Jamais il ne me serait venu à l’idée d’aller voir “Julie & Julia”. C’était sans compter qu’une fille habite chez moi et que, américaine de surcroît, elle a passé une partie de son enfance scotchée devant la télévision à regarder Julia Child se beurrer tout en beurrant le plat. “Julie & Julia” s’avère au final être une comédie sans grandes surprises parvenant néanmoins à faire oublier les errements de Nora Ephron, crucifiée après son adaptation critiquée de “Ma sorcière bien-aimée”. Et prouvant une nouvelle fois la place méritée de Meryl Streep au panthéon des grandes actrices.
“Julie & Julia” entrelace avec justesse deux livres ( My Life in France de Julia Child et Julie & Julia, de Julie Powell), deux histoires, et deux époques différentes. Julie Powell (Amy Adams), trentenaire du Queens et cuisinière à ses heures perdues, réalise un beau jour qu’elle n’a jamais mené un seul de ses projets à bien. Sous l’impulsion de son mari, elle décide d’ouvrir un blog et se lancer un défi : réaliser en un an jour pour jour les 524 recettes du livre de Julia Child.
Julia Child, quant à elle, est un peu à l’Amérique ce que Maïté est à la France : une référence que votre voisin de table assommant se fera à coup sûr le plaisir d’imiter sitôt son nom évoqué. Au milieu du 20ème siècle, s’ennuyant ferme à une époque où les femmes ne sont pourvues d’aucun rôle social, elle se lance dans la cuisine et déclenche une petite révolution dans les foyers américains, au travers d’un livre puis d’émissions culinaires.
L’équation “Femmes + Cuisine = Femmes restez au foyer” n’est jamais très loin. Si cela est compréhensible placé dans le contexte du milieu du 20ème siècle pour Julia Child, il l’est moins transposé au début du 21ème, dans le cas de Julie. Néanmoins, en cuisinant, Julia ne cherchait qu’à faire fleurir sa passion pour les recettes et la bonne bouffe, ce qui n’est pas le cas de Julie. Pour cette dernière, cuisiner le livre entier de Julia Child n’est jamais qu’un moyen d’aboutir à deux choses : la première est de se prouver à elle-même qu’elle peut mener un projet à terme, aussi idiot soit-il. La deuxième est d’aboutir à ce qu’elle a toujours désiré : devenir écrivain.
On peut regretter la présence scénique un peu effacée d’Amy Adams. La faute à un rôle un peu limité, sans doute, mais aussi à la présence de Meryl Streep, exemplaire et occupant tout l’espace, au sens propre comme au figuré. Comme dans “Doute”, les deux actrices cohabitent au sein d’un même film sans jamais pourtant se donner la réplique. A souligner également la prestation de Stanley Tucci, idéal en mari affable.
Un film à savourer pour ce qu’il est : une comédie aux effluves légères qui, bien que basée sur “deux histoires vraies”, se regarde comme une fiction. D’où un possible succès auprès des spectateurs français, qui dans leur grande majorité ne connaissent pas la fameuse cuisinière, ambassadrice des petits plats français au pays du hamburger.
Un conseil tout de même avant d’aller voir le film : arrivez le ventre plein.
En salles depuis le 16 septembre
© Sony Pictures Releasing France