Il y a quelques jours, en rentrant du boulot, je tombais sur deux clochards avinés (rebaptisés « sans domicile fixe » et sans doute bientôt « privés de domicile » par nos cloportes modernes) en train de latter consciencieusement à coup de poing et de pieds un pauvre clébard que l’on entendait couiner de loin. J’ai balancé quelques secondes sur mon vieux rock rider 500, pesant le pour et le contre, hésitant à intervenir, conscient de la probabilité de devoir me battre avec ces deux épaves à quelques minutes de la sortie du CE2 de mon petit Télémaque. Fort heureusement, deux gentils ASVP, consciencieusement occupés à aligner quelques bourgeois mal garés mais encore solvables et disposant de papiers en règles, contrairement aux nombreuses pépites de la nation roulant en mini moto et en toute impunité dans quelque kartchié, n’ont pu faire autrement qu’intervenir et faire cesser le massacre.
Quelques minutes plus tard, au milieu d’une horde de jeunes salopes trentenaires aux lèvres refaites, s’est imposée à mon esprit la vision des chiens rouges de Malaparte.
Ce dernier dans son magnifique Kaputt, raconte comment, en Ukraine, les Allemands donnaient la chasse aux chiens : les tirant au fusil mitrailleur, à la grenade, les dénichant au fond des jardins, les poursuivant à travers champs. Les pauvres bêtes se réfugiaient dans les maisons et les jardins ou dans les fossés ; en vain. Ils étaient traqués, débusqués et massacrés à coup de crosse. Et Malaparte nous apprend pourquoi : les Russes les avaient dressés à aller chercher leur nourriture sous le ventre des tanks Allemands. A peine ceux-ci partaient-ils à l’assaut qu’une meute de chiens portant musette remplie d’explosif, se précipitait à leur encontre et les Panzers dynamités éclataient comme des noix…
« Quand vous les aurez tous tués », dit Malaparte à un officier Allemand, « quand il n’y aura plus de chiens en Russie, ce seront les enfants Russes qui se faufileront sous le ventre de vos chars. »
hé !