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Parlement paillasson

Publié le 17 septembre 2009 par Hmoreigne

 De parlement godillot à parlement paillasson, il n’y a qu’un pas. Une enjambée allégrement franchie par Eric Besson qui, sans ambages, a simplement déclaré qu’il ne prendrait pas les décrets d’application d’une loi adoptée par le parlement. Plus qu’une simple incivilité constitutionnelle destinée à corriger un emballement idéologique, l’attitude désinvolte du ministre est un nouvel exemple de la remise en cause de la séparation des pouvoirs et de l’omnipotence croissante de l’exécutif.

On ne sait plus vraiment, question saugrenue, si Eric Besson est de droite ou de gauche. L’homme est insaisissable, guidé par ses intérêts particuliers. Sarkozyste à l’excès comme tous les derniers convertis, il emprunte à son illustre mentor les recettes qui ont fait son succès. Face aux mouvements d’humeur dans la majorité suscités par sa décision unilatérale de ne pas promulguer les décrets d’application de la loi sur les tests ADN, le ministre rebondit médiatiquement avec la fermeture de la jungle de Calais.

Le désappointement des parlementaires UMP est légitime. Dans un revirement idéologique inattendu, Nicolas Sarkozy a fait part lors du Conseil des ministres de mercredi de tout le mal qu’il pense des analyses génétiques pour les candidats au regroupement familial. Chiraquisation pour les uns, Carla Brunisation pour les autres, le locataire de l’Elysée sensible aux sondages témoigne de sa contrainte d’élargir sa base électorale pour 2012.

Tant pis donc pour les grognards de l’Assemblée. “Pour être un bon soldat, il faut avoir le coeur d’un lion, les pieds d’un lièvre et le ventre d’une fourmi”, affirmaient les combattants de l’Armée d’Italie. Le grognard contemporain doit lui savoir en plus manger son chapeau.

Exit la ligne dure sur l’immigration qui avait constitué le cœur de la campagne de Nicolas Sarkozy. Le président est bien décidé à humaniser son image . A ses troupes d’effectuer la manœuvre et, sans rechigner. On leur avait promis un hyper-parlement , promesse de Gascon, ils se retrouvent avec un pouvoir législatif déconsidéré ravalé en simple chambre d’enregistrement.

La pilule est difficile à avaler. Nicolas Sarkozy en a conscience. Lors du même conseil des ministres, il a avec bienveillance prévenu son ministre de l’immigration : “ Il ne faut pas dire aux députés qu’on ne va pas appliquer leurs lois.

De quoi faire sortir de sa torpeur le ronronnant président de l’Assemblée. Particulièrement remonté, Bernard Accoyer, a manifesté mercredi son agacement : “La force de la loi votée est un des principes d’une démocratie parlementaire et d’un État de droit.” Craignant de ne pas être assez clair,  a développé sa pensée : “La loi votée par le Parlement s’impose à tous”. “Une fois délibérée et adoptée par les élus de la Nation, elle doit être appliquée, y compris par le gouvernement.

De fait, selon l‘article 21 de la Constitution, le premier ministre «assure l’exécution des lois» et le gouvernement est en effet tenu d’élaborer les décrets d’application nécessaires à l’entrée en vigueur des lois adoptées par le Parlement. Techniquement, la seule solution recevable pour ne pas appliquer la loi, ou certains de ses articles, aurait été de procéder à leur abrogation .

D’un mal, Jean-François Copé entend faire un bien. Le député-maire de Meaux se positionne en défenseur du concept d’hyper-Parlement et soigne sa côte de popularité auprès de ses collègues de l’Assemblée. A défaut d’être César dans l’immédiat, Jean-François Copé qui ne cache pas ses ambitions pour 2017, emprunte les habits de Brutus et dénonce l’atteinte aux droits du Parlement.

Présent lors de la réunion du groupe UMP de l’Assemblée nationale mardi à Eric Besson a vécu quelques moments difficiles. Mué en chef de meute, Jean-François Copé président du groupe a ouvert les débats en lançant au ministre d’ouverture: “ça pose un problème de principe et de procédure. Tu affaiblis le Parlement. Tu aurais dû en parler au président de la commission des Lois (Jean-Luc Warsmann) et, accessoirement, à moi”. Ce à quoi des témoins anonymes rapportent que le ministre aurait répondu “J’ai l’impression qu’ici c’est comme au PS : les soutiens sont privés et la critique est publique”. Les charmes de l’ouverture somme toute.

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