L'arrivée du Groupe Shogakukan & Shueisha en France a suscité pas mal d'interrogations. Nous avions appris que le mode de fonctionnement de Kaze et d'Asuka ne devait pas changer, et que les deux éditeurs pourraient toujours éditer des titres d'autres sociétés mais il restait encore quelques zones d'ombre.
Nos confrères d'Animeland ont interviewé John Easum, le président de Viz Media Europe et Cédric Littardi, le directeur de Kaze sur ce rachat inattendu et assez peu conventionnel pour des sociétés japonaises.
Les raisons du rachat de Kaze
Dans cet entretien John Easum explique que le Groupe Shogakukan & Shueisha a écarté la possibilité de s'implanter en France avec sa propre structure pour des raisons de rapidité notamment. Il a semblé au groupe japonais que Kaze était la structure parfaite pour leur arrivée en France essentiellement pour sa politique « médiamix » (Kaze est présent sur les marchés du DVD, de la télévision, du numérique, de l'édition papier avec Asuka et de l'édition musique avec Wasabi). « Au final, les deux parties étaient parfaitement complémentaires : l'une avait du contenu, l'autre la distribution. La synergie était facile à imaginer ».
Du côté de Kaze, il s'agit d'une question de développement. Cédric Littardi explique « Le développement de Kaze au-delà de la simple édition DVD devenait difficile à gérer en restant indépendant, avec des fonds propres limités ». Les banquiers et autres investisseurs n'étant pas vraiment habilités à comprendre le marché des manga et les multiples activités de Kaze, la proposition du Groupe Shogakukan & Shueisha devenait la meilleure option. « En réfléchissant bien, seules des sociétés comme Shôgakukan ; Shûeisha ; ShoPro pouvaient le comprendre se donner les moyens de le développer ».
Liberté d'achat et de vente des licences
Concernant le fonctionnement de la nouvelle structure, chez Kaze Cédric Littardi conserve donc son poste de directeur et pourra acheter les licences de n'importe quel éditeur japonais. Et il affirme que « nos nouveaux liens avec le Japon rassurent [les autres éditeurs japonais] ».
Par contre, Viz Média Europe ne dépendra plus de Viz Média à San Francisco. John Easum précise : « Nous aurons désormais une connexion directe avec Tôkyô et nous allons intégrer les équipes parisiennes de Viz et de Kaze ».
Il poursuit en affirmant : « Cela changera symboliquement, mais également logistiquement. Désormais, je représenterai Hitotsubashi Group, en tant que président de cette nouvelle structure et je serai en relation directe avec Tôkyô ».
Au niveau de l'édition papier, les éditeurs japonais se réservent le droit de vendre leur contenu à n'importe quels éditeurs français et donc pas forcément à Kaze. Une nouvelle qui devrait rassurer quelques éditeurs français. Réciproquement Kaze et Asuka pourront acheter des licences de n'importe quel éditeur japonais. Pour Asuka ça sera aussi l'occasion de commencer à travailler avec Shueisha. Cédric Littardi annonce qu'« Il est possible qu'Asuka devienne un 'Kaze Manga' et [nous] sommes en train de réfléchir sur ce point ».
Pour sa part John Easum affirme : « L'objectif des maisons-mère, c'est d'agrandir le marché de l'édition, pas de se l'approprier. En aucun cas, nous ne voulons déstabiliser le marché existant » précisant « Au final, Shûeisha et Shôgakukan veulent pouvoir choisir le meilleur acteur pour chaque titre. Ce ne sera pas forcément notre équipe et c'est important de clarifier cela ».
Le piratage
Concernant le piratage, il n'est pour l'heure pas question de lancer des opérations coup de poing comme celle de Kodansha aux Etats-Unis mais plutôt de se concentrer sur une offre légale attractive. Et l'on sait déjà à quel point le marché numérique est important pour les Japonais, on pensait même qu'ils se positionnerait sur ce marché dans un premier temps. Quant aux solutions légales nous avons déjà eu quelques beaux exemples avec Naruto et Fullmetal Alchemist.
John Easum explique : « Un des grands chantiers à venir, c'est notre positionnement dans le domaine digital. Kaze l'a d'ailleurs bien compris. En élargissant notre offre avec des solutions validées, officielles et rapides, on estime que ça réduira le piratage et le téléchargement illégal ». Une position basée sur l'offre plutôt que sur la répression que l'on appréciera alors que la France vient de voter la loi Hadopi 2. Enfin la possibilité d'un Shonen Jump en France est envisageable mais pas dans les projets à court terme.
Nous vous invitons à découvrir l'intégralité de cette interview très intéressante de John Easum et de Cédric Littardi sur le site d'Animeland.