Magazine Beaux Arts
Photo : Paule Mackrous
Vaincre ses plus grandes peurs, ce n'est pas une mince affaire! La fuite est un baume dont l'effet est aussi vif qu'éphémère, car même dans le plus beau des voyages, nos plus grandes peurs savent où nous retrouver. Et si elles voyageaient sans nous, les suivrions-nous?
Le projet Donnez-moi vos peurs de Lalie Douglas propose chaleureusement d'envoyer nos peurs ailleurs. Sur son site Web, l'artiste offre le choix entre Calgary et Montréal, les deux villes dans lesquelles prendront forme, suite à la cueillette, ses interventions performatives.
Le Mile-End a servi d'exutoire pour les gens de Calgary. Dans le cadre d'un projet spécial de la galerie Articule, l'artiste a illustré les peurs par de petits bosselages en laiton. Elle les a ensuite incrustées sur les poteaux d'Hydro-Québec parmi les chats perdus, les spectacles underground et les ventes de garage. Lorsqu'on a rencontré une peur, la chasse est sérieusement entamée : on cherche les autres avec beaucoup d'excitation! Le jeu consiste à trouver les plaques cuivrées, mais également à décrypter l'illustration.
Photo : Paule Mackrous
Dès lors, la déambulation n'a plus d'autre but que celui de retrouver le sentiment de singularité émergeant de la rencontre avec les petites plaques de laiton. On veut en savoir plus sur les peurs des autres. Une peur est toujours vécue de manière intime, mais lorsqu'elle est ainsi ritualisée, son caractère privé s'atténue en même temps que sa force. Les petites intrusions permettent de partager des peurs sans les rendre contagieuses.
Photo : Paule Mackrous
J'en ai trouvé quelques unes et je me suis empressée de les photographier. J'avais sans doute l'air un peu étrange, car je faisais systématiquement le tour de chacun des poteaux en les scrutant du regard. Chaque découverte était un moment exquis! Parmi les classiques : peur du dentiste, des rats, des requins...etc. C'est ainsi qu'une ballade ordinaire dans le voisinage s'est transformée en un jeu bien connu de l'enfance : une chasse aux trésors. C'est bien rare que les poteaux d'Hydro-Québec nous font d'aussi belles confidences.
Photos : Paule Mackrous