La plupart des médias nous parle d’un G20 réussi et, reprenant les mots du président français, déclarent fièrement qu’ »un ordre nouveau apparaît »… Rien que ça!
Mais quels seraient les signes d’une telle « révolution mondiale »? Lorsque l’on reprend les propositions retenues par les 20 pays les plus industrialisés, on ne voit pas poindre le moindre espoir.
« Chaque pays doit faire en sorte que l’emploi se reconstitue rapidement » : quelle contrainte sociale? « Maintenir les mesures de soutien à l’activité économique jusqu’à ce que la reprise soit assurée » : quelle méthode? « Application de sanctions à partir de mars 2010 à l’encontre des paradis fiscaux qui refusent d’échanger des informations sur les comptes litigieux de contribuables étrangers » : quelle crédibilité quand nous apprenons dans le même temps que la Suisse vient de sortir de la liste établie par l’OCDE? « Augmentation du capital des banques pour les prémunir en cas de pertes importantes » : quelle garantie sur la modification des comportements bancaires alors que certains États comme la France refusent d’entrer dans les conseils d’administration et ne légifèrent nullement sur les abus bancaires? « Augmentation du pouvoir des superviseurs nationaux » : pourquoi ne pas créer, comme beaucoup l’ont proposé, une organisation mondiale de la finance?
Bref, comme on pouvait le craindre, ce G20 fut vain…
Mais si ni Barack Obama, ni Angela Merkel, ni Gordon Brown n’annoncent à leurs concitoyens un changement radical de l’ordre mondial, il n’en est pas de même concernant Nicolas Sarkozy qui ne cesse de laisser entendre qu’il serait le « leader mondial » d’un nouvel « ordre mondial juste » (expression de Ségolène Royal qu’il moquait largement en 2007).
Encore cette semaine, le chef de l’État s’est prêté à un exercice qu’il apprécie tout particulièrement : accorder une interview à David Pujadas et Laurence Ferrari. Adoptant une mine grave, il déclame, comme le rappelle si justement le blogueur « Sarkofrance« « une succession de petites phrases et autres bons mots destinés à frapper les opinions et taire les critiques, sans contradiction ni relance de la part des deux journalistes ». Nicolas Sarkozy ne cesse de détourner l’attention des Français et ainsi de parler « bonus » et « paradis fiscaux » plutôt que « chômage », « bouclier fiscal » et « relance ». Mais il ne peut que s’empêtrer dans ses mensonges : contrairement à ses dires, il n’a pas convaincu l’Union européenne d’imposer un plafonnement des bonus bancaires ; et ni les paradis fiscaux ni le secret bancaire n’ont été supprimés. Tout cela, il le sait. D’ailleurs, lui-même ne cherche pas à changer l’ordre des choses : il sait pertinemment qu’il ne pourra rien modifier, mais surtout, ne le souhaite pas tant l’état actuel du monde convient à sa vision individualiste de la société.
Il serait peut-être temps de rappeler à notre chef de l’État que la politique n’est pas affaire de communication mais d’actes concrets. Si ces interventions à la tribune onusienne furent de bonne tenue et marquées à gauche, elles sont d’une mauvais foi scandaleuse. Il est facile de parler comme Jean Jaurès ou Léon Blum, mais c’est une autre paire de manche lorsqu’il s’agit de concrétiser les belles paroles sur le terrain.
Sans doute habitués aux déclarations grandiloquentes et quelques peu hypocrites du président français, ses interventions à l’ONU ou au G20 n’ont pas eu l’écho escompté auprès de la presse étrangère.
Ce qui a pu en revanche retenir l’attention de certains journalistes étrangers, c’est la fête organisée par l’ambassade de France mardi soir pour Nicolas Sarkozy : 400 000 euros aux frais du contribuables pour quelques 4 000 invités. La morale, l’éthique et la rigueur ne sont décidément pas pour tout le monde…
En France, la réalité, dont les médias parlent si peu et que le président de la République occulte tant qu’il peut par des discours indécents (tant ils sont mensongers), est toute autre : 32 200 chômeurs en plus en août et 92% des Français qui considèrent que la précarité est en nette hausse…
Jean-Louis Bianco & Nicolas Cadène
PS : Merci au travail particulièrement exhaustif mené chaque semaine par le « blog politique de Sarkofrance« .