Tout étant bon pour éviter d’aller voir le dernier film de Christophe Honoré, c’est de façon totalement imprévue et en ignorant tout du film iranien A propos d’Elly que je suis rentré dans la salle de cinéma. Si j’en suis sorti avec une soudaine envie d’en finir, j’y ai également vu une intelligente représentation de la société iranienne.
Tout commence avec l’arrivée en week end d’un groupe d’amis, leurs enfants et une pièce rapportée : Elly est invitée par une femme de la bande pour faire connaissance avec leur ami récemment divorcé. S’ensuit une première partie de film pleine de joie de vivre, où l’on mange, rit, danse, fleurte… Bref, comme dirait Depardieu dans Les Anges Gardiens : on mange des nouilles en salades.
On sent que tout cela est construit pour ne pas durer : très vite, les rires sont remplacés par les larmes suite à un accident domestique au cours duquel on ne retrouve plus l’invitée surprise, Elly. La bande d’amis découvre alors qu’ils ne savent presque rien de cette jeune fille si mystérieuse, et qu’il est bien difficile pour eux de retrouver sa trace ou celle de sa famille. La tension monte, les personnalités se révèlent et, malheureusement, le scénario s’essouffle. Les non-dits inutiles agacent et font penser que l’intrigue est aussi fragile qu’un château de carte en plein mistral. On se perd un peu dans les longueurs, jusqu’à ne plus savoir où nous emmène Asghar Farhadi, le réalisateur – mais aussi scénariste, producteur et chef décorateur pour ce projet.
Cette deuxième partie très lacrymale et très cérébrale à beaucoup moins d’intérêt d’un point de vue de l’histoire, mais le tableau de la société iranienne qu’elle dépeint au travers de cette bande d’amis est fascinant. Car si pendant les moments de joie ces jeunes gens formaient une société moderne et libérée, les temps de crises ont révélé raideurs et blocages religieux – métaphore de la situation du pays ? Désormais, les maris interdissent aux femmes de quitter la maison, sortent de leurs gonds et les molestent. Et lorsqu’on apprend qu’Elly est fiancée, son déshonneur finit d’achever le moral de cette – jadis – joyeuse troupe. Le tout est très bien servi par un jeu d’acteurs au plus juste et des dialogues assez bien ficelés pour réellement nous immerger dans ce huis clos malgré une histoire qui tourne en rond.
Au final, je ne suis pas sorti de la salle avec la soudaine envie de crier ma joie à mes comparses spectateurs. Mais j’en suis sorti moins bête – cela compensera le dernier film que j’ai vu et chroniqué – et c’est déjà pas mal.