Cet article est adapté d'une intervention publique. Il a aussi été publié sur Ecolo Info
Avez-vous remarqué à quel point l’inconnu inhibe?
Si je ne connais pas le temps de demain, je mets deux heures à faire ma valise.
Si je ne connais personne à une soirée, je reste sur ma chaise.
Si j'attends la réponse pour un entretien d'embauche, je suis incapable de faire quoique ce soit de la journée.
Avez-vous déjà essayé de manger les yeux fermés un repas dont vous ne connaissiez pas le menu ? Essayez. La seule inquiétude pourrait vous faire détester votre plat préféré.
Nommer son émotion, ses sentiments, c’est les sortir de l’inconnu.
Ce n’est pas forcément les accepter, c’est uniquement les connaître, se les approprier.
On n’est pas responsable de nos émotions. Elles débarquent comme ça, du fait de notre histoire, de notre caractère, de notre état de fatigue. On n’est pas responsable de nos émotions, mais elles nous appartiennent. Elles sont bien à nous, et c’est à nous de les gérer.
On peut alors les accepter pleinement, si elles nous semblent constructives. Accepter sa rage, ça peut être sortir dehors et hurler pour la faire passer, la libérer, ou respirer profondément longuement pour l’apaiser. Je peux alors aussi me demander, d'où me vient cette rage? Est-ce de la peur, de l'angoisse, de la colère?
En nommant mon sentiment et en cherchant sa provenance, je fais connaissance avec moi-même et je me donne l'occasion de progresser.
Si je ne m’approprie pas mon émotion, elle s’appropriera mon esprit, mon corps et mes attitudes.
Nommer son émotion c'est choisir de regarder non pas sa vie, mais ce que l'on vit.
Personnellement, je trouve qu'on ne partage pas assez nos émotions.
Peut-être, d'ailleurs, parce que l'on ne prend pas le temps de les connaitre... N'empêche, on est tous d'accord pour dire que le partage des connaissances, des richesses, naturelles ou matérielles est un pas vers un équilibre collectif. Et pourtant, moi j'ai la conviction que les partages les plus riches sont ceux des sentiments.
Partager ses émotions, c'est accepter de se dévoiler. C'est accepter notre condition d'hommes et de femmes et renoncer à la working warrior business surfing friming attitude qui veut que si tu commences à partager tes émotions tu mets le doigt dans un engrenage infernal. L'autre va te voir rire et plus jamais il ne pensera que tu pourras être sérieux, il va te voir pleurer, et il se dira "cette fiiiille est une ultra sensiiiible, elle est faiiiible".
C'est quand même incroyable: on t'apprend ça dès ton plus jeune âge en plus! T'as 18 mois, tu risques ta vie en descendant les marches du jardin, et là, tu t'éclaaates le genou sur le gravier! Tu lèves la tête, cherchant du regard un adulte consolateur. Tu vois un grand benêt qui te dit :
- Boum badaboum ! Bravo ! Pleure pas mon coco. T'es un grand garçon, ça pleure pas les garçons. Et pis c'est juste un petit bobo .
- Et ben si j'ai mal ! Et en plus je suis vexé... Aaah et puis c'est quoi ce truc rouge qui coule sur mon genou, c'est flippant ! Il n'y a donc personne pour entendre ma détresse !
Et ben je vais vous dire, la working warrior business surfing friming attitude, elle-me-saoule!
Moi je suis touché par ceux qui savent partager leurs émotions. Je trouve que c'est une force de savoir dire ce qu'on a vraiment au fond du coeur, de savoir faire éclater l'instant présent ! Ça assainit la relation, ça rend la relation humaine plus... humaine...
C'est risqué? On risque d'être jugé ? De se taper la honte ? Rassurez-vous, ça ne sera pas la première fois…
Il m’est plusieurs fois arrivé d'être jugé pour un comportement qui n’était pas le mien. Je voulais me la péter, paraitre, être vu, et ça a complètement foiré. Etre raillé, moqué ou ignoré pour ce qu’on n’est pas, cela n’a aucun sens. Etre mis en valeur pour ce qu’on n’est pas, n’en a pas plus…
En fait, partager ses émotions, c’est prendre un risque. Vous savez lequel ?
Partager ses sentiments c’est prendre le risque de se faire connaitre, vraiment.++ Une liste de sentiments en 5 colonnes pour se faire la main...