La semaine dernière s'était achevée sur la violente polémique relative à la boutade jugée raciste de Brice Hortefeux lors de l'université d'été de l'UMP, dévoilée avec plusieurs jours de retard. Le week-end fut chahuté pour les ministres de Sarkofrance. Et lundi 14 septembre était un triste anniversaire, celui de la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers. Un an pour rien.
Nicolas Sarkozy a lancé la contre-offensive.
Hortefeux applaudi
Ce week-end, Brice Hortefeux a évidemment reçu le soutien de tout l'appareillage gouvernemental et Umpiste. Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée, Henri Guaino, conseiller spécial du chef de l’Etat, mais aussi Xavier Bertrand, le secrétaire général de l'UMP, tous se sont passés le mot pour défendre le gaffeur de l'Intérieur. Ce dernier, lors d'une réunion publique, s'est écrié : «Nous apportons notre soutien à Brice Hortefeux». Alors que les ministres et secrétaire d'Etat applaudissaient ostensiblement, seule Rama Yade est restée, tout aussi ostensiblement, bras croisés.
sarkozy & Hortefeux : "peu de temps à perdre avec ça..."
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Eric Besson, son successeur à l'Identité Nationale, a opportunément abandonner l'idée des tests ADN comme filtre du regroupement familial. la démarche ne trompe personne: il s'agit de afficher un visage doux de la Sarkofrance. Deux ans pour en arriver là. En septembre 2007, un député UMP avait passé un amendement à la nouvelle loi sur l'immigration de Brice Hortefeux, avec le soutien du gouvernement. Il prévoyait le recours, "volontaire", aux tests ADN pour les candidats au regroupement familial puissent "mieux" prouver leur filiation. Deux ans plus tard, Besson regrette, non pas l'ignominie morale mais l'impossibilité "technique": «Je ne signerai pas ce décret d'application pour une raison simple. Je ne suis pas en mesure dans les délais impartis par la loi, 31 décembre 2009, de respecter l'esprit et la lettre de la loi». La loi interdit notamment la constitution de fichier et exige la confidentialité des données. Fait rarissime, un ministre refuse d'appliquer une loi votée par le Parlement. Jean-François Copé, chef de file des députés UMP, n'est pas content : "Il faut que chacun soit bien conscient tout de même qu'il s'agit d'une loi votée et que lorsque la loi est votée, les gouvernements ont l'obligation de mettre en œuvre les décrets d'application."
Mais Eric Besson, rejoint par François Fillon, considère que les garanties éthiques qu'il doit respecter, sont impossible à mettre en oeuvre (confidentialité, interdiction de ficher les ADN recueillies, volontariat). En déplacement à Moscou, le premier ministre en ajouté une couche : "Le Parlement a voté un texte très équilibré dans lequel il y a une garantie de défense très forte des droits. Pour le moment nous n'arrivons pas à mettre en oeuvre cette garantie."
Des ministres hués
Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture, puis Eric Woerth, ministre du Budget, furent copieusement sifflés à la Fête de l'Huma à coups de «Social-traître» et «casse toi pauvre con». Les deux membres du gouvernement voulaient montrer qu'ils débattent avec tout le monde. Les participants, de gauche, à cette manifestation ne l'entendaient pas de cette oreille.
Frédéric Mitterrand chahuté à la Fête de l'Huma
par LePostfr
Sarkozy, héraut du bien-être
Pendant le week-end, Nicolas Sarkozy a critiqué la "légèreté" avec laquelle Brice Hortefeux s'est fait piéger, puis avec laquelle il a géré la polémique qui s'en suivit. Lundi, le président voulait prendre de la hauteur. Il avait opportunément calé ce 14 septembre la remise d'un prestigieux rapport sur la "Mesure de la Performance Économique et du Progrès Social", rédigé par une commission présidée par Joseph Stiglitz, ancien conseiller de Bill Clinton et accessoirement Prix Nobel d'Economie. L'objectif de la commission d'experts (encore une), constitutée en février 2008, était de réfléchir à la constitution de nouveaux outils statistiques de mesure du bonheur humain et du progrès social.
Lundi, Sarkozy s'afficha en grand rénovateur des ... statistiques économiques mondiales. IL fustigea "la religion des chiffres", lui qui tenta de mettre en place toutes sortes d'objectifs quantifiables pour mesurer la performance de ses ministres: "il y a depuis longtemps un problème avec ce que nous calculons et avec la manière dont nous l'utilisons. Pendant des années, les statistiques ont affiché une croissance économique de plus en plus forte (...) jusqu'à ce qu'il apparaisse que cette croissance, en mettant en péril l'avenir de la planète, détruisait davantage qu'elle ne créait". Lundi, Sarkozy était même le nouveau Sous-Commandant Marcos, un leader révolutionnaire qui en a assez de la dictature du PIB qui asservit les hommes et les consciences. Jugez plutôt : "Le marché, dans lequel je crois, n'est pas porteur de sens (...) de responsabilité (...) de projet (...) de vision. Les marchés financiers encore moins." Une fois encore, Sarkozy tente de convaincre que la France sera précurseur: "la France se battra pour que toutes les organisations internationales modifient leurs systèmes statistiques (...) la France proposera à ses partenaires européens que l'Europe donne l'exemple. la France va adapter son propre appareil statistique en conséquence".
Sur le fonds, on ne sait pas grand chose des recommandations du rapport qui seront retenues par Nicolas Sarkozy. La démarche du monarque apparaît surtout comme une diversion de plus, un joli contre-feux.
Réduire la question du progrès social à une affaire de mesure est une chose curieuse. On sait "parfaitement" compter les morts, les malades, la disparition des espèces, la pollution, etc. La question est plutôt celle des objectifs politiques que l'on se fixe. Ayant fait campagne sur le temps de travail et la défiscalisation du pays, Nicolas Sarkozy a été désavoué par les faits, la crise d'un modèle qu'il chérissait voici encore un an. Le voici qui tente de rebondir, d'attraper une partie de l'aspiration populaire en faveur d'un autre monde avec quelques manipulations oratoires sur nos outils de mesure. Rien n'empêche le président de publier régulièrement une batterie d'indicateurs sur des critères sociaux, éducatifs ou sanitaires.
Fallait-il une commission médiatisée pour cela ? Non. Il fallait du courage politique.
En fin de journée, le président français recevait 5 organisations syndicales en prévision du nouveau sommet du G20 à Pittsburgh le 25 septembre. Il fallait leur montrer qu'il s'était saisi du problème de la régulation financière mondiale, un an après la faillite de la banque Lehman Brothers et des tourments boursiers qui s'en suivirent. La veille, son secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant avait tenté de convaincre de la détermination du président: Sarkozy est prêt à quitter le G20 s'il n'obtient pas satisfaction sur la régulation des bonus bancaires.
De qui se moque-t-on ? Sarkozy joue à ce petit chantage à chaque réunion internationale. Sur le fonds, il ne propose rien de mieux que les recommandations timides de l'autorité de régulation boursière britannique: un gentil étalement du versement des bonus sur 3 ans. Quelle révolution !
Plus la proposition sarkozyenne est modeste, plus le monarque tape du pied comme un "petit garçon" (aurait dit PPDA). Aux Etats-Unis, la fête sera belle cependant. A l'occasion de ce voyage américain, Sarkozy s'arrêtera à New York, pour parler à l'ONU. Le Monarque aime les tribunes internationales. L'ambassade de France a déjà prévu large: une belle surprise-party avec 3 à 4 000 invités pour fêter la venue du Président, le 23, à New York. Les économies ne sont pas pour tout le monde en Sarkofrance.
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