L'Inspecteur d'académie d'Ile-et-Vilaine a
récemment défrayé la chronique en qualifiant la langue bretonne d'"artificielle" et le département de non-brittophone.
Outre le fait qu'un fonctionnaire de la République n'a aucun droit de parler ainsi puisqu'il se met lui-même en contradiction avec l'article 75-1 de la Constitution Française stipulant que "les
langues régiona-les appartiennent au patrimoine de la France" (sic), cet inspecteur me permet de parler de l'Education Nationale et de son système libéral et jacobin (le
mélange des deux est un délice pour la diversité culturelle et la démocratie):
1. Les filières bretonnes n'ont pas le droit au même traitement que les classes dites "normales". Ainsi, à Bruz, l'école Jacques Prévert, avec 138 élèves comptent 4 classes pour 5 dans l'école
Champ l'évèque qui n'en compte "que" 132. Loin de moi l'idée de vouloir tirer vers le bas, mais force est de constater que 49 enfants en filière bilingue dans une même classe, c'est un peu lourd
pédagogiquement parlant! Quel argument pour ne pas ouvrir un deuxième poste? Néant. A l'heure où je vous parle, les enfants ont été séparés et certains ont du renoncer à apprendre le breton
(comme quoi, la demande existe, mais n'est pas suivie par l'offre).
2. Le breton est méprisé par un Etat qui ne reconnaît que la francophonie au titre de la diversité culturelle. Petite nouveauté, les langues dites "utiles" apparaissent dans nos établissements!
Ainsi, à Lorient, un pôle de chinois apparaît sur deux collèges. Quel zèle pour une classe qui ne comptera sans doute pas autant d'élèves qu'une classe bilingue français-breton d'ici deux ans! Je
ne parle pas des profs de latin plus nombreux que les profs de breton. L'Education se privatise et le breton (de même que les arts plastiques, le sport ou la musique) vont connaître de plus en
plus de difficulté pour justifier leur pertinence économique.
3. Le silence du Rectorat est une technique bien connue des services de l'Etat. Laisser pourrir la situation (comme tous les ans) pour décourager les parents mobilisés. Ainsi, chaque année, ce
sont des dizaines d'enfants qui passent d'une filière bilingue à une filière monolingue. Il est certain qu'à ce rythme, Le Drian peut se brosser pour atteindre les 20000 enfants scolarisés en
2010. On sait pertinemment que l'UMP va se placer sur ces sujets pour les régionales... Qu'ils ne prennent pas les bretons pour des jambons, l'Etat est tout puissant en France et le Conseil
régional de Bretagne est un nain politique. Si l'UMP n'est pas à la tête de l'institution régionale, il est à la tête de l'Etat, du gouvernement et du Parlement! Quid de la loi "Le Fur" en
2009?
4. On remarquera aussi l'éternelle méthode de l'Etat qui cherche à diviser les parents, à monter les filières les unes contre les autres, à faire croire qu'il s'agit de problème de recrutement.
Il est vrai qu'il n'existe qu'un IUFM bilingue en Bretagne (à St Brieuc) et que les formés sont essentiellement nommés en Côtes d'Armor. Qu'attend donc l'Etat pour améliorer ce système en
donnant la compétence linguistique au Conseil régional ou mieux, en rendant la Bretagne autonome? Comme le groupe UDB au Conseil régional de Bretagne l'a écrit à Luc Châtel, "vous avez
promis aux français de ne pas être le ministre du statu quo, nous vous demandons donc d'avancer concrêtement en matière d'enseignement bilingue (...)".
Bon, je m'arrête là, mais il y aurait tant à dire. L'enseignement en bilingue a été reconnu comme efficace en Bretagne comme ailleurs. Mais il faut comprendre qu'en ne défendant pas les filières
bilingues, c'est l'Education en général que vous ne défendez pas. Car le breton est la première matière. Ensuite viendront les autres... et quand on commencera à toucher à la philo (diantre, cela
fait réfléchir... à quoi ça sert?), à l'histoire (on ne va quand même pas leur apprendre que la crise de 29 est la cause principale de la seconde guerre mondiale!), à la géographie
("territoires"? Parlez moi plutôt d'"administration", "coloniale" si possible)... Le bruit du silence est assourdissant.