La fondation Miro présente "Miro-Dupin : art et poésie". Soit la relation entre Jacques Dupin et l'artiste catalan, entre la poésie et la peinture. Des années d'amitié et d'échange artistique pour atteindre à l'alchimie entre les mots et la toile. A voir jusqu'au 18 octobre.
Longtemps Miro a côtoyé les poètes, Baudelaire, Cocteau, Prévert, Rimbaud... Il souhaitait lier sa peinture aux beaux vers, en faire une synchronie, une musique. Les titres de ses toiles tendaient déjà vers le poème (Le diamant sourit au crépuscule, 1947), et son amitié avec Dupin, rencontré à Barcelone en 1954, va consolider encore ce lien important entre l'image et les mots. Entre les traits colorés du peintre et les mots du poète. En 1961, Jacques Dupin (Ardèche, 1927), publie sa célèbre monographie Joan Miro, une oeuvre de référence aujourd'hui encore. Tous deux prolongent alors cette entente artistique en joignant le poétique au pictural. Les différents écrits sur l'art de Jacques Dupin, pour la galerie Maeght et la galerie Lelong, à Paris, font qu'il a l'habitude de rencontrer des artistes et d'aller dans leurs ateliers, c'est ainsi que se noue une véritable amitié avec l'artiste catalan. Dupin publie aussi des articles sur Miro dans différentes revues dont Derrière le miroir, jusqu'en 1981. Il organise des expositions partout dans le monde et contribue ainsi à la célébrité du peintre hors de l'Espagne. L'exposition présente les peintures et les sculptures de Joan Miro qui proviennent des fonds de la Fondation mais aussi des pièces issues de la bibliothèque personnelle de l'artiste mises en dépôt par ses héritiers en 2007. On pourra y découvrir des poèmes de Dupin. Toujours attiré par la poésie, la première partie de l'exposition montre l'intérêt de Miro pour cet art, ses premières oeuvres, figuratives, en sont déjà alimentées. Ainsi, ce sublime Portrait de petite fille (1919), qui pourrait être, par sa douceur et l'émotion qu'il dégage, une citation des nombreux portraits d'enfants peints par Pierre-Auguste Renoir (La petite fille à la gerbe, 1888).
La bibliothèque de Miro
Et, puis les livres et revues lus par Miro, des ouvrages sur la peinture, de la philosophie, des romans... Le coq et l'arlequin, de Jean Cocteau, L'Arbre des voyageurs, de Tristan Tzara, Poesias completas, du mystique San Juan de la Cruz (XVIe siècle)... William Blake ou Sade, Mallarmé, Jarry, Nietzsche... Et d'autres lectures encore qui montrent la passion de Joan Miro pour les mots. Ce solitaire, peu enclin aux bavardages et aux mondanités, préférait s'imprégner de poésie pour en faire plus tard une nouvelle peinture, une sculpture. Dupin, couronné en 1988 du Grand Prix national de la poésie, crée avec excellence une forme d'écriture automatique et de « cadavre exquis » chers à Breton et à ses amis du surréalisme. Au final, une poésie qui s'accorde sans failles avec les touches de couleurs de Miro où le surnaturel convoque toujours le rêve, où les éléments du quotidien s'acoquinent avec le céleste, les étoiles, le soleil... si importants dans toute son oeuvre (Le soleil le dos tourné..., et Sous le couvert la nuit venue..., Miro et Dupin, 1970, pour les deux oeuvres). Une alchimie entre deux artistes qui fonctionne à merveille pour le plus grand plaisir de celui qui lit et observe. Deux hommes au service de leur imagination, tout simplement.
© Corinne Bernard - Juin 09 -
Exposition visible jusqu'au 18 octobre 2009 à la Fondation Joan Miro, parc du Montjuic, Barcelone.