J'ai déjà eu l'occasion de vous dire, ici-même, mon amour pour le pays du Soleil Levant. Si vous partagez cette passion avec moi, alors réservez votre soirée du mercredi 23 septembre. Arte diffuse en effet un documentaire à 23 heures intitulé « Le Japon, l'empereur, et l'armée » de Kenichi Watanabe.
Ce documentaire ne saurait s'apprécier sans avoir visionné au préalable, je pense, deux anciens numéros du « Dessous des cartes » - ces derniers figurent sur le DVD qui sera d'ailleurs mis en vente le même jour que la diffusion du film -. Jean-Christophe Victor remonte l'histoire nipponne à -1300 av. JC avec l'arrivée de Aïnous dans la nord de l'archipel et passe en revue les principaux événements d'une très riche chronologie.
On voit bien par exemple comment le passage à la fameuse ère Meiji en 1868 oblige le Japon à s'ouvrir et que la structure qui prévalait jusqu'alors, à savoir une compétition entre le shogunat et l'empereur pour détenir le pouvoir politique, se met à changer. Ce dernier finit par l'emporter mais cette victoire sera finalement de courte durée puisque la seconde guerre mondiale et la victoire américaine conduiront à une nouvelle architecture.
C'est d'ailleurs avec l'allocution de Hirohito consentant à la capitulation de son pays, le 15 août 1945, que débute le très beau documentaire de Kenichi Watanabe. Moment historique, nous rappelle le réalisateur, puisque les Japonais entendaient pour la première fois la voix de leur souverain s'exprimer, qui plus est, dans un langage « archaïque ». Moment historique puisque, à partir de ce jour-là, l'empereur quitte progressivement son statut de divinité pour devenir un peu plus humain – on se régalera d'ailleurs des séquences absolument inouïes où Hirohito parcourt le pays pour aller à la rencontre de ses concitoyens -.
Le film montre très bien comment le général américain Douglas Macarthur – qui fut responsable de l'occupation jusqu'en 1951 - accepte de maintenir l'empereur dans ses fonctions tout en ouvrant le chantier de la démilitarisation et de la démocratisation. Ce processus conduira à la rédaction d'une nouvelle constitution, en 1946, dans laquelle le Japon s'engage à renoncer à la guerre. C'est le fameux article 9 qui oppose toujours les pacifistes forcenés à ceux qui justifient la création des forces d'autodéfense – nom actuel de l'armée nipponne – et leur intervention extérieure.
J'ai été stupéfié de voir les fameuses archives montrant l'écrivain et militant nationaliste Yukio Mishima le jour de son suicide, haranguant la foule pour dénoncer ce bâillonnement de l'armée. La mémoire télévisuelle permet aussi de comprendre pourquoi les visites successives des premiers ministres au fameux sanctuaire de Yasukuni – où reposent des criminels de guerre - font débat pas seulement au Japon mais aussi chez ses voisins chinois et coréens – rappelons, comme le fait d'ailleurs le film que l'empereur ne s'y rend plus depuis 1978 -.
Bref, une extraordinaire leçon d'histoire pour comprendre un des nombreux aspects de ce pays si méconnu et qu'un nombre incalculables de clichés voudraient nous rendre parfois si détestable.
A voir mercredi 23 septembre. A revoir avec le DVD.