J'avais quatorze ans, j'étais en vacances en Bretagne. Mon oncle me faisait découvrir Let's Dance, Bowie. Un clin d'oeil à Nile Rodgers, les années disco. Quelques heures plus tard, je me procurai l'album, et puis aussi Iggy Pop, les Stooges, Lou Reed, Giorgio Moroder... Allez savoir pourquoi, les artistes vous entraînent dans leur univers. C'est comme une drogue. J'étais une fan de Bowie et je ne comprenais pas pourquoi autour de moi on ne parlait que de Michael Jackson. Le phénomène Michael Jackson. Aux voix aiguës, je préférais les graves, la pop ne me touchait pas, je m'ouvrais aux riffs électriques de Ziggy Stardust, Marc Bolan, Mick Ronson et Keith Richards. L'électricité comme onde sonore.Je trouvais Michael Jackson vulgaire et Bowie si classe, so british... Oscar Wilde sur ma table de chevet. Une élégance de cabaret face au Bambi pop. Je n'écoutais pas non plus les Beatles, j'aimais les décadents. A l'époque je trouvais l'univers de Michael Jackson bien trop poli, bien trop sage. Du côté des poètes français, Gainsbourg était mon roi. Son insolence, son refus des politesses feintes.Et pourtant. Pourtant, en rentrant de vacances, après avoir déniché un autre 33 t de Bowie (Aladdin Sane) chez Boys Keep Swinging, l'ancien temple parisien consacré au Thin White Duke, et après avoir croisé, au fil des mois, ses sosies dans les soirées pour fans. Après avoir croisé Bowie dans plusieurs rues de la ville. Des androgynes rue du Roi de Sicile, rue des Archives via Saint-Paul. Pourtant, je me suis procuré le 45 t de Billie Jean Je voulais en avoir le coeur net. Pourquoi y avait-il alors, dans cette décade étincelante, plus de fans de Michael Jackson que de David Bowie? Est-ce que c'était sa manière de danser? Est-ce que c'était sa révolution visuelle, avec des clips en forme de petits joyaux cinématographiques? Non, puisqu'à mes yeux Ziggy Stardust était imbattable à tous ces exercices-là... J'ai pourtant vibré sur les sons de ce génie noir. Avec mes amis. Je me suis enivrée de ce roi de la pop réinventée. Je dois dire que depuis quelques temps déjà, entre Gainsbourg et Iggy Pop, entre Leonard Cohen et Fischerspooner, il y a les Jackson Five dans ma discothèque. Et quand j'y songe aujourd'hui 26 juin 2009, ce jour étrange où l'on annonce partout la mort de Michael Jackson, je pense à Bowie, toujours là. Je me dis qu'au final ces deux-là ont un sacré point commun : mon adolescence. R.I.P.© Corinne Bernard - Barcelone, juin 2009 -
J'avais quatorze ans, j'étais en vacances en Bretagne. Mon oncle me faisait découvrir Let's Dance, Bowie. Un clin d'oeil à Nile Rodgers, les années disco. Quelques heures plus tard, je me procurai l'album, et puis aussi Iggy Pop, les Stooges, Lou Reed, Giorgio Moroder... Allez savoir pourquoi, les artistes vous entraînent dans leur univers. C'est comme une drogue. J'étais une fan de Bowie et je ne comprenais pas pourquoi autour de moi on ne parlait que de Michael Jackson. Le phénomène Michael Jackson. Aux voix aiguës, je préférais les graves, la pop ne me touchait pas, je m'ouvrais aux riffs électriques de Ziggy Stardust, Marc Bolan, Mick Ronson et Keith Richards. L'électricité comme onde sonore.Je trouvais Michael Jackson vulgaire et Bowie si classe, so british... Oscar Wilde sur ma table de chevet. Une élégance de cabaret face au Bambi pop. Je n'écoutais pas non plus les Beatles, j'aimais les décadents. A l'époque je trouvais l'univers de Michael Jackson bien trop poli, bien trop sage. Du côté des poètes français, Gainsbourg était mon roi. Son insolence, son refus des politesses feintes.Et pourtant. Pourtant, en rentrant de vacances, après avoir déniché un autre 33 t de Bowie (Aladdin Sane) chez Boys Keep Swinging, l'ancien temple parisien consacré au Thin White Duke, et après avoir croisé, au fil des mois, ses sosies dans les soirées pour fans. Après avoir croisé Bowie dans plusieurs rues de la ville. Des androgynes rue du Roi de Sicile, rue des Archives via Saint-Paul. Pourtant, je me suis procuré le 45 t de Billie Jean Je voulais en avoir le coeur net. Pourquoi y avait-il alors, dans cette décade étincelante, plus de fans de Michael Jackson que de David Bowie? Est-ce que c'était sa manière de danser? Est-ce que c'était sa révolution visuelle, avec des clips en forme de petits joyaux cinématographiques? Non, puisqu'à mes yeux Ziggy Stardust était imbattable à tous ces exercices-là... J'ai pourtant vibré sur les sons de ce génie noir. Avec mes amis. Je me suis enivrée de ce roi de la pop réinventée. Je dois dire que depuis quelques temps déjà, entre Gainsbourg et Iggy Pop, entre Leonard Cohen et Fischerspooner, il y a les Jackson Five dans ma discothèque. Et quand j'y songe aujourd'hui 26 juin 2009, ce jour étrange où l'on annonce partout la mort de Michael Jackson, je pense à Bowie, toujours là. Je me dis qu'au final ces deux-là ont un sacré point commun : mon adolescence. R.I.P.© Corinne Bernard - Barcelone, juin 2009 -