Mais, et c’est certainement le plus important, de très nombreux/ses militant(e)s avaient répondu «présent» à cette journée de travail. C’est Nicolas Sarkozy qui devrait être content : même le dimanche… Ambiance fort sympathique comme toujours, ce qui ne gâte rien.
J’avais choisi l’atelier portant sur les «services publics». Non que les autres ne m’eussent point intéressée – économie ou écologie – mais il faut bien faire un choix et les services publics de la Région Ile de France, notamment les transports qui ont retenu notre attention le plus longtemps, sont certainement – avec le logement et le «Grand Paris» que souhaite nous concocter aux petits oignons Nicolas Sarkozy - un des enjeux cruciaux des élections régionales de l’an prochain.
De fait, ces questions sont intimement liées. Le projet de Nicolas Sarkozy ne vise rien moins qu’à retirer la gestion des transports de l’Ile de France à la Région en arguant de son incompétence qui serait évidente : la grogne des usagers. Que celle-ci soit souvent justifiée, est l’évidence même. En cause, les retards à répétition sur de nombreuses lignes, les incidents mécaniques ou les accidents qui ne manquent pas. Et surtout, le manque quasi total d’information en temps réel en cas de perturbations inopinées. A cet égard, la SNCF a beau multiplier à chaque fois les promesses cela n’est guère suivi d’effets.
Mais encore faudrait-il dire pourquoi : le Conseil régional a hérité de la compétence en matière de transports en commun en 1998 et a dû faire face à un tel état de délabrement des infrastructures laissées à vau-l’eau depuis des décennies qu’il est impossible d’y remédier totalement en 10 ans, tant les sommes à mobiliser sont énormes - au minimum 31 miliards d’euros à l’horizon 2035 ! - eu égard aux ressources propres de la Région.
Les dépenses liées au transports en commun absorbent 1/3 du budget de la Région. Le nombre de voyageurs transportés est en hausse exponantielle et avec l’enchérissement du prix de l’essence et du gas-oil du fait de la future «taxe carbone» il est prévisible qu’un nombre supplémentaire de personnes abandonneront leur voiture pour se rendre au travail.
Beaucoup a déjà été fait en dix ans. J’en veux pour preuve la nouvelle gare d’Ermont-Eaubonne. J’ai connu l’avant – un infâme cloaque ! – et l’après, une gare lumineuse et accueillante, dotée des derniers perfectionnements, accessible aux handicapés qu’ils soient moteurs, mal entendants ou mal voyants.
Je suis bien évidemment plus sensible que d’autres aux problèmes des handicapés. Mon handicap est léger et même quand je marchais avec deux cannes sans droit à l’appui, j’ai toujours été autonome et pris les transports en commun, le train, etc… Mais j’ai été sensibilisée à toutes les questions d’autonomie et d’ergonomie en vivant deux ans à Bouffémont parmi des handicapés en fauteuil roulant
Or, les questions d’accessibilité se heurtent à de nombreux problèmes d’infrastructures non adaptées, lesquelles sont tout simplement une affaire de gros sous qui ne peut être réglée d’un coup de baguette magique car les matériels et les infrastructures adaptées coûtent très cher. Pour une gare totalement accessible aux handicapés, on compte par dizaines voire centaines celles qui ne le sont pas. Et quant elles le sont, il n’est pas dit que l’ascenseur ne sera pas en panne ! C’est même la spécialité de celui qui dessert la Gare du Nord depuis la gare routière.
Autre exemple, révélateur de l’immensité des travaux de mise aux normes qui restent à effectuer, le réseau de banlieue va être bientôt doté de rames entièrement accessibles aux handicapés. Las ! Les quais de la plupart des gares d’Ile de France ne sont pas à la bonne hauteur. Et ne pourront l’être avant une bonne dizaine d’années, toujours une question de budget…
Je ne pense pas évidemment que redonner la gestion des transports d’Ile de France à l’Etat soit la solution adéquate. Cette recentralisation ne pourrait qu’être néfaste sur plusieurs points.
La tendance ultralibérale qui prévaut notamment depuis 2002 vise à ce que l’Etat se défausse sur les différentes collectivités locales d’un maximum de dépenses qui lui incombaient et cela, sans les compenser totalement. Cela ne pourra que s’aggraver avec la suppression de la taxe professionnelle qui sera (mal) remplacée par des taxes assises uniquement sur la valeur foncière des entreprises.
Néanmoins, s’agissant des infrastructures – matériels, gare et nouvelles lignes – je pense que la Région parisienne est très différente des autres, du fait notamment de la densité de son réseau qui tient surtout au fait qu’il dessert la capitale et qu’un grand nombre de Franciliens sont obligés de parcourir des distances de plus en plus longues pour travailler.
Sans le moins du monde être obligé de recentraliser la gestion des transports, je suis de plus en plus persuadée que l’Etat devrait prendre à sa charge une bonne partie des dépenses d’investissement plutôt que de les laisser assumer par la Région. Par le biais de «Réseau Ferré de France» et parce que Paris est la capitale de l’Etat.
La logique du «Grand Paris» s’inscrit à l’évidence dans une privatisation à plus ou moins longue échéance… Celle des transports mais aussi la main mise sur le foncier autour des gares. Par le jeu des expropriations. Si j’ai bien compris, dans un rayon d’un kilomètre. Nul besoin d’être grand clerc pour savoir l’usage qui en sera fait : comme dans les années 70, les pelleteuses des promoteurs seraient promises à un bel avenir. Et certainement pas pour construire du logement social ! Les plus pauvres seront une fois de plus éloignés des gares et des centres-villes. Transplantés dans les banlieues de relégation sociale. Persona non grata.
De surcroît, très certainement sur fond de futurs scandales financiers hautement prévisibles, les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets. Les marchés de travaux publics ont beau être théoriquement très encadrés, nous avons déjà vu à moult reprises combien Nicolas Sarkozy ne respecte pas les prescriptions légales à cet égard. Pourquoi voudriez-vous qu’il s’embarrasse de plus de scrupules quand il s’agira de favoriser des promoteurs «amis» ? Le temps des «copains et des coquins» selon la formule de Ponia, est devant nous.
La question des tarifs des transports en commun reste fort épineuse. Elle sera pourtant au cœur des débats lors de la campagne électorale et risque fort de les polluer par excès de démagogie. D’après ce que je sais Valérie Pécresse et l’UMP souhaiteraient une carte unique d’un montant de 45 euros. Cela aurait certes le mérite de la simplicité mais au détriment des comptes déjà fragiles de la Région.
En outre, cela avantagerait les Parisiens qui disposent d’une offre – métro, autobus, tramway – autrement supérieure à celle des banlieusards. Si l’on regarde la fréquence de passage, la différence est encore plus évidente… attendre un autobus ou un métro à Paris quelques minutes ou parfois 45 minutes quand j’arrive à la gare d’Enghien, il n’y a pas photo ! Et dans les banlieues les plus reculées, c’est parfois plus d’une heure voire nettement plus.
Certains, le NPA et sans doute aussi le PC prôneront la gratuité, arguant de surcroît que cela rend inutiles les frais dus au contrôle des titres de transport. Ce qui n’est pas totalement faux. Mais à une époque aussi troublée que la nôtre, il faudra toujours du personnel affecté à la surveillance. Il ne faut surtout pas mettre les problèmes de sécurité sous le boisseau. Jospin a été payé pour les avoir minimisés.
Certes, la gratuité a été adoptée dans certaines villes. Châteauroux, par exemple, et ce dans un rayon d’au moins 20 km. J’en ai bénéficié la dernière fois que je suis allée à Ardentes. Il s’agit surtout pour la municipalité d’aider le commerce de centre-ville mis à mal par les grandes surfaces qui se sont multipliées aux alentours. Mais l’on ne peut pas comparer avec l’Ile de France car les infrastructures sont réduites aux autobus et à la gare routière.
Il reste que la piste explorée par le Conseil régional, à savoir une tarification assise sur «l’espace-temps» me semble foncièrement injuste car elle pénaliserait les usagers habitant le plus loin et qui sont souvent en même temps ceux qui ont les revenus les plus modestes, obligés d’aller vivre de plus en plus loin des centres urbains du fait du coût des logements. Je n’ai bien sûr pas été la seule à le faire remarquer !
La Région a déjà fait un très grand effort en fusionnant les zones 6, 7 et 8. Il me semble que la même chose pourrait être faite pour les autres zones. La Zone 2 est géographiquement très limitée. Pour Paris-Nord, elle s’arrête à Saint-Denis. La Carte Orange ou Navigo comprend obligatoirement au moins deux zones. Ne pourrait-on pas envisager de fusionner les zones 1 et 2 dans une zone unique étendue à la zone 3 et faire la même chose pour les zones 4 et 5 ?
J’étais assez exaspérée quand j’étais à Bouffémont : obligée de prendre une carte 5 zones, onéreuse ! Tout simplement parce que la zone 5 commence juste après Domont. Les quelques kilomètres qui séparent les deux gares me coûtaient la peau des fesses… Bien sûr, certains prenaient une carte 4 zones, espérant ne pas être épinglés par un contrôleur. Mais avec ma chance habituelle, je n’y aurais pas échappé ! Et je suis de toutes façons trop foncièrement honnête.
Autre effort consenti par la Région : les tarifs spéciaux – voire la gratuité totale – pour les bénéficiaires des minima sociaux et les chômeurs. Il reste que j’aimerais bien que cet avantage soit étendu aux retraités non imposables. Vous direz que mémé Kamizole défend son bout de gras. Le mien et celui des autres retraité(e)s qui sont dans mon cas. J’ai en effet théoriquement droit à une carte gratuite délivrée par la mairie. Mais celle-ci n’est à ma connaissance valable que sur les bus de la TVO.
Il me semblerait plus équitable qu’elle soit étendue à la RATP et à la SNCF. A moins de penser que les personnes âgées n’ont pas besoin d’aller très loin de chez elles ? Faire les courses devrait leur suffire, n’est-il pas ?
Dernier point crucial, le pouvoir réel de la Région dans le cadre du STIF sur les choix et les modalités techniques en matière d’investissement.. La SNCF et la RATP exercent de fait la maîtrise d’ouvrage grâce à leurs bureaux d’études et d’ingéniérie. Il est évident que la SNCF et la RATP tendent à imposer leurs choix qui ne sont pas forcément les plus pertinents pour la Région. Qui devrait être maître d’ouvrage et non plus seulement maître d’œuvre, tout juste bon à payer. Les bureaux d’études et d’ingéniérie devraient être mis sous la tutelle du STIF.
Autant de points qui feront nécessairement débats lors de la campagne des Régionales. Nous aurons sacrément du grain à moudre et les controverses ne manqueront pas. Il faut aussi penser à l’avenir. En fait partie le projet de la future «francilienne ferrée» qui devrait permettre dans le futur de relier entre elles toutes les banlieues de la grande ceinture. Pour éviter de devoir passer par Paris.
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Nota bene : les personnes intéressées par les questions de transport en Ile de France et le “grand Paris” trouveront d’intéressantes analyses sur le blog de Jean-Paul Chapon Paris est sa banlieue. Je ne suis pas toujours forcément d’accord mais les exposés très clairs des enjeux et des problèmes sont fort appréciables.