On se souvient qu’il y a deux ans, une licence de clown ouvrait ses portes à l’université de Lyon II. Les résultats des premières promos sont tombés : c’est géant ! Une véritable avalanche d’idiots ludiques déferle sur la République du Rire pour le plus grand bonheur des petits et des grands contribuables. Allez, tous en coeur, on relâche les sphincters et on se laisse aller
Question de saison, peut-être, ou de rentrée politique : il ne se passe plus une journée sans qu’on puisse maintenant s’esclaffer à gorge déployée devant les numéros d’équilibristes, de jongleurs, de bateleurs, de blagueurs et de farceurs qu’on nous offre en pâture.
Ca occupe le chômeur devant son poste, sans doute. Et comme avec la crise, il y a de plus en plus de chômeurs, il faut de plus en plus de spectacle.
Ainsi, pas plus tard que la semaine dernière, ce sont les deux péronnelles du PS qui faisaient l’actualité comique du pays en se crêpant le chignon à coup d’urnes bourrées.
Ce week-end, c’est Papy Darcos qui nous faisait une démonstration de sa maîtrise des arts martiaux et de blaguounettes sur le shampoing. On en rit encore.
Et ce lundi, à peine remis des péripéties sur la taxe carbone, paf, on reprend une louchée de crampes douloureuses aux abdos et de spasmes hoquetant avec la brochette de clowns qui s’abattent sur l’actualité comme une douzaine de Bozos dans un cirque Pinder.
Il suffit pour s’en convaincre de jeter un rapide coup d’œil dans les gros titres pour se convaincre que la mode est à la grosse blague. Dans la catégorie Dépenses Somptuaires et Ultime Fluffy, on retrouve par exemple Borloo, le cloOown pilote d’essai chez Johnnie Walker, tout heureux de pavaner dans les prochaines voitures électriques que l’État achète à grand frais.
L’aspect comique de l’affaire est multiple : vous (contribuable) allez payer pour des véhicules électriques très chers, qui fonctionnent avec des piles au lithium, ce qui engendrera tout un problème de recyclage et d’approvisionnement. Et puis, quel bonheur de financer les états producteurs de ce métal alcalin, comme le Zimbabwe, la Chine, le Tibet ou la Bolivie, dont la stabilité et le calme démocratique ne sont plus à prouver !!
Cependant, notre cloOown Borloo est un habitué des récompenses pour ses œuvres multiples en matière d’humour : business as usual, ici.
Plus marquant, en revanche, est le Clown d’Or dans la catégorie Expression Corporelle décerné à Eric Besson, qui permet de rappeler que l’ensemble de ce gouvernement a été entièrement sélectionné pour sa capacité à explorer toujours plus profond les mines à ciel ouvert du vulgaire qui tache aux pépites de grossièretés facilement exploitées.
Et alors que la polémique sur les blagues racistes du comique troupier Hortefeux est à peine retombée, le bouffon du roi, qui en connaît un rayon question clowneries, décroche le Clown d’Or catégorie « Jeux de lumière et transparence suggestive« . Il a ainsi déclaré, ému, à la remise de son prix :
« Il n’y a plus d’intimité, plus de discrétion, plus rien n’a d’épaisseur dans la transparence, à commencer les êtres humains. On vole une phrase au hasard, on en fait un événement national, on la diffuse partout, on la commente sans d’ailleurs savoir de quoi on parle »
Ce qui ressemble à s’y méprendre à une auto-évaluation lucide, fort bien venue lorsqu’on analyse sa prose lue par notre président à tous ou presque : pas d’épaisseur, plus d’intimité, de l’événement national diffusé partout et des commentaires sans savoir de quoi on parle… C’est bien du Guaino !
On comprend pourquoi le président a gardé ce bouffon à côté de lui : il doit bien se bidonner tous les jours. Sans compter ceux où il envoie son ministre fauteur en pèlerinage de repentance.
Dans la catégorie « Défaussage« , pour son sketche « Internet m’a Tuer », c’est Patrick Devedjian qui rafle haut la main son Clown d’Or en partant dans des explications farfelues, confuses et ridicules pour tenter de défausser son ami politique qui s’est pris les pieds dans le tapis.
Rappelons que notre sémillant Patrick n’est pas cafetier même si ses réflexions puisent dans la même source que celle du Balto. Il est ministre, eh oui, et il travaille sur la relance, sans torchon sur l’épaule, ce qui constitue une raison supplémentaire de lui accorder son Clown d’Or (autre exercice pour rire : donner rapidement ses trois dernières actions concrètes).
Et quand nos clowns gouvernants se sentent un peu en perte de vitesse, on peut toujours faire appel à la troupe des Troubadours Virevoltants : toujours à la soupe, souvent dans les médias, rarement dans l’hémicycle, les Troubadours Virevoltants ont une activité très particulière qui consiste à occuper de l’espace et pondre de nouvelles lois toutes plus pertinentes que celles qui existent déjà et à légiférer sur des sujets pour lesquels, sans eux, ce serait forcément la panique ; on pourra par exemple leur décerner un Clown d’Or catégorie Hommage Pour l’Ensemble de Leur Œuvre rien qu’en pensant aux folles plaisanteries et amusantes billevesées qu’ils n’ont pas manqué de déverser dans nos journaux à l’occasion des lois sur HADOPI …
Et en dernier recours, lorsque même les troubadours s’endorment et que la République est presque totalement repue de rires et d’amusements, on peut toujours lancer le Carrousel A Bêtises : pour cela, on pourra toujours faire appel aux instituts de sondage, aux méthodes éprouvées et précises, qui poseront leurs questions affûtées comme du beurre chaud et obtiendront des résultats différents et aussi farfelus que cocasses.
Le constat de toute cette distribution de prix est pourtant sans appel : ce pays n’est plus qu’une constellation de paillasses, farceurs, clowns et autres bouffons qui coûtent fort cher et ne rapportent, au final, que des emmerdes… En somme, les clowns, il en faut toujours un. Quand il n’y en a un ça va. C’est quand ils y en a beaucoup qu’il y a des problèmes.