Si vous ne savez pas quoi faire de votre dimanche après midi, je ne peux que vous conseiller l'exposition Palestine: la création dans tous ses états de l'Institut du Monde Arabe. Cette installation remarquable permet de découvrir la jeune scène artistique de Palestine, une scène qui se cherche dans un pays en quête d'identité et ravagé par une guerre larvée.
De part l'origine des artistes, le ton est plutôt à la gravité, rendant cette exposition particulièrement forte et touchante. La plupart des oeuvres sont politiquement engagées et dénoncent l'oppression vécue par les palestiniens. Dans Hommage to Childhood de Rana Bishara, des photos d'enfants de camps de réfugiés sont enfermés dans des ballons transparents sous des auréoles en tulle et fil de fer barbelé. Emily Jacir dans Memorial to 418 Palestinian Villages which were destroyed, depopulated and occupied by Israel in 1948 monte une tente où des palestiniens ont brodé le nom de leur village détruit par les israliens. Une des vidéos les plus fortes reste pour moi Bayyaratina de Suha Shoman, où l'artiste relate l'artiste de sa famille, propriétaire d'une orangeraie en terre palestinienne. Terre d'opulence, la propriété est peu à peu décimée sous les exactions d'une armée d'occupation qui cherche à rendre la terre stérile pour chasser les populations arabes. On se retrouve choqué par la véracité du propos et l'absurdité de cette politique de la terre brulée.
D'autres artistes illustrent le quotidien des palestiniens en utilisant l'humour et le second degré. Ainsi, Taysir Batniji capture les photos des miradors isréaliens qui se multiplient sur les terres palestiniennes à la manière des célèbres photographes allemands Bernd & Hila Becher: une manière de rendre esthétique la laideur de l'occupation. Face à l'absurdité des contrôles aux check point (où les palestiniens doivent montrer qu'ils n'ont pas d'explosif en soulevant leurs habits), Sherif Waked réalise une vidéo de défilé de mode où les mannequins présentent des vêtements adaptés à ces contrôles: certains laissent apparaitre le ventre à travers des coupes dans le tissu, d'autres permettent de soulever élégamment le vêtement avec des systèmes de ficelle.
Enfin, des artistes se posent la question d'un futur état palestinien. Khalil Rabah dans United States of Palestine Airlines imagine une future compagnie aérienne palestinienne. Mais la maquette de son futur avion est installé dans un bureau déserté, pour montrer l'absence de réalité de ce projet. Larissa Sansour dans A Space Exodus imagine également le premier homme palestinien allant sur la lune dans un remake de 2001 l'Odyssée de l'Espace, transformant avec humour la phrase mythique d'Armstrong en C'est un petit pas pour un Palestinien mais un grand pas pour l'Humanité. C'est cette image forte de Larissa, plantant le drapeau palestinien sur la lune, qui sert comme illustration pour l'exposition, une façon de montrer que la Palestine a aussi planté son drapeau avec vigueur dans le monde de l'art contemporain.
On pourra noter également la présence importante des femmes dans les artistes exposées, preuve d’une évolution profonde des mentalités et de la société palestinienne.
Hommage to Childhood de Rana Bishara
Memorial to 418 Palestinian Villages which were destroyed, depopulated and occupied by Israel in 1948
de Emily Jacir
Miradors de Taysir Batniji
(photo courtoisie Taysir Batniji)
Bayyaratina de Suha Shoman
(photo courtoisie IMA)
Palestine: la création dans tous ses états
Du 23 juin au 22 novembre 2009
1, rue des Fossés-Saint-Bernard
Place Mohammed-V
75236 Paris Cedex 05
Tél. : 01 40 51 38 38
Site web: www.imarabe.org