grand prêtre occulte. Certes, le public était un peu anesthésie par la pluie mais au final j'étais beaucoup trop absorbée par ce qui se passait sur scène pour vraiment prendre conscience de l'humidité ambiante. Sea Within A Sea était d'une perfection sans nom, comme le reste de leur set, et je ne pouvais m'empêcher de me réjouir en me rappelant qu'on allait remettre ça le lendemain. Après ça nous sommes allées nous rassasier parce qu'il fallait bien retrouver nos esprit avant d'enchainer sur Erol Alkan. Alors là palme du public le plus étrange du festival : déjà ça ne faisait pas 10 minutes qu'on était sous le chapiteau qu'un mec vient me murmurer à l'oreille un laconique "MDMA, pills ?" (l'homme avait franchement l'air douteux), aussi on a pu observer des gens brandissant d'étrange drapeaux, d'autres des requins gonflables, quelqu'un une plante en pot (oui, vraiment) tandis que nos voisins consommaient de la C à même le sachet. Je me suis un peu demandée où j'avais atterri.
On reste une grosse demi heure avant de se déporter vers la tente voisine: on avait passé un accord car les sets d'Erol et de The Big Pink se chevauchaient, et que je ne voulais vraiment pas rater les seconds qui sont tout de même mes chouchous depuis quelques mois. Par chance ils n'avaient pas encore joué leurs deux plus gros titres, DOMINOS et Velvet. Ce fut d'une redoutable efficacité, et j'espère que ces messieurs iront loin: on peut trouver depuis quelques jours leur debut album sur internet, et c'est à écouter de toute urgence. Après ça nous nous sommes écrasées sur un véritable lit de paille pendant une bonne heure, car la pluie s'était enfin calmée et on ne sentait plus trop nos jambes. On a donc observé pendant une bonne heure tout ce qui se passait devant nous avec en fond sonore Santigold puis Skream. Notre place étant très stratégique, nous nous sommes livrées à une étude en profondeur de la population britannique festivalière présente ce jour là, une activité vraiment passionnante tant il y avait à dire sur ce merveilleux peuple. Le Field Day se targue d'avoir une atmosphère de fête de village - on peut participer à de massives courses de sacs à patates, à de géantes tug o' war ou encore à des concours d'épluchage d'oignons tout en mangeant uniquement bio ou végétarien - et en effet l'ambiance est très relax et vraiment agréable: même dans les concerts, tout le monde s'aime et personne ne cherche à pousser, rien à voir avec les festivals rock Français. A cette heure là il y avait de nombreuses batailles de paille. On a créé des catégories de festivaliers:
- ceux qui sont tombés dans des failles spatio-temporelles et semblent soit revenir d'une chasse à cour, soit sortir de la Russie pré- octobre 17.
- ceux qui ont juste l'air perdu et semblent se dire que la 13° Red Line était peut être de trop.
- ceux qui souffrent de schizophrénie et sont persuadés d'appartenir à un clan Sioux ou Appalache, et porte fièrement des plumes dans les cheveux.
- ceux qui viennent de perpétrer une tradition ancestrale en se roulant dans la boue et qui finalement n'en mènent pas large.
- ceux qui ne sont pas seuls dans leur tête et vous offre une botte en échange d'une cigarette, ou passe 10 minutes à faire la conversation à votre écureuil en peluche et à le prendre en photo en tentant de lui faire boire de la bière.
Enfin je pourrais continuer très longtemps mais on a déjà atteint un stade très critique niveau longueur de la review. Pour conclure on a fini la soirée avec les Mystery Jets, concert qui s'est transformé en immense karaoké à grands coups de "Hideaway, Hideaway, Hideawaaaaaay ohé ohé ohé oooooooh" ou de "You aaaaaaawaaaaaaay-ay-ay-ay". Ces garçons sont équipés d'une fort honorable quantité de tubes ultimes que maitrisent parfaitement leurs compatriotes, et niveau public c'était haut la main le meilleur concert de la journée (la 11° Red Line par tête a fini par faire son effet) et tout le monde dansait, c'était beau. Et le lendemain, on devait remettre ça avec l'Underage.
DAY TWO
Je vais faire plus court pour ce jour là histoire d'éviter un truc trop rébarbatif car y'a quand même quelques similitudes entre les deux. L'Underage en gros c'est la version junior et épileptique du Field Day: c'est au même endroit et une bonne partie des groupes jouent les deux jours - dont les Horrors et les Mystery Jets, pour notre plus grand plaisir. Les seules différences: les noms des scènes (car sponsors différents), l'absence de bières et de stands à cigarettes. A l'Underage, il y a par contre une signing tent, où, à condition de s'armer de patience, on pouvait rencontrer Esser, les Mystery Jets, les Pigeon Detectives, les Horrors et Patrick Wolf. Niveau public, les teenagers britons ne se comportent vraiment pas de la même manière que leurs ainés, et c'est vraiment le jour et la nuit. Pour preuve le premier concert où nous nous sommes rendues, soit les Good Shoes (dont je connais bien le père, haha) à 12h30 : nous nous sommes retrouvées par terre dès les premiers accords. Oui, pendant Good Shoes. Sarah y a perdu son passeport et son genou, moi l'usage de la cuisse droite. La passeport fut miraculeusement retrouvé au bureau de la sécurité une heure plus tard mais ma cuisse m'a fait souffrir 4/5 jours durant. On a donc profité du reste du concert un peu à l'écart, observant les chaussures qui volaient régulièrement au dessus de la fosse.
Plus tard nous sommes parvenues à assister à la séance de dédicace des Horrors, moment à la fois extrêmement étrange qui a donné lieu à une mini guerre des regards entre ceux qui étaient venus pour les Horrors et ceux qui étaient là pour les Pigeons Detectives (les deux se succédaient). Ces derniers se sont d'ailleurs retrouvés bien seuls face aux fans des Horrors, qui sont souvent des gens étranges et trop maquillés. J'ai pu dialoguer quelques instants avec Spider Webb et la version de moi même qui découvrait les Horrors avec émerveillement en 2006 en est ressortie avec une sensation très particulière, cette version là de moi-même ayant tendance à considérer que les Horrors étaient un peu trop parfaits pour exister en vrai. On parlait justement avec Sarah de l'impact que ces messieurs avaient eu sur bon nombre de jeunes à cette époque bénie où on écoutait religieusement les 5 démos qui tournaient sur le net et où on était en extase devant leurs photos et vidéos. On a un peu tendance à oublier leur importance et c'était drôle de se rappeler les good old days où la vidéo de Sheena Is A Parasite nous marquait pour la vie. Puis nous sommes allées trainer devant Santigold (chiant) en attendant les Mystery Jets qui jouèrent la même setlist (parfaite) que la veille. Nous dûmes hélas abandonner en cours de route leur concert pour retourner voir nos très chers Horrors, qui cette fois ci ne se cantonnèrent pas à Primary Colours puisqu'ils nous ont gratifié d'un Count In Fives d'anthologie ainsi que d'un Sheena Is A Parasite qui a du faire quelques morts dans les premiers rangs. Ce fut à nouveau grandiose.
Enfin pour clore la journée vint le très attendu Patrick Wolf. Là c'est comme pour les Horrors, le voir c'était du domaine de l'accomplissement. Le set fut hélas très court, la faute à des horaires qui ont été décalés, mais Patrick étant un garçon plein de bonne volonté il a même tenté de jouer un truc au Ukulélé alors que le son avait été coupé. On entendait rien, même du second rang, mais ça faisait plaisir. Sur Battle il a ramené sur scène un espèce de Patrick Wolf black (costume impossible à épaulettes, coiffure également improbable, penchant pour l'exhibition corporelle) et, visiblement ravi de jouer devant un public Underage, nous a répété plusieurs fois que nous étions l'avenir et que nous avions le pouvoir de rendre le monde meilleur notamment en nous "battlant" contre l'homophobie (Patrick est un idéaliste amateur de licornes). Ce fut le "concert chorale" du jour, car le jeune anglais maitrise sur le bout des doigts le répertoire Wolfien. Patrick quand à lui alternait Flying V et violon, créant un charmant contraste. N'empêche qu'il assure terriblement et que je paierais très cher pour le revoir dans un cadre non-festivalier. Après ça il a fallu partir, ce qui nous a vraiment déchiré le cœur car on avait fini par considérer ce parc comme notre seconde maison.
(Je pars demain jusqu'à la rentrée, si j'obtiens mon Mac d'ici là il se peut que je parvienne à poster avant le mois de septembre, autrement il faudra être patient. A bientôt!)