L’univers de la mode m’a toujours inspiré des sentiments contradictoires : à la fois de la fascination et de la répulsion. D’un côté, cette grande dame incarne la quête perpétuelle de la beauté, le renouvellement, le rêve. D’un autre côté, la superficialité, la futilité, l’éphémère, la prétention. Mais quand j’ai entendu parler de The September Issue, autour d'Anna Wintour, la célébrissime rédactrice en chef de l'édition américaine du magazine Vogue, qui a inspiré le génial roman de Lauren Weisberger (Le Diable s’habille en Prada), je n’ai pas pu résister.
Note :
Le documentaire est plutôt intéressant. R.J. Cutler y décrit la préparation du numéro de septembre 2008 (le mois le plus important dans l’univers de la mode), commencé six mois à l’avance (!). D’abord les shootings, avec plusieurs thèmes : color blocking, années 1920, matières et la Une avec Sienna Miller à Rome. On y découvre la directrice de la création, Grace Coddington, une femme intelligente, amusante et la seule qui sache tenir tête à Anna Wintour. Les photos qu’elle aide à produire sont démentielles. Des œuvres d’art. Puis, les virées dans les capitales européennes pour les défilés ou des excursions dans les ateliers de couturiers (tels que Jean-Paul Gaultier ou Karl Lagerfeld), un peu tremblants face à la diablesse. Et la présentation des dernières pièces par les créateurs eux-mêmes, qui se déplacent jusque dans les locaux de Vogue. Cet aperçu des coulisses du plus influent magazine féminin s’avère de ce point de vue très riche. On comprend mieux le caractère de la Wintour, d’autant qu’elle se livre quelque peu, et que le documentariste est parvenu à s’inviter chez elle et rencontrer sa fille. Un portrait très humain, équilibré entre ses défauts (trop dirigiste, froide, dure, intransigeante) et des qualités suggérées (le sens indéniable de ce que sera la mode, la volonté d’aider ceux qui ont de la persévérance et du talent). Dommage, toutefois, que tant de portes restent fermées au documentariste. La rédaction des articles et les rapports entre Anna Wintour et les journalistes est, par exemple, à peine effleurée. Les rapports entre le magazine et la publicité, ô combien stratégiques et décisifs, ne sont, eux, même pas abordés.