Ce jeune couple à la table du restaurant, qui papote autour d'un verre d'une belle couleur rosée. Leurs rires et leurs regards pétillent grâce à l'élixir qui leur donne plus d'audace et de coeur. Le breuvage les enrobe comme un cocon de pétales de roses. Ils sont un peu ivres. Ils l'étaient déjà l'un de l'autre, mais maintenant ils sont plus hardis et ils osent se le confier. Le serveur a fait sauter le bouchon d'un beau bruit sec qui a claqué dans l'air comme un coup de pistolet. Le départ est donné, plus rien de semble pouvoir les arrêter. Chacun verse dans la coupe de l'autre son bonheur d'être ensemble. Un verre de rosé n'est pas un sortilège qui prend fin. Ce n'est pas le phyltre d'amour de Tristan et Iseut, mais une petite aube qui se lève entre deux amoureux, le matin de leur rencontre, un jour rien qu'à eux. C'est le vin des premiers temps. Plus tard, la cape plus profonde du bordeaux les enrobera de son soyeux et les amènera à faire d'autres découvertes qui n'appartiennent qu'à eux. Mais, pour l'instant, ils se contemplent à travers cette lunette rosée. Il voit vaciller comme un mirage son sein qui point dans l'échancrure de son décolleté.
La légèreté de la robe d'un verre de rosé offre aux amoureux d'inscrire ces instants frétillants dans l'ambre d'une couleur joyeuse. C'est une mémoire guillerette et fraîche, en aucun cas grise.
Image: couché de rosé.