13. Les interprétations et applications contradictoires du message biblique de la justification ont été au XVIe siècle une raison principale de la division de l’Eglise occidentale ; les condamnations doctrinales en témoignent. De ce fait, une compréhension commune de la justification est fondamentale et indispensable pour surmonter la division des Eglises. La réception des données des sciences bibliques, de l’histoire de la théologie et de l’histoire des dogmes a permis de parvenir, dans le dialogue œcuménique depuis le deuxième Concile du Vatican, à un rapprochement significatif à propos de la doctrine de la justification. Ce rapprochement permet de formuler dans cette déclaration commune un consensus sur des vérités fondamentales de la doctrine de la justification à la lumière duquel les condamnations doctrinales correspondantes du XVIe siècle ne concernent plus aujourd’hui le partenaire.
3. La compréhension commune de la justification
14. L’écoute commune de la Bonne Nouvelle proclamée dans l’Ecriture Sainte ainsi que les dialogues théologiques de ces dernières années entre les Eglises luthériennes et l’Eglise catholique romaine ont conduit à une approche commune de la conception de la justification. Tout cela comporte un consensus dans des vérités fondamentales ; les divers éclaircissements concernant des arguments particuliers sont compatibles avec ce consensus.
15. Notre foi commune proclame que la justification est l’œuvre du Dieu trinitaire. Le Père a envoyé son Fils dans le monde en vue du salut du pécheur.
L’incarnation, la mort et la résurrection de Christ sont le fondement et le préalable de la justification. De ce fait, la justification signifie que le Christ lui-même est notre justice, car
nous participons à cette justice par l’Esprit Saint et selon la volonté du Père. Nous confessons ensemble : c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvifique du
Christ, et non sur la base de notre mérite, que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l’Esprit Saint qui renouvelle nos cœurs, nous habilite et nous appelle à accomplir des œuvres
bonnes.[11]
16. Tous les êtres humains sont appelés par Dieu au salut en Christ. Nous sommes justifiés en lui seul lorsque nous recevons ce salut dans la foi. La foi
elle-même est don de Dieu par le Saint-Esprit qui agit dans la communauté des croyants par la parole et les sacrements et conduit les croyants vers ce renouvellement de la vie que Dieu
parachève dans la vie éternelle.
17. Ensemble nous sommes convaincus que le message de la justification nous renvoie d’une manière particulière au centre du témoignage néo-testamentaire de l’agir
salvateur de Dieu en Christ : il nous dit que, pécheurs, nous ne devons notre vie nouvelle qu’à la miséricorde de Dieu qui nous pardonne et fait toute chose nouvelle, une miséricorde qui
nous est offerte et est reçue dans la foi et que nous ne pouvons jamais mériter sous quelque forme que ce soit.
18. Pour ces raisons, la doctrine de la justification, qui reprend et développe ce message, n’est pas seulement une partie de l’enseignement chrétien. Elle se situe dans un lien essentiel à toutes les vérités de la foi qui doivent être considérées dans leur interdépendance interne. Elle est un critère indispensable qui renvoit sans cesse au Christ l’ensemble de la doctrine et de la pratique des Eglises. Lorsque les luthériens insistent sur la signification particulière de ce critère, ils ne nient pas l’interrelation et le sens de toutes les vérités de la foi. Lorsque les catholiques se savent redevables de plusieurs critères, ils ne nient pas la fonction spécifique du message de la justification. Ensemble, luthériens et catholiques ont pour but de confesser partout le Christ, de placer en lui seul leur confiance car il est le seul médiateur (1 Tm 2, 5s.) par lequel Dieu se donne lui-même dans l’Esprit Saint et offre ses dons renouvelants [cf. les sources pour chap. 3].
[11]Cf. Tous sous un seul Christ n.14 (1980), in : Face à l’unité. Tous les textes officiels (1972-1985), Paris 1986, pp. 185-194.