L'émotion s'accommode mal de la raison surtout lorsque la première tend à oblitérer la seconde.
Plusieurs éléments m'inquiètent quant à cette proportion croissante de Français qui ne sait guère plus que réagir au détriment d'une réflexion mesurée.
1. Il ne fait pas bon être banquier ou travailler dans un établissement financier de nos jours.
Dans un élan bien franchouillard aigri, pris dans la spirale de la catharsis, mal avisé serait celui qui révélerait son salaire, surtout si celui-ci a le malheur de dépasser 3000 EUR par mois ! Vous devrez nager à contre-courant d'un déversement collectif de bile. La rage de l'injustice biaise le jugement au point de se tromper de cible. Je devrais véritablement arrêter de lire les commentaires chez Rue89 dont je devrais savoir qu'ils ne sont généralement jalonnés que de clichés gauchistes que même certains sympathisants socialistes renieraient.
Les banques ne sont certes pas des parangons de vertu, mais de là à en faire les représentants sur Terre du Malin, c'est oublier leur rôle indispensable dans notre économie.
2. Notre Lider Maximo hypergesticulant n'est pas à la hauteur de sa charge. Je commentais récemment sur Facebook le statut d'un jeune Gaulliste du Renouveau, dont j'ai du mal à concevoir son ralliement assumé à la majorité en place sans renoncer ce qui fait justement l'essence même du gaullisme:
Et ça ne vous fait pas mal en tant que gaulliste d'être affilié à une majorité qui saccage l'héritage du Général? Positions atlantistes, recul d'indépendance du pouvoir judiciaire, judiciarisation de la vie politique, un Président qui range les ministres au rang de simple conseillers à l'américaine...c'est loin d'être gaulliste tout ça...
Et j'omets volontairement le côté bling-bling du Président qui est sans doute ce qu'il fait de plus antigaulliste. Le Général avait une autre idée de la fonction présidentielle.Être Chef de l'Etat, c'est gouverner avec la raison. Ce n'est pas bondir sur chaque fait divers pour manipuler l'opinion publique. C'est savoir se mettre au-dessus des turpitudes quotidiennes politiciennes. Je crois que Georges Pompidou est l'auteur de cette fameuse phrase selon laquelle le Président doit s'occuper de l'image de la France et le Premier Ministre du quotidien des Français. C'est exactement de cela dont il s'agit.
Donner un cap, une grande direction, un projet, un espoir d'avenir. Cela se construit dans le temps de la réflexion. Force est de constater que nous avons à la tête de l'Etat un homme qui se laisse guider par ses émotions ou du moins qui en donne l'image.
L'effet en est désastreux. La colère ou la rage amènent Nicolas Sarkozy à se rabaisser, à participer même aux querelles politiciennes, amalgamant l'homme et la fonction.
Sauf que lorsqu'une partie civile peut se permettre de traiter un suspect de coupable, un Président viole les fondements mêmes de notre République.
Aparté: Au fait quelqu'un aurait-il des nouvelles de François Fillon? Je m'apprête à lancer une alerte pour personne disparue !
3. Le football, sorte de révélateur d'une société est à cette image. S'agissant d'un sport, il est donc nécessairement emprunt d'émotions. Mais sauf à en faire un dérivé d'Ultimate Fighting ou un digne représentant de la confrérie des bouchers-charcutiers, la raison doit aussi dicter le jeu. C'est ce que l'on appelle le Fair-Play: savoir faire fi de l'émotion pour rendre à ce fabuleux sport sa dimension fédératrice et ludique. La joie et la tristesse en communauté ne deviennent ainsi pas la moquerie et la colère. Mais là aussi, la France ne sait plus raisonner.
Comme dirait l'un des plus grands (non par la taille) penseurs de la fin du XXe siècle:
La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène à la souffrance.Si cela ne vous a toujours pas convaincu que Nicolas Sarkozy est l'incarnation française de l'Empereur Palpatine...