Le changement climatique implique un changement juridique fondamental, aussi fondamental peut-êre que fut hier, la rédaction d'un code civil.
Or, ce changement n’a toujours pas eu lieu et n’est même pas réellement envisagé. Dans cette perspective, j’emprunte cette idée, qui n'est pas de moi mais qui m'a été exposée par mon confrère Christian Huglo : un Code mondial de l’environnement.
Le monde a en effet changé de telle manière qu’il devient inacceptable de tenter de l’organiser avec les instruments d’hier. Or, le droit international de l’environnement n’est absolument pas adapté aux défis d’aujourd’hui.
Pourtant, les négociations internationales se caractérisent encore par une logique diplomatique et par le monopole des exécutifs nationaux dans leur conduite. La principale conséquence de cette situation est la rédaction de textes aussi nombreux qu’imprécis et inapplicables
Au final, la succession et l’empilement de traités, déclarations et autres conventions n’est plus un moyen de prévenir et de lutter contre la crise écologique qui menace la survie même de l’humanité. Cette situation est en réalité source de confusion et ne profite qu'à ceux qui auront les moyens de profiter des failles de cette montagne de papier.
L’idée qu’une nouvelle régulation des échanges internationaux, qu’ils soient commerciaux ou culturels n’est pas nouvelle. Des ONG et des responsables politiques ont déjà défendu la création d’une Organisation mondiale de l’environnement. Des juristes et écologistes ont déjà défendu la création d’une Cour mondiale de l’environnement.
Toutefois, ces discours sont restés….des discours.
Il manque certainement une clé de voute à cette réflexion sur la manière de concevoir une nouvelle gouvernance de l’écologie. Un Code mondial de l’environnement est susceptible de l’incarner.
L’arme du droit. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, de nouveaux instruments juridiques ont été créés de manière à prévenir le retour de la barbarie. Convention et Cour européenne des droits de l’Homme, Organisation des Nations Unies et, un peu plus tard, Communauté économique européenne. Ces institutions ont des points communs : l’idée que le périmètre de l’Etat nation n’est pas suffisant pour régler tous les problèmes du monde et que le droit est une arme.
En matière d’environnement, inutile de rappeler cette phrase fameuse mais vraie : il faut « penser global et agir local ». Or, « penser global » suppose que cette pensée soit un jour ou l’autre couchée par écrit et connue voire partagée du plus grand nombre.
Un Code mondial de l’environnement peut remplir cette fonction et ainsi :
- Offrir une réponse globale et claire à des problèmes globaux et complexes
- Décliner une idée clé dans un contexte de mondialisation : celle de responsabilité
- S'écarter d'une conception carbo centrée de la crise écologique et lui apporter une réponse d'ensemble et dans tous les domaines : eau, mer, pollutions industrielles etc..
- Changer la gouvernance actuelle des négociations environnementales en cassant le monopole des exécutifs nationaux
- Asseoir la légitimité et le fonctionnement d’une organisation mondiale de l’environnement qui dépasse le cadre d’un simple programme
- Assurer l’accès et la connaissance du droit pour tous les citoyens et responsables du monde, ce que ne permet pas la collection actuelle de traités
- Clarifier les droits et obligations des opérateurs économiques tout en assurant la sécurité juridique de leurs investissements.
- Contraindre les Etats à coopérer
Je ne fais là que proposer quelques pistes de réflexion. Je n’ignore pas que la rédaction et l’effectivité d’un code mondial de l’environnement connaîtront bien des obstacles. Ceux-ci ne me paraissent cependant pas insurmontables et les avantages semblent bien l'emporter sur les inconvénients éventuels.
Ecologie et droits de l’Homme. Je lis et entends actuellement des messages de militants des droits de l’homme qui s’inquiètent de ce que l’attention soit plus soutenue pour les droits de la planète que pour ceux des Hdmmes. Après avoir convaincu de ce que l’écologie n’est pas l’ennemie mais la condition d’une économie supportable, les écologistes doivent désormais reprendre ce chantier qui consiste à articuler défense de l’environnement et défense des droits de l’homme.
Pour une Organisation mondiale de l’environnement. Le théâtre des négociations climatiques actuelles, d’Aquila à Bonn et de Bangkok à Copenhague est assez affligeant lorsque l’on a à l’esprit les enjeux auxquels il convient de faire face.
Les élus et réprésentants de la société civile sont exclus d'un processus dont la conclusion est écrite par avance : il y a aura bien un accord mais un accord sur le constat plus que sur les moyens d'y répondre. des objectifs seront fixés au cours de la dernière nuit de négociation que tout le monde s'empressera d'oublier dés le lendemain. Les mécanismes de Kyoto perdureront aprés 2012.
Restera alors à bâtir l'aprés Copenhague en faisant ce qu'il aurait fallu faire avant Copenhague : changer de gouvernance, se demander comment se prennent les décisions avant de penser à leur contenu :
- Institutionnaliser le processus de négociation de manière ce qu'il devienne permanent, ce qui renvoie aux réflexions sur la démocratie continue
- Impliquer les élus, ce qui renvoie aux réflexions sur les limites actuelles de la démocratie représentative
- Impliquer les représentants des corps intermédiaires de la société civile plutôt que de les contraindre à de la gesticulation médiatique,
- ce qui renvoie aux réflexions sur la démocratie participative
Pour atteindre ces objectifs - et bien d'autres - l'OME devra ne surtout pas être composée des seuls représentants diplomatiques des Etats nations. Penser à l'équivalent - en bien plus performant - d'un conseil économique, social et environnemental au sein de cette OME sera un atout. Des représentants de syndicats et d'ONG, triés en fonction de critères de représentativité pourraient alors siéger sans que leur légitimité ne soit confondue avec celle que procure bien entendu le suffrrage universel.
Pour une Cour mondiale de l’environnement. La construction d’un droit mondial de l’environnement dont le Code sera le vecteur ne pourra faire l’économie d’une réflexion sur l’application et donc la sanction de ce droit.
Traditionnellement (je résume à très grands traits), le droit international est critiqué pour son manque d'effectivité. La norme est conçue comme pouvant recevoir une sanction pour exister. Dés lors, quelle sera l'autorité de la chose jugée par une Cour mondiale de l'environnement ? Un vaste chantier existe ici que je n'ai pas la prétention de clore avec ce petit texte.
Et maintenant ? Lancer de grandes idées c'est bien, penser à leur mise en oeuvre c'est mieux. Je ne prétend pas détenir la solution, loin de là et me limite donc à quelques propositions.
La première étape de la rédaction d'un code mondial de l'environnement sera sans doute un travail de spécialistes : il faut tout d'abord codifier et consolider la galaxie des textes et principes qui composent déjà le droit international de l'environnement. Mais ces spécialistes ne se réuniront que si une initiative citoyenne l'exige. De même, des moyens seront nécessaires pour effecuter des recherches, mener des auditions etc...
La deuxième étape devra permettre de dépasser une codification à droit constant. La création d'une Organisation mondiale qui ne soit pas exclusivement composée des représentants des Etats sera indispensable pour achever le travail de rédaction du Code mondial de l'environnement.
J'arrête ici l'analyse de qui n'est pas une solution miracle mais un levier intéressant. Le principe est posé, j'attends de voir s'il convainc.