Ne pas aller au cinéma pendant dix jours. A première vue, rien d’exceptionnel. Ce n’est rien dix jours. Dix petits jours. Pourtant quand on a tendance à passer beaucoup de temps dans les salles obscures, comme je le fais, dix jours sans s’installer confortablement dans une salle pour se voir raconter une histoire sur grand écran, ces dix jours là peuvent paraître très longs. Et surtout créer un retard non négligeable lorsque l’on a l’habitude de voir quatre ou cinq films par semaine.
L’extension à 7 jours de la Fête du Cinéma, que j’ai pris pour habitude d’éviter pour contourner la foule, n’a pas aidé. Bien qu’en fin de compte, l’extrême beau temps semble avoir éloigné les français des salles cette semaine. Du coup ce week-end, après dix jours passés sans avoir une minute à accorder aux salles obscures, ce fût mission : rattrapage cinéma.
Malgré mon irrépressible envie de m’engouffrer dans une salle programmant Very Bad Trip, j’ai fait mon sérieux et accordé ma priorité aux films plus fragiles que la comédie surprise de l’été.
Mon retour en salles s’est donc effectué par le seul mauvais film vu au cours du week-end (sur six films, c’est un bon rendement !), Notorious B.I.G., biopic éculé de la légende du hip hop East Coast des années 90 Chris « Biggie Smalls » Wallace. Abattu à Los Angeles en 1997, le rappeur américain méritait certainement mieux qu’un film à sa gloire ne parvenant jamais à poser un regard fouillé sur la figure de Brooklyn. Le personnage est fatiguant et caricatural, et le regard du cinéaste George Tillman Jr. ne parvient pas à exister en dehors d’une succession de clichés typique du genre : la mort en ouverture, retour à l’enfance, récit plat, avec en prime une ridicule succession de passages obligés avant la mort annoncée : la rédemption envers la mère, l’ex, la fille… dans les deux minutes précédant l’assassinat à l’écran.
On était en droit d’attendre une radioscopie réaliste de la culture hip hop des années 90, ou un regard acerbe sur la rivalité du milieu, mais tout ceci n’est qu’effleuré avec lourdeur. Espérons que le jour où Hollywood se penchera sur le destin également funeste (et autrement plus intéressant) de Tupac Shakur, le travail aboutira à un film autrement plus ambitieux. Mais après tout, qu'attendre d'un film produit par la mère de Biggie Smalls et son producteur et ami de l’époque, Puff Daddy ?
Après ce travail bâclé, ce fût un plaisir d’assister au spectacle certes classique mais hautement maîtrisé de Jeux de Pouvoir. Un thriller politique qu’il est bien sûr difficile de ne pas comparer à ses aînés des années 70, ceux concoctés avec savoir-faire par Pakula, Pollack ou Lumet. Mais finalement, le film moderne de Kevin McDonald, inspiré de la série britannique « State of Play », n’a pas franchement à rougir de la comparaison. Exploration des arcanes du pouvoir à Washington, avec ses complots tortueux cachés derrière chaque colonne du Capitole, Jeux de Pouvoir est surtout un film sur l’état du journalisme en 2009. Un vibrant hommage au travail de journaliste à une époque où l’information n’a plus le même sens ni la même forme qu’il y a 30 ans.
On peut reprocher au film de ne pas viser une certaine grandeur auquel le genre pourrait pourtant se prêter, il n’empêche qu’il est un divertissement hollywoodien haletant et intelligent. Il est aussi servi par une interprétation de grande qualité, de Russell Crowe en vieux loup du journalisme, à Ben Affleck, jeune politicien plein d’avenir pris au cœur d’une machination politique.
Le troisième film de cette journée de rattrapage (ça faisait longtemps que je n’avais pas fait trois films dans la journée) a confirmé la bonne tenue de la comédie française, Tellement proches. Je ne dirais pas que c’est une surprise, étant donné que ceux à qui l’on doit le film, le duo Eric Toledano / Olivier Nakache, sont déjà responsables de deux des meilleures comédies hexagonales de ces dernières années, Je préfère qu’on reste amis et Nos jours heureux. Mais il démontre assurément que l’on peut compter sur les deux compères pour offrir au genre comique en France un mélange de loufoquerie jouissive et de regard tendre rare de par chez nous.
Le fait qu’ils travaillent en duo apporte beaucoup au cinéma de Toledano et Nakache. Le film déborde de dialogues, situations et personnages truculents, offrant parfois un visage un peu brouillon et trop plein à l’ensemble, mais si réjouissant qu’on leur pardonne leurs excès.
Rendez-vous demain pour la suite de mon retour en salles…