Wikepedia est une encyclopÄĹ die sur le net et Wikipedia est un con.
Wikipedia est un con parce que Wikipedia n’est pas une encyclopédie. Wikepedia est en fait une accumulation de listes, de chiffres, de dates de naissance, de noms de capitales, de sous préfectures, de chef lieux de canton et autres lieux dits, de livres oubliés, d’auteurs autoédités, de récipiendaires de palmarès d’autres temps, de figurants dans des nanars oubliés, de listes d’acronymes caduques ou inutiles et de bien d’autres choses encore. Wikipédia est au mieux un Quid amélioré ou un « Who‘s who »tout terrain, parfois un « what’s who »ou l’l’inverse, façon Manufacture de Saint Etienne, sans les images, et au pire un mauvais annuaire, ouvert à tous les vents, à toutes les envies et à toutes les humeurs, humeurs de chiens, chiens enragés, chiens et chats, chiens échaudés, chiens assis, chiens méchants etc. Wikipédia est un con parce qu’il (ou elle, on ne sait pas ) permet à tous les quidams, qui se croient (ou se voient) d’importance de s’immiscer dans ce qu’ils considèrent comme un panthéon moderne. Ces imbéciles encombrent de leur futile vanité les sentiers tortueux de la gloire et s’y embourbent, se rendant dans cette autopromotion, encore plus dérisoires et encore plus crétins. Wikipédia est un con parce qu’elle (ou il, cf. plus haut) permet aussi au moindre projet, qu’il émane d’une entreprise, d’une association de sauvegarde, de défense ou de promotion, d’un comité de soutien, d’une agence de publicité ou d’un groupe de presse, de s’offrir à moindre frais, une légitimité ou au moins une vitrine qu’ils pensent officielle.
En plus, Wikipedia est un con parce que Wikipedia est de son temps. D’un temps où toute valeur est simplement ramenée à une mesure ou à une quantité. L’importance d’un film n’est elle pas jugée à son nombre de spectateurs, celle d’un livre à son nombre de pages, toujours précisé, ( ?!) et inévitablement accompagné de la photo de l’auteur posant pour la postérité( ?!) va savoir pourquoi. On regarde les news, un œil sur les indices des bourses du monde entier. Un chef d’œuvre de la peinture est de plus en plus souvent suivi de son prix à la dernière vente au Japon, à Londres ou à New York. Un temps où tout est ramené à ce que l’on considère comme utile, ou plutôt utilisable, en tout cas totalement maîtrisable. Il n’y a plus que des données quantifiables à partager. Un temps où la culture est donc ramenée à la capacité d’énumération, et assimilée à cette énumération. Un temps où dans les universités, on ne fait plus ses humanités, mais où l’on prépare un métier. Un temps où ce détournement de la fonction universitaire rassure les électeurs de Sarkozy.
Wikipédia, c’est la réalisation de cette prédiction de Flaubert qui dans une correspondance vilipende un monde où l’on croit utile de compter tous les grains de sables d’une plage, voire de toutes les plages, un à un et que l’on ambitionnerait de les décrire tous. Un projet aussi ambitieux qu’impossible, qui aurait sans doute aussi l’heur de plaire à Sarkozy et à ses disciples, eux qui prétendent par ailleurs avoir la maîtrise de tout.
Justement, dans la série des grains de sable et de leur description, on trouve dans l’encyclopédie Wikipedia des choses aussi étranges et essentielles que cette description en tapant N173 (si si) :
« La route nationale 173, ou RN 173, est une route nationale française reliant l'échangeur N° 3 de l'autoroute A 36, sur la commune de Vaux-les-Prés, à la RN 73. Le décret du 5 décembre 2005 prévoit son transfert au département du Doubs.
Jusqu'à la réforme de 1972, la RN 173 reliait Granville à Avranches. Elle a été intégralement déclassée en RD 973 ».
Ce point de culture propose un autre regard sur le réseau routier français et sur sa capacité d’adaptation. On se demande si un Victor Hugo ou un Maupassant, en empruntant cette N173, et sachant tout ça, grâce à Wikipédia, n’aurait pas développé une autre sensibilité, un autre esprit de création.
Wikipédia est un con parce que Wikipédia, quand elle, ou il, joue les atlas routiers, peut nous emmener sur des sentiers, hors des sentiers battus et justement valent le détour : en tapant N 7, on trouve par exemple (authentique)
« École nationale supérieure d'électrotechnique, d'électronique, d'informatique, d'hydraulique et des télécommunications (ENSEEIHT), prononcée N7, est une grande école d'ingénieurs appartenant à l'Institut national polytechnique de Toulouse et est située au centre ville de Toulouse, rue Charles Camichel. »
Et si pour poursuivre le voyage on cherche ce Charles Camichel, on échoue dans une instructive « Académie des jeux floraux » qui mérite le détour, eut bien sur son heure de gloire, jusqu’à faire mériter une rue de Toulouse à cet excellent Camichel. Sans Wikipédia, nous ne l’aurions pas su et ça serait vraiment dommage.
Wikipédia est un con parce que Wikipedia permet de jouer à un autre jeu idiot mais rigolo : inventez un nom, tapez le, à presque tous les coups Wikipedia propose une définition, suivez le guide, et amusez vous.
Wikipedia est un con mais Wikipédia permet des voyages en forme de cadavres exquis… exquis !