En 1609, sous le règne d’Henri IV dont je dis parfois qu’il est le roi préféré des Français depuis que la France est une république, sous son règne, donc, à deux pas de son pays natal, des procès en sorcellerie gigantesques ont eu lieu au Pays Basque. Cette région a d’ailleurs à ce sujet organisé un certain nombre de conférences cette année, pour le 400e anniversaire de l’événement, et c’est aujourd’hui Sud Ouest qui y consacre un article (Il y a 400 ans, le procès sanglant de la sorcellerie). C’est ce dernier qui m’a inspirée aujourd’hui, malgré quelques raccourcis gênants (parler de “temps obscurs” pour qualifier le moyen-âge est un cliché largement battu en brèche par l’historiographie contemporaine ; l’opposition de ces “temps obscurs” à une fin de Renaissance qui serait plus éclairée relève de la même méconnaissance de la période, souvenons-nous des massacres des guerres de religion pour en faire la preuve. Parenthèse fermée).
En cette année 1609, il y eut donc un long procès contre sorcières et sorciers, qui dura près de quatre mois. Plus de 500 témoins furent entendus. Ce procès est à replacer dans une tradition de “chasse aux sorcières” plus ancienne dans cette région. La population se plaint de choses diverses et variées, plus ou moins faciles à prouver : on accuse les sorciers et sorcières de jeter des sorts au bétail ou de freiner la fécondité masculine, mais pas seulement : on raconte que des femmes dansent avec des crapauds, que le Diable en personne sodomise des enfants, etc . Le roi Henri IV décide donc d’ “éradiquer la sorcellerie en Labourd” (le Labourd est une des provinces basques).
Les audiences sont d’une grande violence : les hommes et les femmes accusés de sorcellerie ne sont pas seulement interrogés mais torturés. On recherche sur leur corps la marque du Diable : les accusés sont nus lors des “interrogatoires”. La condamnation à mort est systématique et l’exécution suffisamment spectaculaire pour donner une valeur expiatoire à la chose (on allume les bûchers, on sort les cordes pour la pendaison).
Les procès se poursuivent pendant les trois ans qui suivent, mais à Bordeaux, dont dépend le Pays Basque sur le plan judiciaire : des femmes y sont ainsi jugées pour sorcellerie, des femmes qui ne parlent que le basque et que l’on interroge en français. La condamnation est inévitable.
—> Illustration :
- Détail d’un tableau de José Gonzalez de la Peña (peintre espagnol de la fin du XIXe s et du début du XXe s), qui représente une rencontre de sorcières folkloriques (notez les chapeaux pointus, les nez crochus et les mentons en galoche) dans une rue de Ciboure.