J'ai tendance à me méfier des super-modes et des livres portés aux nues, encore plus quand comme pour Hell, tout le monde s'accorde à dire qu'ils sont délicieusement révoltés et anticonformistes. J'ai donc attendu pas mal de temps avant de me décider à lire ce court roman ; en fait, je me suis décidée en le voyant dans la liste de lecture d'une bloggueuse dont j'apprécie le plus souvent les choix.
Et j'avoue volontiers que je n'ai pas été déçue. Bon, ce n'est pas selon moi le roman du siècle, mais il y a là un petit bijou, ne serait-ce qu'au niveau du style. Disons que c'est un must have read pour votre culture personnelle...
L'histoire est celle d'Hell, qui fait partie de la jeunesse dorée de Paris. Hell sort, Hell boit, Hell se drogue et Hell a des ex qu'elle désigne par des lettres (A., B. ...). Hell est révoltée, lucide sur la vanité de sa vie et de la vie en général. Mais ça ne l'empêche pas de continuer à claquer l'argent de ses parents en se détruisant de toutes les façons possibles... Jusqu'à ce qu'elle rencontre Andrea, son exact reflet masculin.
L'histoire en elle-même n'est pas l'essentiel. Elle est dure, triste, et comme le dit Hell elle-même: "N'attendez pas de chute à cette histoire, il n'y en a pas". Quant à la description du monde de la nuit parisien, ce n'est pas non plus franchement ce qui m'attire dans ce livre. Non, le véritable intérêt ici, c'est la verve d'Hell, puis d'Andrea, qui prend aussi la parole. C'est l'ironie noire, décapante, le sarcasme cynique élevé au rang de mode de vie. Même si ça ne mène nulle part.
Extrait choisi:
"On vit... comme des cons. On mange, on dort, on baise, on sort. Encore et encore. Et encore... Chaque jour est l'inconsciente répétition du précédent: on mange autre chose, on dort mieux, ou moins bien, on baise quelqu'un d'autre, on sort ailleurs. Mais c'est pareil, sans but, sans intérêt. On continue, on se fixe des objectifs factices. Pouvoir. Fric. Gosses. On se défonce à les réaliser. Soit on ne les réalise jamais et on est frustrés pour l'éternité, soit on y parvient et on se rend compte qu'on s'en fout. Et puis on crève. Et la boucle est bouclée. Quand on se rend compte de ça, on a singulièrement envie de boucler la boucle immédiatement, pour ne pas lutter en vain, pour déjouer la fatalité, pour sortir du piège. Mais on a peur. De l'inconnu. Du pire. Et puis qu'on le veuille ou non, on attend toujours quelque chose. Sinon, on presserait sur la détente, on avalerait la plaquette de médocs, on appuierait sur la lame de rasoir jusqu'à ce que le sang gicle..."