Le Ponente est installé, durable
et fort. Il serait préférable d’attendre la renverse pour rejoindre Tanger mais
après une étude studieuse des charts, j’imagine encore qu’en partant au bon
moment, en louvoyant aux bons endroits du détroit et aux bonnes heures, le
passage reste jouable malgré ces conditions. Finalement, non. Les veines
favorables vers l’ouest sont inexistantes. A leur place, et sur toute la
largeur du détroit, un courant traversier de 3 nœuds au moins nous rejette en
Med, chaque tentative pour changer d’amure se traduit par un misérable retour
sur nos pas… Pas la peine de finasser. Atterrissage à Ceuta, l’enclave
espagnole de la côte marocaine, juste en face de Gib. Pas de renverse prévue
avant plusieurs jours mais le Ponente commence à faiblir et les flux marins complexes
de la zone devraient retrouver une certaine prédictibilité.
Nous retentons le passage deux jours après. Mon petit planning établi et suivi scrupuleusement heure par heure, en fonction du marnage et de ses effets si différents à deux endroits donnés, a l’air de fonctionner cette fois. Rase cailloux au sud pendant quelques heures, long bord NW ensuite jusqu’à Tarifa, rester au centre après puis piquer sur Tanger au dernier moment. Contre 4 nœuds de courant juste avant la baie, Tanger, alors pourtant si proche, prend l’allure d’un mirage que l’on n’atteint jamais.
Au-delà de satisfactions purement voileuses, si vous pensez qu’une journée de voile peut être monotone, venez

L’arrivée méritée à Tanger est unique: Le Royal Yacht club de Tanger, au pied de la Medina, ne compte qu’un seul petit ponton prévu pour les voiliers. Pas de place, bien sûr. Dans un haussement d’épaules, un gars du port nous suggère l’autre rive, le port de pêche où s’enchevêtrent déjà 10 rangées de chalutiers en tous sens depuis le quai. Nous y rajoutons une onzième couche, avant que deux autres voiliers n’augmentent le compte. Dans ce curieux contexte, échanges de bon procédés, discussions et apéros s’enchainent immédiatement avec des voisins éphémères que nous recroiserons ailleurs probablement, maintenant que nous sommes engagés sur le rail de la transhumance saisonnière vers les alizés.
Se rendre ensuite à quai est une expédition, surtout avec enfants et poussette. Dix minutes au moins pour enjamber

Je traîne dans les dédales de la Medina et de la Kasba, pense aux illustres fantôme

Christophe et Marie-Laure vivent ici depuis 4 ans. Ils nous accueillent comme si
